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14
Avr

TVA – crise du logement

A noter le dépôt le 11 avril 2024 d’une proposition de loi portant mesures d’urgence visant à faire face à la crise du logement à l’Assemblée nationale.

L’article 8 de ce texte propose d’ouvrir aux investisseurs individuels le taux de TVA de 10 % pour la construction de logements intermédiaires (modification de l’article 279-0 bis A du CGI pour ajouter les personnes physiques aux personnes morales comme destinataires des livraisons de logements).

A noter également le rapport à venir le 30 avril prochain de la Mission d’information relative à la crise du logement au Sénat, dont nous recommandons fortement le visionnage des différentes auditions.

A suivre, par ailleurs, la question écrite déposée par Romain Daubié (question N° 15559). Pour mémoire, Romain Daubié est l’auteur de la proposition de loi visant à faciliter la transformation des bureaux en logements qui a été adoptée en première lecture le 7 mars 2024 par l’Assemblée nationale et dont l’étude par le Sénat devrait commencer le 7 mai. Cette proposition de loi prévoirait notamment, la soumission à la taxe d’aménagement, sur décision des collectivités locales, des opérations de transformation des bureaux en logement (art. 2 et 3) et exonérerait de la taxe annuelle bureau les « locaux à usage de bureaux qui font l’objet d’un projet de transformation en logements ayant fait l’objet d’un dépôt de permis de construire au cours de l’année précédant la déclaration de la taxe » (art. 3 bis A (nouveau)).

Enfin, le projet de loi concernant le logement devrait, quant à lui, être déposé au Sénat le 17 juin prochain.

 

 

 

9
Avr

TVA – TVA sur marge – importance de la rédaction de la clause désignation

Le Conseil d’Etat vient de rendre un arrêt important, même s’il est étonnamment classé « Inédit au recueil Lebon », concernant le régime de la TVA sur marge (Conseil d’État, 10ème – 9ème chambres réunies, 02/04/2024, 466644, Inédit au recueil Lebon).

Le régime de la TVA sur marge, prévu de manière optionnelle par l’article 392 de la Directive TVA 2006/112/CE, que la France est la seule à avoir choisi de transposer, a été la source d’un contentieux fourni qui a historiquement trouvé sa source dans des opérations de détachement de parcelles (i.e. achat d’une maison et de son jardin pour revendre séparément la maison et un ou plusieurs terrains à bâtir) et qui a trouvé son « apothéose » dans un contentieux issu du régime applicable avant la réforme de la TVA immobilière opéré par la loi de finances rectificative pour 2010 (loi n°2010-237 du 9 mars 2010).

Après de nombreux arrêts du Conseil d’Etat et un arrêt et une ordonnance de la cour de justice de l’union européenne, nous savons que la TVA sur marge, telle que nous la connaissons aujourd’hui, vit ses derniers jours en attendant le nouveau BOFIP qui viendra sonner l’hallali, et qu’elle ne survit aujourd’hui que grâce aux soins palliatifs apportés par la réponse ministérielle Grau N° 42486 (JO AN du 1er février 2022) qui permet, sous certaines conditions, de continuer d’appliquer le régime tel qu’il avait été initialement conçu par l’administration fiscale, sous réserve des retouches successives et parfois contraires apportées par différentes réponses ministérielles.

Compte tenu de ce diagnostic vital engagé, on pourrait s’interroger sur la motivation qui nous conduit au commentaire de cet énième arrêt du Conseil d’Etat.

La raison est simple. Nous pensons que ce nouvel arrêt précise les critères de qualification du bien vendu au regard de la TVA et par conséquent le régime de TVA applicable à la vente de ce bien.

Ainsi, lorsqu’un bien est composé d’un bâti et de plusieurs parcelles, ce nouvel arrêt permet de répondre à la question de savoir si le vendeur vend un bâti et un ou plusieurs terrains (qui peuvent, selon leur classification au PLU, être ou non à bâtir – article 257, I-2-1° du CGI) ou seulement un bâti et son terrain d’assiette sis sur plusieurs parcelles qui suivent dès lors le régime TVA du bâti.

Nous reprendrons les conclusions de la rapporteure publique Esther de Moustier (dont nous recommandons la lecture) comme fil d’ariane.

