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14
Avr

257 bis du CGI – dispense de TVA – droit d’entrée

 

Dans une affaire particulière, la CAA de Versailles vient de juger l’application de la dispense de TVA prévue par l’article 257 bis du CGI au versement d’un droit d’entrée (CAA de Versailles 23 mars 2017, n° 16VE00747, SARL LAND RIVER). Dans la mesure où la dispense de TVA présente un caractère obligatoire, la TVA facturée par le bailleur a été considérée comme facturée à tort. L’administration fiscale a donc rejeté la déduction de cette TVA chez le locataire.

L’administration fiscale et la CAA de Versailles ont ainsi refusé la qualification de compléments de loyers et ont considéré qu’il y avait cession d’une partie autonome d’une entreprise au sens des dispositions TVA.

La délimitation des frontières de la dispense de TVA est une tâche difficile.

La jurisprudence communautaire nous incite à retenir une interprétation large de ce mécanisme (voir notamment CJUE 10 novembre 2011, C-444/10, SCHRIEVER). Notre culture française tend toutefois à limiter son application à des hypothèses classiques de transmission d’entreprises (voir les commentaires du BOFIP). Cette conception stricte a déjà soulevé des difficultés lorsque l’on a découvert que la dispense devait également être appliquée, en matière immobilière, lors de la vente d’un immeuble accompagnée du transfert d’un bail. Cette découverte n’a cependant toujours pas été « digérée » dans la mesure où plus de 10 ans après cette reconnaissance, les opérateurs attendent encore des commentaires officiels qui viendraient préciser les cas d’application et de non application. Ces commentaires officiels permettraient d’éviter que la dispense de TVA ne se transforme en « machine à redressements » , comme au cas particulier, et demeure cantonnée à ses buts premiers, à savoir : simplification administrative et préservation de la trésorerie des entreprises.

Pour mémoire, les faits de l’affaire étaient les suivants :

– Aux termes du bail :  le bailleur met à la disposition du preneur un local dans un centre bénéficiant d’une attractivité commerciale préexistante. En conséquence le preneur est redevable envers le bailleur d’un droit d’entrée d’un montant unique et forfaitaire de 600 000 Euros HT. […]  Ce droit d’entrée restera définitivement acquis au bailleur, dès la prise d’effet du bail, en contrepartie des avantages de la propriété commerciale conférée au preneur […]
– Le locataire a porté en immobilisation à son bilan l’acquisition d’un fonds de commerce pour un montant de 600 000 euros, ce chiffre étant porté au tableau n°2050 à l’actif du bilan et au tableau n°2054 des immobilisations
– Le locataire ne s’est pas prévalu pas d’une erreur comptable

« Cette décision devra être confirmée »

Nota : annulation par CE 3e et 8e ch. réunies, 15 février 2019, n° 410796 « Mentionné aux tables du recueil Lebon »

Taxation à la TVA si le loyer est soumis à la TVA : « Le droit d’entrée dû lors de la conclusion d’un bail commercial doit, en principe, être regardé comme un supplément de loyer qui constitue, avec le loyer lui-même, la contrepartie d’une opération unique de location, et qui est soumis à la taxe sur la valeur ajoutée au même titre que celui-ci, et non comme une indemnité destinée à dédommager le bailleur d’un préjudice résultant de la dépréciation de son patrimoine. La seule circonstance que le bail commercial se traduise, pour le preneur, par la création d’un élément d’actif nouveau, compte tenu du droit au renouvellement du bail que celui-ci acquiert, ne suffit pas pour caractériser une telle dépréciation. »

Pas de 257 bis : « Il résulte de l’interprétation que la Cour de justice de l’Union européenne a donnée du premier alinéa de l’article 19 de la directive 2006/112/CE dans son arrêt du 19 décembre 2018, Mailat e.a. (C-17/18), que la notion de  » transmission, à titre onéreux ou à titre gratuit ou sous forme d’apport à une société, d’une universalité totale ou partielle de biens  » ne couvre pas l’opération par laquelle un bien immeuble qui servait à une exploitation commerciale est donné en location. »

Concept d’ « opération unique de location » – voir aujourd’hui l’article 257 ter du CGI

27
Mar

Résiliation anticipée d’un bail commercial – locataire – risques TVA

 

La CAA de Marseille (28 février 2017, n° 15MA01437, SARL PISTOU) vient de confirmer les deux redressements suivant effectués chez un locataire :
– Taxation à la TVA de l’indemnité reçue du bailleur dans la mesure où le locataire lui aurait rendu un service qui consisterait en la libération anticipée des locaux et la possibilité ainsi offerte au bailleur d’envisager une réaffectation économiquement plus viable des biens loués. Cette décision est dans le prolongement de l’arrêt CATLEYA du Conseil d’Etat. Nous avons toutefois relevé les pratiques contraires de certains services vérificateurs (voir notre article du 23 janvier dernier) ;
– Reversement d’une partie de la TVA précédemment déduite au titre des constructions sur sol d’autrui effectuées par le locataire. Alors même que l’immeuble en question est voué à disparaître à l’occasion de la réalisation d’une opération immobilière envisagée par le bailleur, la cour considère que le locataire doit, au titre des régularisations de TVA, reverser une partie de la TVA précédemment déduite.

