Vente d’un immeuble donné en location – régime de TVA du « prorata de loyer » reversé à l’acquéreur
Pour mémoire, le régime de TVA applicable au reversement de prorata de loyer a déjà donné lieu à un article le 27 juin 2012.
A l’époque, nous avions indiqué que le prorata de loyer, qui est reversé à l’acquéreur par le vendeur de l’immeuble donné en location, ne devait inclure aucune TVA, y compris lorsque le bail était soumis à la taxe.
En effet, le vendeur demeure redevable de la TVA sur l’intégralité du loyer qu’il a encaissé auprès du locataire (TVA à l’encaissement) ou facturé (en cas d’option pour les débits). Autrement dit, l’acquéreur ne devient pas redevable de la TVA sur la partie du loyer qui lui est reversée par le vendeur, du seul fait du reversement. Par ailleurs, dans la mesure où l’acquéreur ne rend aucun service au vendeur en contrepartie de ce reversement, cette somme n’a pas à être soumise à la taxe.
Cette analyse a été confirmée, à plusieurs reprises, par la Direction de la Législation Fiscale (DLF) et notamment dans une lettre du 27 août 2007.
Des rumeurs circulent toutefois régulièrement concernant un éventuel changement d’interprétation de l’administration centrale et, encore récemment, certains prétendaient avoir eu connaissance d’un nouveau rescrit de la DLF qui aurait infirmé l’analyse rappelée ci-dessus.
Après vérifications, il apparaît cependant que ces rumeurs sont infondées et que les derniers rescrits qui ont pu être envoyés par la DLF retiennent une solution identique.
TVA et franchises de loyers – premiers abandons de redressements
En principe, une franchise de loyers constitue une réduction de prix et la TVA n’est pas due par le bailleur au titre des loyers concernés par ce mécanisme.
Cependant, dans certains dossiers, l’administration fiscale exige cette TVA auprès du bailleur en soutenant que la franchise de loyers est en réalité le paiement en nature d’un service rendu par le locataire. L’administration fiscale considère qu’il y a alors un échange en nature qui doit être taxé à la TVA chez chacune des parties.
Si ces principes peuvent apparaître clairs, leur application a récemment conduit à de sérieuses difficultés dans la mesure où des services vérificateurs ont pu considérer que :
- la renonciation par le locataire à la faculté de résiliation triennale constituait un service rendu par le locataire ;
- ce service avait pour contrepartie la franchise consentie par le bailleur ;
- il y avait un échange en nature taxable à la TVA entre le bailleur et le locataire (occupation gratuite contre renonciation à la résiliation triennale ou « prise ferme »).
Nous renvoyons sur le sujet aux articles publiés le 24 octobre 2012 (s’agissant des principes) et le 19 septembre 2013 (s’agissant de la situation des locataires).
La nouveauté vient du fait que plusieurs redressements de TVA concernant des échanges « franchise – prise ferme » ont été abandonnés.
Nous comprenons que ces abandons concernent des baux dans lesquels la franchise n’avait pas été expressément mentionnée comme la contrepartie de la renonciation.
Il s’agit évidemment d’une avancée, même si nous avons déjà indiqué que, à notre sens, une prise ferme ne pouvait pas constituer un service au regard de la TVA puisque cela reviendrait à finalement considérer que l’acte d’achat est un service rendu au vendeur !
Pour mémoire, ces abandons nous semblent trouver un écho dans une lettre envoyée par l’administration fiscale à un organisme professionnel du secteur de l’immobilier. En effet, dans cette lettre datée du 26 septembre 2013, il était indiqué que même si la renonciation à la faculté de résiliation triennale constituait, selon l’administration, un service au sens de la TVA, il était néanmoins nécessaire d’établir, notamment en fonction des termes du contrat, un lien direct entre ce service et la franchise pour caractériser un échange taxable à la TVA.
En conclusion, il est encore trop tôt pour crier victoire et il nous semble toujours nécessaire d’anticiper et d’encadrer, autant que possible, les conséquences de tels redressements dans les relations bailleur-locataire, notamment lors de la rédaction du bail.
Modification des taux de TVA à compter du 1er janvier 2014 – Premières précisions officielles de l’administration fiscale
L’administration fiscale vient d’apporter les premières précisions officielles s’agissant des changements de taux de TVA devant intervenir au 1er janvier 2014.