Les faits

« la société Echo 5, qui exerce une activité de marchand de biens, a acquis en 2011 à Reyrieux (Ain) un bien immobilier comprenant des constructions et composé de plusieurs parcelles. En 2014, elle a revendu quatre terrains à bâtir issus de divisions de cette propriété. Elle a placé ces cessions, pour leur assujettissement à la taxe sur la valeur ajoutée, sous le régime de la marge prévu par l’article 268 du code général des impôts. A la suite d’une vérification de comptabilité, l’administration, estimant que ces terrains n’avaient pas été acquis par l’intéressée en qualité de terrains à bâtir, a remis en cause l’application de ce régime et a mis à la charge de la société des rappels de taxe sur la valeur ajoutée.  »

On comprend donc que certaines parcelles revendues trouvent leur origine dans des parcelles sur lesquelles ne se trouvait aucune construction lors de leur achat (ce qui est confirmé par le point 5. de l’arrêt).

Rappelons dès à présent les règles posées par la CJUE (CJUE 30 septembre 2021, C-299/20, Icade Promotion SAS et CJUE 10 février 2022, C-191/21, Les Anges d’Eux SARL, Echo 5 SARL, Cletimmo SAS)

– Point qui nous intéresse particulièrement dans le cadre de cet article : Le régime de marge requiert une condition d’identité « juridique » qui repose sur la comparaison de la qualification TVA de ce qui est acheté avec ce qui est revendu. Il faut donc acheter et revendre un terrain à bâtir si on veut appliquer la TVA sur marge sur la revente de ce terrain à bâtir.

– Le régime de marge ne requiert pas de condition d’identité « physique ». le découpage physique du terrain n’a pas de conséquence.

– Un terrain à bâtir qui fait l’objet de travaux de raccordement aux réseaux demeurent un terrain à bâtir et ne devient pas un bâtiment.

– Point qui marque la fin prochaine de la TVA sur marge telle que nous la connaissons et dont nous reparlerons pas dans cet article : La TVA sur marge s’applique soit lorsque l’acquisition des biens a été soumise à la TVA, sans que l’assujetti qui les revend ait eu le droit de déduire cette taxe, soit lorsque leur acquisition n’a pas été soumise à la TVA alors que le prix auquel l’assujetti-revendeur a acquis ces biens incorpore un montant de TVA qui a été acquitté en amont par le vendeur initial. En dehors de ces deux hypothèses, la TVA sur marge ne s’applique pas aux opérations portant sur des biens dont l’acquisition initiale n’a pas été soumise à la TVA, soit qu’elle se trouve en dehors de son champ d’application, soit qu’elle s’en trouve exonérée.

Concernant le premier point de la condition d’identité « juridique », la CJUE rappelle que : « il incombe à la juridiction de renvoi de vérifier, en tenant compte des définitions prévues par la législation nationale et de toutes les circonstances dans lesquelles se sont déroulées les opérations en cause au principal, si les biens acquis par les défenderesses au principal relèvent de la notion de « terrain à bâtir », au sens de l’article 12, paragraphe 3, de la directive TVA, et, ainsi, du champ d’application de l’article 392 de cette directive » (§ 29 de l’arrêt CJUE 10 février 2022, C-191/21, Les Anges d’Eux SARL, Echo 5 SARL, Cletimmo SAS).

A cet égard, la rapporteure publique rappelle les divergences d’interprétation entre les juges du fond, que nous avons déjà indiquées dans plusieurs articles. Certains juges retiennent en effet une analyse fondée sur les parcelles cadastrales sans tenir compte de la clause désignation de l’acte d’acquisition. D’autres, en revanche, recourent à la notion d’unité foncière « pour retenir, en substance, qu’une parcelle ne revêtait pas, à la date de son acquisition, le caractère de « terrain à bâtir » lorsque cette parcelle avait été acquise dans une unité foncière ou un ensemble immobilier contenant une autre parcelle sur laquelle était située un immeuble bâti, ajoutant qu’il en allait ainsi quand bien même cet ensemble avait fait l’objet, avant sa revente, d’une division parcellaire et que la parcelle revendue ne comportait pas, lors de son acquisition, d’immeuble bâti« . La CAA de Nantes s’est notamment illustrée sur une telle approche (voir notre article).

Interprétation du Conseil d’Etat 

Sur le sujet, nous avions en dernier lieu en tête un arrêt BH concept, dont la lecture n’était pas évidente mais qui laissait à penser que la parcelle avait une importance cruciale (CE 11/10/2022, 8e et 3e ch., n° 46456, BH Concept, « Mentionné dans les tables du recueil Lebon »). Ainsi, pour être considéré comme terrain (le cas échéant, à bâtir), il convenait de vérifier que le terrain était matérialisé, avant son acquisition, par une parcelle distincte sur laquelle aucun bâti n’était pas présent.

