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Posts from the ‘Marchands de biens’ Category

27
Juin

TVA – Opérations des marchands de biens – Immeubles achevés depuis plus de 5 ans donnés en location avec TVA – Timing de la récupération de TVA – régime de l’assimilation (réponse)

Dans une réponse ministérielle du 27 juin 2023 (Rep. Louwagie JO AN 27/06/2023, n° 5633), l’administration fiscale précise les conditions d’application du régime de l’« assimilation » des biens en stock à des immobilisations pour les besoins de certaines règles de TVA.

Il est rappelé que :
– Le régime est applicable aux marchands de biens qui donnent en location un immeuble avec TVA avant de le revendre ;
– Le régime n’est donc pas réservé aux promoteurs ainsi que le soutiennent certains services de vérification ;
– L’affectation à une activité de location est établie même en cas de locaux partiellement vacants dès lors que l’assujetti est en mesure de démontrer qu’il procède à la recherche active de locataires (ces précisions avaient déjà été fournies par la Réponse ministérielle Grau JO AN 31/12/2019 page 11557, n° 24298). Selon nos informations, ces précisions valent également pour les locaux totalement vacants.
– Les « vingtièmes » de TVA éventuellement transférés par le cédant (vente exonérée de la TVA) sont déductibles dès que l’assimilation se produit (e.g. après une année de location ou de recherche de locataires) et non pas lors de la revente de l’immeuble soumise à la TVA sur option ;
– Idem pour la TVA d’acquisition résultant d’une option pour le paiement de la TVA exercée par le cédant en application de l’article 260, 5° bis du CGI ;

Il s’agit d’une évolution importante. En effet, jusqu’à présent, un marchand de biens ne pouvait pas déduire la TVA d’acquisition d’un immeuble achevé depuis plus de 5 ans avant la revente de l’immeuble, soumise à la TVA sur option exercée par le marchand de biens. Cette solution résulte d’une jurisprudence du Conseil d’Etat initiée par la décision « Lips » (CE 27 novembre 2020, 9e et 10e ch. réunies, n° 426091, « Mentionné aux tables du recueil Lebon », SNC Lips) (voir notre précédent commentaire).

– S’agissant des autres dépenses engagées en vue de la revente de cet immeuble (des dépenses de travaux, par exemple), il convient d’attendre la revente soumise à la TVA sur option pour pouvoir exercer le droit à déduction sans que le délai de péremption de l’article 208, I de l’annexe II au CGI ne puisse s’appliquer (« 31 décembre de la deuxième année qui suit celle de l’omission ») (cette précision reprend les commentaires publiés au BOFIP sous les références BOI-TVA-IMM-10-30 au paragraphe 100). Il s’agit donc d’un traitement moins favorable que celui de la TVA d’acquisition de l’immeuble (« vingtièmes » ou TVA d’option).

– En cas de revente exonérée de la TVA (à défaut d’option exercée par le vendeur en application de l’article 260, 5°bis du CGI), s’agissant d’un immeuble « assimilé », « la procédure de transfert du droit à déduction prévue au 3 du IV [lire le III] de l’article 207 de l’annexe II au CGI s’applique et [le vendeur] est alors fondé à délivrer à son acquéreur l’attestation de transfert précitée mentionnant la TVA afférente à ces dépenses » (précision intéressante qui vise le montant brut des dépenses sans prendre en considération le temps écoulé entre l’engagement des dépenses et la revente de l’immeuble. Attention, cette précision ne vaut pas pour la TVA d’acquisition de l’immeuble qui diminue avec le temps à compter de l’assimilation).

Les réponses apportées par l’administration fiscale sont importantes.

Elles permettent de sécuriser la récupération de la TVA d’acquisition (« vingtièmes » ou TVA d’option) dès que l’assimilation se produit (e.g. une année de location soumise à la TVA ou de recherche de locataires pour une telle location) pour des opérations marchandes concernant des immeubles donnés en location avec TVA. Ces précisions ne présentent pas comme une tolérance. En pratique, il est donc recommandé d’appliquer ces nouvelles règles du jeu sans tarder.

Elles apportent également une réponse nouvelle et simple s’agissant des « autres dépenses engagées en vue de la revente de l’immeuble » (des dépenses de travaux, par exemple). Pas de déduction de la TVA dès l’assimilation du bien mais au moment de la revente soumise à TVA sur option ou possible report sur une attestation de transfert de « vingtièmes » (même si ce mot n’a plus de sens au cas particulier puisqu’il s’agit du montant brut des dépenses) en cas de revente exonérée.

Dans la mesure où cette TVA n’aura pas été déduite par le vendeur, l’attestation devra reprendre une liste précise des dépenses concernées et inclure la copie des factures correspondantes.

A noter que ces précisions permettent d’éviter la complexité des régularisations annuelles pour les dépenses engagées en vue de la revente de l’immeuble ou pour la TVA d’acquisition de l’immeuble.

