Résiliation anticipée d’un bail commercial – locataire – risques TVA
La CAA de Marseille (28 février 2017, n° 15MA01437, SARL PISTOU) vient de confirmer les deux redressements suivant effectués chez un locataire :
– Taxation à la TVA de l’indemnité reçue du bailleur dans la mesure où le locataire lui aurait rendu un service qui consisterait en la libération anticipée des locaux et la possibilité ainsi offerte au bailleur d’envisager une réaffectation économiquement plus viable des biens loués. Cette décision est dans le prolongement de l’arrêt CATLEYA du Conseil d’Etat. Nous avons toutefois relevé les pratiques contraires de certains services vérificateurs (voir notre article du 23 janvier dernier) ;
– Reversement d’une partie de la TVA précédemment déduite au titre des constructions sur sol d’autrui effectuées par le locataire. Alors même que l’immeuble en question est voué à disparaître à l’occasion de la réalisation d’une opération immobilière envisagée par le bailleur, la cour considère que le locataire doit, au titre des régularisations de TVA, reverser une partie de la TVA précédemment déduite.
Nota du 14/12/2020 : voir également sur le sujet CAA Bordeaux, 20 janvier 2020, 18BX02720, EURL LE PARADIS DE L’AUTO
« Il résulte de l’instruction qu’alors que la société bailleresse Joubal ne pouvait donner congé des lieux loués à la société Le Paradis de l’auto que le 30 novembre 2014, le protocole d’accord transactionnel daté du 9 décembre 2013 passé entre la société Le Paradis de l’auto et la SNC Vinci Immobilier Résidentiel prévoit un engagement de la société Le Paradis de l’Auto à quitter les locaux commerciaux au plus tard le 3 février 2014 en contrepartie d’une indemnité mise à la charge de la société Vinci Immobilier Résidentiel de 410 000 euros. L’anticipation de la date de congé a permis à la société Vinci Immobilier Résidentiel de disposer du terrain d’assiette lui permettant de réaliser dans un délai accéléré un programme immobilier. Par ailleurs, aux termes de l’acte d’acquisition des terrains appartenant à la société Joubal du 13 décembre 2013, cette société et la société Vinci Immobilier Résidentiel sont convenues des modalités de versement de l’indemnité d’éviction à la société Le Paradis de l’auto, à hauteur de 160 000 euros par la société Vinci Immobilier Résidentiel et de 250 000 euros par la société Joubal. En conséquence, le protocole d’accord transactionnel qui permet à la société Vinci Immobilier Résidentiel de disposer de la libre jouissance du local commercial pour une période couverte par le contrat initial de location rémunère un service individualisable fourni à la société Vinci par la société Le Paradis de l’auto à hauteur de 160 000 euros TTC.«
Location d’immeuble – Prix anormalement bas – droit à déduction de la TVA
La CAA de Bordeaux vient de rappeler que la location d’un immeuble consentie à un prix anormalement bas, constitue néanmoins une activité économique et ne prive pas le bailleur du droit à déduction de la TVA, lorsque cette location est taxée à la TVA.
Il n’en irait différemment que si l’opération devait être considérée comme une libéralité.
CAA Bordeaux 9 mars 2017, nº 15BX01014
Dans le même sens
CAA Nantes 19 octobre 2017, n° 16NT01751 SAS Le Domaine du Soleil Levant
Loyer – abandon de créance – conséquences TVA
Selon la CAA de Nancy (CAA de Nancy, 2 février 2017, N15NC01640, RetD Moteurs), un abandon de créances procède d’un acte de disposition qui s’analyse comme un encaissement suivi d’une libéralité envers le débiteur, ledit encaissement rendant exigible le montant de la TVA.
Un locataire qui avait bénéficié d’un abandon de créance de la part de son bailleur, avait considéré avoir droit à la déduction de la TVA correspondant aux loyers concernés par l’abandon.
La CAA de Nancy conteste le bien-fondé de cette analyse et rejette cette déduction au motif que la créance ne pouvait pas être considérée comme définitivement abandonnée, l’abandon de créance ayant été consenti sous réserve d’une clause de retour à meilleure fortune.
Le principe selon lequel l’abandon de créance déclencherait l’exigibilité de la TVA devra être confirmé dans la mesure où :
– de manière constante, le juge considère que l’assiette de la TVA est en principe constituée par la contrepartie réellement reçue (voir par exemple, l’affaire 330/95, Goldsmiths Ltd) ;
– s’agissant des livraisons de biens et des prestations de services (e.g. les loyers) pour lesquelles le prestataire a opté pour les débits, le conseil d’Etat a jugé que l’abandon de créance permet de mettre en œuvre la procédure des impayés de l’article 272, 1 du CGI afin de récupérer la TVA initialement versée à l’administration fiscale ;
– le législateur fait en sorte que les opérations sur les créances ne déclenchent pas l’exigibilité de la TVA due au titre de l’opération sous-jacente (voir en dernier lieu la modification de l’article 269, 2-c) du CGI afin de neutraliser les transmissions de créances).
Ancien régime – TVA sur marge – terrains à bâtir
Le conseil d’État vient de valider une nouvelle fois l’application du régime de TVA sur marge aux cessions de terrain à bâtir effectuées, avant le 11 mars 2010, par des marchands de biens ou des lotisseurs, à des personnes physiques en vue de la construction d’immeubles que ces personnes affectaient à un usage d’habitation.