A la lecture de cet arrêt, il n’était toutefois pas totalement clair si la manière dont le terrain était désigné dans l’acte d’acquisition avait ou non une importance pour la qualification de ce bien au regard de la TVA.

L’arrêt du 2 avril 2024, rendue dans l’affaire Echo 5, apporte les précisions suivantes.

Point 4 : « Il résulte également des dispositions de l’article 268 du code général des impôts, lues à la lumière de celles de la directive du 28 novembre 2006 dont elles ont pour objet d’assurer la transposition, que les règles de calcul dérogatoires de la taxe sur la valeur ajoutée qu’elles prévoient s’appliquent aux opérations de cession de terrains à bâtir qui ont été acquis en vue de leur revente et ne s’appliquent donc pas à une cession de terrains à bâtir qui, lors de leur acquisition, avaient le caractère d’un terrain bâti, notamment quand le bâtiment qui y était édifié a fait l’objet d’une démolition de la part de l’acheteur-revendeur ou quand le bien acquis a fait l’objet d’une division parcellaire en vue d’en céder séparément des parties ne constituant pas le terrain d’assiette du bâtiment ou encore quand les parcelles, quoique ayant déjà fait l’objet d’une autorisation de division, ou d’une division effective, lors de l’acquisition, avaient, au regard des indications figurant dans l’acte de vente, été vendues non comme terrain à bâtir, mais comme terrain bâti, ensemble avec la parcelle sur laquelle était édifié un bâtiment. »

Autrement dit, la désignation des biens à l’acte emporte tout et notamment les parcelles, et la nature objective du terrain à bâtir puisque la subjectivité de la clause « désignation » demeure dorénavant le principe.

A la lecture des conclusions, nous comprenons pourtant qu’il convient de « raisonner parcelle par parcelle pour apprécier l’identité de qualification juridique entre le bien acquis et le bien cédé, et de ne pas s’arrêter à l’unité foncière objet de l’acte d’acquisition, du moins au sens du droit de l’urbanisme c’est-à-dire, à l’ « îlot de propriété d’un seul tenant, composé d’une parcelle ou d’un ensemble de parcelles appartenant à un même propriétaire ou à la même indivision » (CE, 1/6 SSR, 27 juin 2005, Commune de Chambéry, n°264667, B – Rec. T. pp. 1070-1072-1134-1146)« .

Partant, il y a donc lieu de ne pas s’en tenir au caractère constructible des parcelles acquises nues, mais de rechercher si celles-ci ont été acquises en vue d’être cédées en qualité de terrain à bâtir, c’est-à-dire en vue de l’édification de constructions et non en qualité de terrains d’agrément de la construction existante. Et, selon la rapporteure publique, les commentaires publiés au BOFIP iraient dans le même sens (BOI-TVA-IMM-10-10-10-40 § 10 sans pour autant relever le « en règle générale » ni les commentaires contradictoires au § 20)  (page 4 des conclusions).

Toujours selon la rapporteure publique : « Cette recherche de l’intention de l’acquéreur-revendeur est inhérente au régime de la TVA sur marge qui ne concerne que les terrains à bâtir achetés en vue de leur revente » , tout en reconnaissant que les implications de cette remarque dépassent les considérations spécifiques à ce régime dérogatoire puisqu’elle reconnaît que : « l’identification de la destination des parcelles dans l’acte de vente n’est pas sans conséquence sur le régime de TVA applicable à leur acquisition, seuls les terrains bâtis et non bâtis étant, à la différence des terrains à bâtir, exonérés de TVA.  »

Pour conclure : « Le ministre est donc fondé à soutenir qu’en l’espèce, la Cour a commis une erreur de droit en se fondant, pour qualifier les parcelles objet de l’opération litigieuse de terrains à bâtir au moment de leur acquisition, sur les seules possibilités réglementaires de construction prévues par le règlement du PLU alors applicable à ces parcelles et en écartant la circonstance que l’acte de vente ne visait qu’une propriété bâtie sans faire explicitement état de la vente de terrains à bâtir. »

En pratique, nous avons tendance à croire que :

– pour qualifier de TAB, il convient d’avoir une parcelle distincte (même si l’arrêt n’est pas totalement clair sur le sujet) ET d’en tirer les conséquences dans la clause désignation qui doit viser plusieurs immeubles, dont le terrain à bâtir.