Les principaux apports de ces commentaires sont les suivants :
– de manière générale, l’option pour les débits doit toujours être prise en considération pour déterminer le taux de TVA applicable (paragraphes 70 et 100 du BOI-TVA-LIQ-50) (Voir sur ce point notre article du 15 novembre 2013) ;
– travaux dans les locaux d’habitation – passage du taux de 7 % au taux de 10 % : l’administration fiscale apporte des précisions s’agissant des avenants signés après le 31 décembre 2013 (paragraphe 80) ;
– baux soumis à la TVA : l’administration fiscale prévoit des commentaires spécifiques concernant l’hypothèse de la facturation d’une période commençant en 2013 et se terminant en 2014 (paragraphe 90) ;
– avoir relatif à une opération effectuée en 2013 : l’administration indique qu’il convient d’utiliser l’ancien taux de TVA (paragraphe 230).
TVA – baux soumis à la TVA – changement de taux – facture « Q1 2014 »
A compter du 1er janvier 2014, le taux normal de 19.60% passe à 20% et le taux intermédiaire de 7% à 10%.
D’un point de vue technique, il est prévu que ces nouveaux taux concernent les « opérations dont le fait générateur intervient à compter du 1er janvier 2014. Toutefois, ils ne s’appliquent pas aux encaissements pour lesquels la taxe sur la valeur ajoutée est exigible avant cette date » (article 68 de la loi n° 2012-1510 du 29 décembre 2012).
S’agissant du loyer loyer du premier trimestre 2014, le fait générateur de la location d’immeuble intervient à compter du 1er janvier 2014 et le taux de 20% (ou 10%, selon les cas) devrait donc, en principe, être applicable.
Par exception, lorsque le bailleur est « à l’encaissement » (ce qui est le cas de ceux qui n’ont pas opté pour un autre régime), le taux de 19.60% (ou 7%, selon les cas) sera dû si le loyer « Q1 2014 » est encaissé avant le 1er janvier 2014.
Pour ces bailleurs, l’émission ces prochains jours de la facture « Q1 2014 », en vue d’un encaissement avant le 31 décembre 2013, devrait donc indiquer un taux de 19.60%. En revanche, si l’encaissement intervient après le 1er janvier 2014, il conviendra d’émettre une facture rectificative pour appeler un montant de loyer soumis au taux de 20%. Autrement dit, il n’est pas possible d’émettre une facture indiquant un taux de 20% en vue d’un encaissement avant le 31 décembre 2013.
Lorsque le bailleur « a opté pour les débits », l’analyse est différente. En effet, une première lecture du texte ci-dessous laissait penser que ces bailleurs devaient nécessairement facturer le Q1 2014 avec un taux de 20% dans la mesure où l’exigibilité résultait du « débit » et non d’un encaissement. Une telle lecture soulevait toutefois un problème pratique. Il n’est en effet pas possible de reporter aujourd’hui une TVA à 20%, exigible à raison du débit, sur une déclaration de TVA.
Dans ces conditions, une seconde lecture de l’article 68 est apparue : si le bailleur « au débits » encaisse le loyer avant le 31 décembre 2013, il y a (i) une TVA exigible et (ii) un encaissement avant le 31 décembre 2013. C’est donc la TVA au taux de 19.60% qui est due. Il convient donc d’appliquer les règles indiquées pour les bailleurs à l’encaissement, i.e. émission d’une facture à 19.60%. Il demeure toutefois une difficulté. En effet, si aucun encaissement n’intervient avant le 31 décembre 2013, la TVA est exigible en 2013 (« débit » en 2013) au taux de 20% (fait générateur post 1er janvier 2014) ! Or, nous avons indiqué ci-dessus qu’il n’était pas possible de reporter une TVA à 20% sur les déclarations de TVA du mois de novembre et décembre 2013.
La solution pratique serait de considérer que lorsque la TVA est exigible en raison d’un débit avant le 31 décembre 2013, la TVA serait due au taux de 19.60% même lorsque le fait générateur et l’encaissement ont lieu après le 1er janvier 2014.
Selon nos informations, le futur BOFIP, qui commentera le changement de taux et qui devrait être publié les premiers jours de l’année 2014, contiendra cette « tolérance obligatoire » (Nota du 18/11 : une communication officielle de l’administration fiscale pourrait cependant être faite en 2013). Un bailleur au « débits » devrait donc aujourd’hui émettre une facture de loyer avec un taux de 19.60% pour le « Q1 2014 » et aucune facture rectificative ne devrait être émise si l’encaissement intervient après le 1er janvier 2014, sur la base de cette tolérance administrative.
Conclusion
« Bailleurs à l’encaissement » : facture Q1 2014 émise avant le 31 décembre 2013 : 19.60%. Emission d’une facture rectificative avec le taux de 20% si l’encaissement intervient après le 1er janvier 2014.
« Bailleurs au débits » : facture Q1 2014 émise avant le 31 décembre 2013 : 19.60%. Aucune facture rectificative si l’encaissement intervient après le 1er janvier 2014 (selon nos informations)