13
Avr

257 bis – Vente d’un immeuble loué en TVA par un marchand ou un promoteur à une foncière – la CAA de Lyon relance le débat

 

La CAA de Lyon vient de juger que la dispense de TVA était applicable à la vente d’un immeuble donné en location avec TVA lorsque l’acheteur continue l’activité locative soumise à la taxe même si le vendeur avait comptabilisé l’immeuble en stock.

Jusqu’à présent l’administration fiscale a toujours refusé l’application de la dispense dans une telle hypothèse, précisant que l’immeuble donné en location avec TVA doit être immobilisé tant par le vendeur que par l’acquéreur.

Cette position a été réaffirmée en 2018 à l’occasion du commentaire au BOFIP des décisions du Conseil d’Etat du 23 novembre 2015 concernant la revente d’un immeuble donné en location avec TVA à la suite de la levée d’option dans le cadre d’un contrat de crédit-bail (voir notre article du 8 janvier 2018 concernant la modification du BOFIP et l’article 30 novembre 2015 concernant ces deux décisions)

Ce nouvel épisode n’est pas étonnant dans la mesure où les décisions du Conseil d’Etat précitées, lues à la lumière des conclusions du rapporteur public, ouvriraient, selon certains commentateurs, une brèche permettant de supporter au cas particulier une dispense de TVA. Selon cette lecture, la dispense s’appliquerait à l’achat d’un immeuble donné en location avec TVA par par un acquéreur qui aurait l’intention de poursuivre de manière pérenne cette location y compris lorsque le vendeur a inscrit l’immeuble en stock.

Ceci étant dit, les décisions du Conseil d’Etat du 23 novembre 2015 traitaient d’une hypothèse de revente de l’immeuble post levée d’option dans le cadre d’un CBI, ce qui constitue une hypothèse bien particulière dans la mesure où :
– on ne devient pas un marchand de biens en débouclant son financement avant la vente de l’immeuble qu’on a donné en location de manière pérenne (voir notre article du 17 juin 2016);
– le contrat de crédit-bail revêt une nature particulière au regard de la TVA qui pourrait conduire, selon la cour de justice de l’union européenne, à considérer que la levée d’option ne produit pas d’effet, la « livraison » TVA étant intervenue lors de la conclusion du contrat de crédit-bail (voir notre article en date du 1er juillet 2020).

A suivre donc avec intérêt.

A notre sens, il est encore trop tôt pour changer les pratiques.

Consulter l’arrêt de la CAA de Lyon du 01/04/2021, n° 19LY00379, SARL Bati Conseil Rénovation

Nota du 30 juin 2021 : arrêt définitif.

 

1
Déc

TVA – Opérations des marchands de biens – Immeubles achevés depuis plus de 5 ans – Timing de la récupération de TVA

Le Conseil d’Etat vient de confirmer la règle stricte selon laquelle un marchand de biens ne peut pas déduire la TVA d’acquisition d’un immeuble achevé depuis plus de 5 ans, avant de soumettre via l’exercice de l’option, la revente de l’immeuble à la TVA. Le fait que l’immeuble soit donné en location avec TVA par le marchand de biens ne modifie pas l’analyse.

« […] lorsqu’un immeuble achevé depuis plus de cinq ans est acquis en vue de sa revente, la TVA ayant éventuellement grevé le prix d’acquisition n’est pas déductible sauf exercice, au moment de la revente, de l’option prévue au 5° bis de l’article 260 du CGI. Par suite, la taxe acquittée lors de l’acquisition du bien n’est pas déductible avant cette date, quand bien même l’immeuble donnerait lieu, dans l’attente de sa revente, à des opérations de location soumises à la TVA. »

La société requérante avait demandé le renvoi à la CJUE d’une question préjudicielle mais le Conseil d’Etat n’a pas accueilli favorablement cette demande.

L’analyse repose sur le lien qui est fait entre l’achat et la revente de l’immeuble chez les marchands de biens.

Au cas particulier, compte tenu des règles encadrant l’option, la revente d’un immeuble achevé depuis plus de 5 ans ne peut pas être soumise à la TVA tant que la revente n’est pas intervenue, l’option n’étant en effet exercée que dans l’acte de revente. Ainsi, pendant la période de détention, l’achat de l’immeuble est « fléché » vers une opération exonérée et non pas vers une opération taxable et ceci même s’il est évident, compte tenu par exemple du régime de TVA du bail et de l’importance de la TVA d’acquisition ou encore de la TVA grevant les travaux, que la revente sera soumise à la TVA sur option.

Ainsi que le suggère le rapporteur public (conclusions disponibles sur ArianeWeb), une voie de sortie pourrait être une évolution des règles gouvernant l’option, afin de permettre une option par anticipation. Pour mémoire, cette solution avait déjà été demandée à l’administration fiscale en 2015, mais sans succès (voir notre article de l’époque co-signé avec notre confrère Pierre Appremont).