– autrement, la présence du bâti, désigné comme un bien unique à l’acte, contaminera les différentes parcelles, y compris celles sur lesquelles aucune construction n’est présente au jour de leur mutation.

Ceci revient à accorder une importance particulière à l’intention des parties et à laisser de côté le principe du caractère objectif du terrain à bâtir tel que souhaité par le législateur lors de la réforme de la TVA immobilière.

La bonne nouvelle est que ceux qui avaient oublié d’identifier un terrain à bâtir dans leur désignation, et de le taxer, seront tranquillisés.

Pour les autres qui ont oublié de le viser dans la désignation alors qu’ils souhaitaient distinguer plusieurs immeubles, ce sera, en revanche, plus délicat. 

Dorénavant (la jurisprudence est cependant, par nature, rétroactive), il conviendra donc de prêter une attention particulière (i) aux parcelles, (ii) à la clause fiscale et (iii) à la désignation à l’acte. Dont acte !

24
Mar

DMTO – engagement de revendre – opérations de découpe – délai spécial de 2 ans

L’acquisition d’un immeuble achevé depuis plus de cinq ans est, en principe, soumise aux droits de mutation à titre onéreux au taux plein (i.e. en principe 5,80665% sauf dans certains départements, voir l’espace DMTO, auxquels s’ajoutent classiquement les émoluments du notaire et la CSI de 0,10% (ancien salaire du conservateur), et enfin, s’agissant des locaux à usage de bureaux, de locaux commerciaux et de locaux de stockage situés en Ile-de-France une taxe additionnelle de 0,6% prévue à l’article 1599 sexies du CGI, le tout formant les « frais de notaire » ).

Lorsque l’acquisition est effectuée par un assujetti à la TVA, celui-ci peut notamment prendre un engagement de revendre afin de « réduire » les droits de mutation à titre onéreux à 0,71498% (auxquels s’ajoutent toujours les émoluments du notaire et la CSI).

En principe, l’acquéreur assujetti doit avoir revendu l’immeuble dans les cinq ans de son acquisition (attention au cas particulier dans lequel le vendeur précédent a également pris un engagement de revendre puisque, dans ce cas, le délai du vendeur précédent s’impose à l’acquéreur ainsi qu’il ressort du deuxième alinéa de l’article 1115 du CGI).

Contrairement à ce qui est indiqué, par erreur, dans de nombreuses matrices d’actes, l’engagement de revendre n’est pas prorogeable. La seule exception concerne l’aménageur de ZAC (article 1594-0 G, A-IV bis du CGI).

Une autre exception, temporelle, concerne les engagements de revendre qui ont couru pendant le premier confinement, puisqu’ils bénéficient, dans le meilleur des cas, d’une prorogation automatique de 104 jours (voir nos articles).

A noter enfin que, malgré la crise qui frappe actuellement le marché de l’immobilier, le législateur n’a pas (encore) prévu une prorogation automatique du délai de l’engagement de revendre, comme cela avait été fait pour les biens acquis avant le 1er janvier 1993 jusqu’au 31 décembre 1998 (article 66 de la loi de finances rectificative pour 1992 (92-1476 du 31 décembre 1992) puis article 17 de la loi de finances rectificative pour 1995 (95-1347 du 30 décembre 1995)) (pour mémoire, voir également la réponse LACHAUD JO AN 2 novembre 2004, N° 45133)

En ce qui concerne les opérations de découpe, les opérations portant sur des locaux de bureaux ou des locaux commerciaux ne dérogent pas à ce qui vient d’être rappelé.

En revanche, les opérations portant sur des locaux d’habitation sont pénalisées. Le délai de cinq ans est en effet ramené à deux ans.

Ainsi, l’article 1115 du CGI dispose que : « Pour les reventes consistant en des ventes par lots déclenchant le droit de préemption prévu à l’article 10 de la loi n° 75-1351 du 31 décembre 1975 relative à la protection des occupants de locaux à usage d’habitation ou celui prévu à l’article 15 de la loi n° 89-462 du 6 juillet 1989 tendant à améliorer les rapports locatifs et portant modification de la loi n° 86-1290 du 23 décembre 1986, le délai prévu pour l’application de l’engagement de revendre visé au premier alinéa est ramené à deux ans. »

Dans un arrêt remarqué du 7 juillet 2015, la Cour de cassation avait retenu une approche libérale de laquelle il résultait qu’il fallait que le lot soit revendu occupé pour que le délai de 2 ans s’applique. Ainsi, la situation de l’immeuble lors de l’acquisition n’était pas prise en considération (Com. 7 juillet 2015, pourvoi n° 13-23.366 Bull. 2015, IV, n° 51) (voir notre article sur le sujet).

