Vendeur étranger non établi en France – qui doit la TVA sur la vente d’un immeuble de bureaux ?
La question n’est pas fréquente pour deux raisons : (i) de nombreuses ventes ne donnent pas lieu au paiement de la TVA en raison de l’application de la dispense prévue par l’article 257 bis du CGI et (ii) les vendeurs étrangers non établis ne sont pas légions car, bien souvent, l’immeuble est détenu par une société française.
En principe, lorsqu’une vente est soumise à la TVA, de plein droit ou sur option, le redevable de la taxe est le vendeur. L’acheteur doit donc un prix incluant la TVA . Le vendeur reverse cette TVA à l’administration fiscale via sa déclaration de chiffre d’affaires. De son côté, s’il en a le droit, l’acquéreur récupère via sa propre déclaration la TVA versée au vendeur.
Ce principe supporte toutefois une exception notable. Lorsque le vendeur n’est pas établi en France au sens de la TVA, ou lorsque son établissement ne participe pas à la réalisation de la vente, le redevable de la TVA est l’acheteur assujetti s’il dispose d’un numéro de TVA français.
Il s’agit d’un cas d’autoliquidation non pas lié à la nature de l’opération (comme celui qui vient d’être mis en place dans le secteur du bâtiment) mais à la qualité des parties.
Dans ce cas, l’acquéreur ne verse au vendeur qu’un prix hors TVA. Celui-ci effectue un jeu d’écritures spécifique sur sa déclaration de chiffre d’affaires mais ne dépose aucune demande de remboursement de crédit de TVA. Ce cas d’autoliquidation est donc a priori une bonne nouvelle.
Point important. Lorsque le vendeur étranger est immatriculé à la TVA française à raison des loyers qu’il facture (i.e. en cas d’option), cette seule immatriculation ne constitue pas un établissement stable au sens de la TVA et le mécanisme d’autoliquidation est donc applicable.
Remboursement de la TVA à des personnes non établies en France – location à l’exploitant d’un établissement d’hébergement
L’administration fiscale vient de modifier ses commentaires BOFIP concernant la situation particulière des personnes qui remplissent les conditions cumulatives suivantes :
– absence d’établissement en France,
– absence d’assujettissement à la TVA dans leur pays d’établissement,
– réalisation d’une activité locative en France soumise de plein droit à la TVA à raison de la location d’un local à l’exploitant d’un établissement d’hébergement lui-même soumis à la TVA,
– auto-liquidation de la TVA due au titre des loyers par le preneur assujetti et identifié la TVA française.
Cette situation particulière se rencontre notamment lorsqu’une personne étrangère donne en location un local à l’exploitant d’une résidence de tourisme classée ou à l’exploitant d’une résidence hôtelière.
Dans la mesure où ces personnes ne réalisent pas dans leur état d’établissement une activité soumise à TVA, l’administration fiscale prévoit que le remboursement de la TVA grevant l’acquisition de l’immeuble ou des travaux se fasse via une procédure française spécifique et non par le remboursement 8e ou 13e directive.
Les commentaires précédents limitaient le bénéfice de cette procédure spécifique aux seuls loueurs en meublé. Cette rédaction ayant soulevé des difficultés d’application, les nouveaux commentaires visent désormais toutes les personnes qui donnent en location des locaux nus, meublés ou garnis.
A notre sens, il ne s’agit donc que d’une modification formelle.
À ce stade, seuls les commentaires concernant les personnes établies hors de l’Union européenne ont été modifiés (BOI-TVA-DED-50-20-30-40 § 40).
Toutefois, selon nos informations, les commentaires concernant les personnes établies dans l’Union européenne devraient rapidement faire l’objet d’une modification similaire.
Nota du 5 mars 2013 : ce point a été corrigé le 4 mars 2013 au § 120 du BOI-TVA-DED-50-20-30-10
Bailleurs étrangers – locaux nus situés en France – preneur identifié à la TVA en France – régime de TVA applicable au loyer
L’article 283, 1 du code général des impôts pose le principe suivant : lorsqu’une prestation de service est effectuée par un assujetti non établi en France, la TVA due au titre de cette prestation est due par le preneur du service s’il dispose d’un numéro de TVA français. Le prestataire émet donc une facture hors taxe et le preneur reporte la TVA due et l’éventuelle TVA déductible sur sa déclaration de chiffre d’affaires. En revanche, lorsque le preneur n’est pas identifié à la TVA française, la TVA due au titre de l’opération demeure due par le prestataire. Celui-ci émet alors une facture mentionnant de la TVA dans les conditions habituelles.
Le mécanisme qui est décrit dans la première hypothèse porte, en pratique, plusieurs noms : « auto-liquidation », « inversion du redevable » ou encore « reverse-charge ».
Pour une parfaite compréhension, rappelons que l’objectif de ce mécanisme, qui a été institué au 1er septembre 2006, est de lutter contre la fraude (i.e. TVA facturée mais non reversée à l’Etat français par le prestataire étranger).
Dans le secteur de l’immobilier, l’application du mécanisme de l’auto-liquidation a soulevé des questions.
En effet, dans la mesure où le texte de l’article 283, 1 ne contient aucune exception au mécanisme de l’auto-liquidation en faveur des locations, certains se sont inquiétés du régime à appliquer lorsqu’une location est soumise à la TVA sur option expresse exercée par un bailleur étranger (i.e. facturation sans TVA dans le cadre de l’«auto-liquidation » versus facturation avec TVA).
Une réponse ministérielle Masson publiée le 17 janvier 2013 rappelle que le mécanisme de l’auto-liquidation est inapplicable lorsque la location est soumise à la TVA sur option (Nota du 01/12/2020 : en application de l’article 260, 2° ou 6°). Pour mémoire, cette solution ressort par ailleurs du § 30 du BOI-TVA-DECLA-10-10-20-20120912.
Le bailleur qui applique cette doctrine administrative pourra donc valablement facturer la TVA sur les loyers (i.e. aucune TVA facturée à tort pour le locataire) et récupérer la TVA grevant ses dépenses et notamment celle grevant l’acquisition de l’immeuble selon les règles prévues en faveur des bailleurs français. Ces règles sont en effet plus simples que celles prévues en faveur des assujettis à la TVA non établis en France (i.e. procédures spéciales dites « 8ème directive » pour les assujettis établis dans l’Union européenne et « 13ème directive » pour les assujettis non établis dans l’Union européenne).
A noter enfin que ces précisions ne concernent ni les ventes d’immeubles ni les locations qui sont soumises à la TVA sur un autre fondement que l’option prévue au 2° ou au 6° de l’article 260 (Nota du 01/12/2020), qui continuent, quant à elles, à relever du droit commun, c’est-à-dire de l’auto-liquidation.
Ainsi, la vente d’un immeuble, si elle ne bénéficie pas de la dispense de TVA, peut donc bénéficier du mécanisme d’auto-liquation dans les conditions de droit commun même si la TVA est due sur option exercée par le vendeur (i.e. vente du bien au locataire identifié à la TVA par un bailleur non établi pour les besoins de la TVA).
S’agissant des locations, nous penserons notamment aux locations consenties aux exploitants hôteliers ou aux EHPAD pour lesquelles le mécanisme de l’auto-liquidation n’est applicable que pour la partie du loyer correspondant aux locaux destinés à l’hébergement. En revanche, s’agissant des autres locaux, tels que le restaurant, la TVA sera due sur option. Le mécanisme de l’auto-liquidation, tel qu’il résulte de la doctrine administrative rappelée ci-dessus, ne concernera donc qu’une partie du loyer.