Nota du 14/12/2020 : voir également sur le sujet CAA Bordeaux, 20 janvier 2020, 18BX02720, EURL LE PARADIS DE L’AUTO

« Il résulte de l’instruction qu’alors que la société bailleresse Joubal ne pouvait donner congé des lieux loués à la société Le Paradis de l’auto que le 30 novembre 2014, le protocole d’accord transactionnel daté du 9 décembre 2013 passé entre la société Le Paradis de l’auto et la SNC Vinci Immobilier Résidentiel prévoit un engagement de la société Le Paradis de l’Auto à quitter les locaux commerciaux au plus tard le 3 février 2014 en contrepartie d’une indemnité mise à la charge de la société Vinci Immobilier Résidentiel de 410 000 euros. L’anticipation de la date de congé a permis à la société Vinci Immobilier Résidentiel de disposer du terrain d’assiette lui permettant de réaliser dans un délai accéléré un programme immobilier. Par ailleurs, aux termes de l’acte d’acquisition des terrains appartenant à la société Joubal du 13 décembre 2013, cette société et la société Vinci Immobilier Résidentiel sont convenues des modalités de versement de l’indemnité d’éviction à la société Le Paradis de l’auto, à hauteur de 160 000 euros par la société Vinci Immobilier Résidentiel et de 250 000 euros par la société Joubal. En conséquence, le protocole d’accord transactionnel qui permet à la société Vinci Immobilier Résidentiel de disposer de la libre jouissance du local commercial pour une période couverte par le contrat initial de location rémunère un service individualisable fourni à la société Vinci par la société Le Paradis de l’auto à hauteur de 160 000 euros TTC.« 

21
Mar

Location d’immeuble – Prix anormalement bas – droit à déduction de la TVA

 

La CAA de Bordeaux vient de rappeler que la location d’un immeuble consentie à un prix anormalement bas, constitue néanmoins une activité économique et ne prive pas le bailleur du droit à déduction de la TVA, lorsque cette location est taxée à la TVA.

Il n’en irait différemment que si l’opération devait être considérée comme une libéralité.

CAA Bordeaux 9 mars 2017, nº 15BX01014

Dans le même sens

CAA Nantes 19 octobre 2017, n° 16NT01751 SAS Le Domaine du Soleil Levant

 

 

14
Mar

Loyer – abandon de créance – conséquences TVA

 

Selon la CAA de Nancy (CAA de Nancy, 2 février 2017, N15NC01640, RetD Moteurs), un abandon de créances procède d’un acte de disposition qui s’analyse comme un encaissement suivi d’une libéralité envers le débiteur, ledit encaissement rendant exigible le montant de la TVA.

Un locataire qui avait bénéficié d’un abandon de créance de la part de son bailleur, avait considéré avoir droit à la déduction de la TVA correspondant aux loyers concernés par l’abandon.

La CAA de Nancy conteste le bien-fondé de cette analyse et rejette cette déduction au motif que la créance ne pouvait pas être considérée comme définitivement abandonnée, l’abandon de créance ayant été consenti sous réserve d’une clause de retour à meilleure fortune.

Le principe selon lequel l’abandon de créance déclencherait l’exigibilité de la TVA devra être confirmé dans la mesure où :
– de manière constante, le juge considère que l’assiette de la TVA est en principe constituée par la contrepartie réellement reçue (voir par exemple, l’affaire 330/95, Goldsmiths Ltd) ;
– s’agissant des livraisons de biens et des prestations de services (e.g. les loyers) pour lesquelles le prestataire a opté pour les débits, le conseil d’Etat a jugé que l’abandon de créance permet de mettre en œuvre la procédure des impayés de l’article 272, 1 du CGI afin de récupérer la TVA initialement versée à l’administration fiscale ;
– le législateur fait en sorte que les opérations sur les créances ne déclenchent pas l’exigibilité de la TVA due au titre de l’opération sous-jacente (voir en dernier lieu la modification de l’article 269, 2-c) du CGI afin de neutraliser les transmissions de créances).