Pour mémoire un extrait de cet arrêt : « l’arrêt [attaqué] retient que ni le fait de se placer sous le régime de l’article 1115 du code général des impôts, ni la division de l’immeuble par lots n’ont déclenché en eux-mêmes le droit de préemption des locataires qui occupaient les appartements au moment de l’acquisition de l’immeuble par la société ; qu’ayant constaté que les reventes litigieuses avaient porté sur des lots alors libres de toute occupation, la cour d’appel en a exactement déduit que le délai applicable était celui de quatre ans [délai applicable à l’époque des faits] »

Dans un arrêt du 14 février 2024, la Cour de cassation est venue nuancer cette approche favorable. Ainsi, même si les lots sont finalement revendus inoccupés, le délai de deux ans demeure applicable lorsque le droit de préemption des locataires a été déclenché par la notification des offres de vente après division de l’ensemble en lots de copropriété. Dans cette hypothèse, le délai de 2 ans a comme point de départ, non pas la date de notification des offres, mais bien la date d’acquisition de l’immeuble destiné à une opération de découpe (Com. 14 février 2024, pourvoi n° 22-17.541 Publié au bulletin).

5
Jan

TVA – location de locaux nus – option rétroactive

Pour mémoire, la location de locaux nus est exonérée de la TVA (art. 261 D, 2° du CGI). L’article 260, 2° du CGI prévoit cependant une faculté d’option, sous certaines conditions. L’article 194 de l’annexe II au CGI précise enfin que :  » L’option ou sa dénonciation prend effet à compter du premier jour du mois au cours duquel elle est formulée auprès du service des impôts.  »

Dans une décision en date du 21 décembre 2023, n°474042, SAS François Perrino Holding, le Conseil d’Etat a tranché la question d’une option à la TVA exercée de manière rétroactive.

A cet égard, le Conseil d’Etat rappelle qu’il résulte des dispositions précitées que la validité d’une option formulée par le propriétaire de locaux qu’il destine à la location n’est assurée, et que, par suite, cette option ne peut emporter d’effets (i.e. le droit à déduction de la TVA) :
– qu’à compter du premier jour du mois au cours duquel l’option est formulée,
ou
– si la date est postérieure, de la date à laquelle sont souscrits, aux fins de location, immédiate ou future, de ces locaux, des engagements contractuels de nature à établir la conformité de l’opération aux articles ci-dessus rappelés.

Partant, le Conseil d’Etat a considéré qu’une option exercée le 15 décembre 2016 avec l’indication expresse d’un effet rétroactif au 1er janvier 2016, ne pouvait pas produire effet avant le 1er décembre 2016, au mieux.

« En statuant ainsi, sans rechercher à quelle date avaient été souscrits les engagements contractuels en vertu desquels elle a débuté son activité, le 1er janvier 2017, et alors que l’option exercée était en tout état de cause insusceptible, en vertu des règles rappelées au point 2, de produire des effets, au titre de l’exercice par la société de son droit à déduction, antérieurement au 1er décembre 2016, la cour a commis une erreur de droit »

Au final, pas de droit à déduction de la TVA grevant les dépenses exposées antérieurement à la date à laquelle l’option devient valide.

Remarque :

Traditionnellement, le Conseil d’Etat retient une position plus sévère que celle de l’administration fiscale pour déterminer la date de la validité de l’option. Celui-ci retient la date de souscription d’engagements contractuels (CE, 13 janvier 2006, S.C.I. Les Alizés, n° 253404) alors que le BOFIP (BOI-TVA-CHAMP-50-10 § 170) prévoit qu’il « est admis que dès lors qu’une option a été formulée en bonne et due forme par le bailleur, cette dernière produit ses effets sur les locaux nus à usage professionnel non effectivement donnés en location par le bailleur mais dont il peut être établi, par des éléments objectifs, qu’il les offre à la location » (exemple : un mandat de recherche de locataire en début d’activité).

Au cas particulier, la perte de la TVA déductible aurait pu être évitée avec une option exercée au bon moment alors même qu’aucun engagement contractuel n’aurait été souscrit.

Nota du 24/04/2024 : voir également sur le sujet CAA Lyon, 2e ch., 18 avr. 2024, n° 21LY03607