Consulter la décision CE 27 novembre 2020, 9e et 10e ch. réunies, n° 426091, « Mentionné aux tables du recueil Lebon », SNC Lips

Consulter les conclusions

Nota du 15 juin 2021 : dans le même sens, voir également CE 9 juin 2021, 9e ch., n° 429498, « Inédit au recueil Lebon », SNC Le Cap

3
Juil

TVA – TAB – deux nouvelles décisions du CE (Immoxine et RGMB)

 

CE 1er juillet 2020, 8e ch., n° 435463, Immoxine, « inédit au receuil Lebon » : Immoxine, qui exerce une activité de marchand de biens, a procédé, les 5 juin 2012 et 16 mai 2014, à la cession de trois terrains à bâtir issus de la division parcellaire de deux ensembles immobiliers constitués, chacun, d’une maison à usage d’habitation et de son terrain d’assiette, acquis les 28 février 2012 et 24 octobre 2013.

CE 1er juillet 2020, 8e ch., n° 431641, RGMB, « inédit au receuil Lebon » : RGMB, qui exerce une activité de marchand de biens, a acquis le 19 juillet 2012 un ensemble immobilier constitué d’un terrain sur lequel était implantée une maison d’habitation. Cet ensemble immobilier a fait l’objet, après son acquisition, d’une division en neuf parcelles, l’une constituée d’un terrain supportant la construction et les huit autres de terrains nus. Ces neuf parcelles ont été cédées en six lots entre le 18 novembre 2012 et le 30 juillet 2014.

Considérant de principe : « Il résulte de ces dernières dispositions [article 268 du CGI], lues à la lumière de celles de la directive [article 392 de la directive TVA] dont elles ont pour objet d’assurer la transposition, que les règles de calcul dérogatoires de la taxe sur la valeur ajoutée qu’elles prévoient s’appliquent aux opérations de cession de terrains à bâtir qui ont été acquis en vue de leur revente et ne s’appliquent donc pas à une cession de terrains à bâtir qui, lors de leur acquisition, avaient le caractère d’un terrain bâti. »

Immoxine : la cour administrative d’appel a commis une erreur de droit […] en jugeant sans incidence sur sa mise en œuvre la circonstance que les caractéristiques physiques et la qualification du bien en cause aient été modifiées entre son acquisition et sa vente.

RGMB : la cour administrative d’appel a commis une erreur de droit […] en jugeant que ne faisait pas obstacle à la mise en œuvre de ce régime la circonstance que les biens cédés comme terrains à bâtir n’avaient pas été acquis comme tels.

Dispositif : annulation et renvoi

Remarque concernant RGMB : la solution rendue dans la décision RGMB nous pose problème car selon nous, ce n’est pas la parcelle qui fait la qualification TVA mais les critères de qualification du TAB ou du bâtiment. En effet, dans cette affaire, un bâtiment « contamine » huit TAB. Lorsque nous avons à l’esprit la définition très large du bâtiment au regard de la TVA (BOI-TVA-IMM-10-10-10-20-20140929 point 30 : « construction incorporée au sol », […], ce qui inclut notamment les routes, voies ferrées, ponts, tunnels, digues, barrages, pylônes, lignes électriques, conduites d’eau ou de gaz, parcs de stationnement, murs de clôture, constructions industrielles diverses, etc. »), cela conduit à considérer, a contrario, comme immeuble bâti une parcelle comprenant un grand terrain qui supporterait une petite construction incorporée au sol, en état d’être utilisée (voir à cet égard nos commentaires sous l’arrêt J2D Invest).

Nota du 3 mars 2021 : suite de la décision RGMB : CAA de Marseille, 3ème ch., 18/02/2021, 20MA02162, Inédit au recueil Lebon

– « Il résulte de l’instruction que les terrains à bâtir cédés par la SARL RGMB faisaient partie, au moment de leur acquisition, d’une seule et même unité foncière supportant une maison d’habitation. Ces terrains avaient donc, au moment de leur acquisition, la qualité d’immeuble bâti et non de terrain à bâtir. » (à comparer avec les arrêts rendus par la CAA de Nantes)

– « qu’alors même qu’elle a acquis un bien immobilier en vue de sa revente, la SARL RGMB n’est pas fondée à soutenir qu’est sans incidence sur la mise en oeuvre [de la TVA sur marge], la circonstance que la qualification juridique du bien en cause a été modifiée entre son acquisition et sa vente. »

– la SARL RGMB a enfin soutenu que l’état de la maison d’habitation était tel qu’elle devait être assimilée à un TAB au regard des règles de TVA. Réponse de la CAA de Marseille : « les éléments produits, en particulier les documents photographiques et procès-verbal de constat d’huissier en date du 20 septembre 2012, font état de fissures mais n’établissent pas l’état de délabrement allégué de la maison implantée sur le terrain d’assiette en litige, la rendant impropre à un quelconque usage, permettant d’assimiler le terrain à un terrain à bâtir.«