Aller au contenu

Posts from the ‘TVA facturée à tort’ Category

15
Jan

TVA – TVA facturée à tort – nouveau BOFIP

En matière de TVA, il est important d’appliquer la TVA uniquement si elle est due, au bon taux et pour le bon montant. Autrement, la TVA est dite facturée à tort.

Une TVA facturée à tort, c’est un problème ; même si le destinataire de la facture est en principe 100% récupérateur de TVA.

En pratique, les situations dans lesquelles la TVA peut être facturée à tort, sont nombreuses :
– Facturer de la TVA (ou encore l’indiquer dans l’acte transactionnel) s’agissant d’une indemnité en réalité non soumise à la taxe (il est souvent bien difficile de savoir de manière certaine si une indemnité est ou non soumise à la taxe) ;
– Indiquer dans un acte notarié de vente d’immeuble de la TVA alors que l’opération relève de la dispense prévue à l’article 257 bis du CGI ;
– Facturer de la TVA sur une opération exonérée pour laquelle le fournisseur ou le prestataire a oublié d’opter (e.g. les ventes d’immeubles achevés depuis plus de cinq ans ou les baux de locaux professionnels nus ou tous types de prestations de services exonérées et taxables uniquement sur option) ;
– Appliquer la TVA à un taux supérieur à celui normalement applicable.

Une TVA facturée à tort déclenche l’application de trois règles visant à prévenir une perte de recette fiscale.

1. La TVA facturée à tort est due par celui qui l’a facturée.
2. La TVA facturée à tort n’est pas déductible par celui qui reçoit la facture même si celui-ci est récupérateur de taxe.
3. La TVA facturée à tort ne transforme pas une opération exonérée en opération taxée (ni pour la TVA ni pour la taxe sur les salaires).

La TVA qui est facturée à tort soulève donc à la fois des problèmes chez le client (le destinataire de la facture) et chez le fournisseur ou le prestataire (son émetteur).

En effet, nous l’avons vu à l’instant. Le destinataire de la facture, même récupérateur de taxe, ne peut pas déduire la TVA facturée à tort.

Il peut se voir refuser la déduction de la TVA lors du dépôt d’une demande de remboursement de crédit de TVA ou l’occasion d’un contrôle (même si la TVA a, dans un premier temps, fait l’objet d’un remboursement).

S’agissant de l’émetteur de la facture, celui-ci peut avoir des difficultés avec son client lorsque celui-ci se voit contester la déduction de la TVA ainsi facturée par l’administration fiscale.

L’administration fiscale peut également le redresser sur sa propre TVA déductible si elle considère que l’opération était en réalité exonérée et que, par conséquent, cette opération n’autorisait aucun droit à déduction. En effet, la TVA facturée à tort ne transforme pas une opération exonérée en opération taxable. De la même manière, des conséquences négatives peuvent également en découler en matière de taxe sur les salaires.

Au quotidien, nous sommes fréquemment confrontés à cette difficulté, a posteriori, à l’occasion d’un redressement ou, en amont, parce qu’il y a un doute sur le régime de TVA applicable à l’opération.

Dans ce dernier cas, si une demande de rescrit n’a pas pu être déposée ou obtenue, les parties doivent se préparer à gérer cette situation…

En pratique, si le risque a été décelé en amont, cela revient à décider, dans les cas les plus simples, si les parties préfèrent (i) ne pas facturer de la TVA et attendre un éventuellement redressement chez l’émetteur de la facture (en recourant le cas échéant au mécanisme de la mention expresse pour informer l’administration et éviter les intérêts de retard si la bonne foi de l’émetteur est reconnue) ou (ii) facturer de la TVA et attendre un redressement chez le destinataire de la facture.

A l’opposé, les réglages peuvent devenir beaucoup plus complexes lorsqu’il s’agit de définir un nouveau prix si l’opération est finalement exonérée.

Bien évidemment, à l’occasion de cette réflexion, les parties prendront en considération les garanties nécessaires à la régularisation de la situation initiale et la prise en charge des éventuelles pénalités et leur impact sur une éventuelle transmission au procureur de la république.

Ceci étant dit, si nous revenons à la base, il faut garder à l’esprit que celui qui a facturé à tort de la TVA peut, sous certaines conditions, régulariser la situation et en demander la restitution à l’administration fiscale si une difficulté survient. Rien n’est donc, en principe, définitivement figé.

Jusqu’à présent, la TVA facturée à tort soulevait une difficulté pratique lorsque le problème apparaissait au cours de la troisième année qui suivait celle de son versement à l’administration fiscale par l’émetteur de la facture

L’absence de commentaire de l’administration fiscale laissait à penser que la régularisation par l’émetteur de la facture n’était plus possible, même si le principe de neutralité de la TVA constamment rappelé par la jurisprudence permettait de croire que tout n’était pas perdu. Des rescrits non publiés confirmant la possibilité d’une telle régularisation pouvaient également circuler.

Bonne nouvelle.

L’administration fiscale vient d’apporter des précisions utiles pour gérer cette situation.

Celle-ci vient en effet d’indiquer que l’émetteur de la facture dispose d’un nouveau délai à compter du redressement du destinataire de la facture pour lancer la procédure de régularisation.

L’administration profite également de cette clarification pour préciser le régime applicable.

En ce qui concerne l’émetteur de la facture : l’administration rappelle que la régularisation de la TVA auprès de l’administration fiscale suppose l’émission préalable d’une facture rectificative adressée au destinataire de la facture, afin d’éliminer le risque de perte de recettes fiscales que peut engendrer le droit à déduction de la TVA.

Ainsi, en pratique, celui qui prévoirait la régularisation d’un acte rectificatif une fois que le vendeur d’un immeuble aurait obtenu la restitution de la TVA facturée à tort s’exposerait donc nécessairement à une fin de non-recevoir de l’administration fiscale.

Dans les nouveaux commentaires, la condition de bonne foi, qui était jusqu’à présent exigée dans tous les cas, n’est plus systématique. Celle-ci est dorénavant prévue uniquement dans le cas où le risque de perte fiscale n’est pas éliminé. L’administration se rallie ainsi à la jurisprudence (voir notamment CJUE 19-9-2000 aff. 454/98 plén., Schmeink & Cofreth AG & Co. KG et Manfred Strobel )

Les plus attentifs remarqueront que la procédure de régularisation est dorénavant prévue de manière générale et non plus seulement lorsque la taxe est facturée à tort au titre d’une opération non imposable, ou à un taux supérieur au taux légalement applicable.

Toujours en ce qui concerne l’émetteur de la facture, l’administration indique dorénavant dans le BOFIP le délai pour effectuer la régularisation (i.e. émission de la facture rectificative et demande de restitution). En principe (i.e. lorsque la régularisation est effectuée de manière spontanée), il s’agit du 31 décembre de la deuxième année qui suit celle du versement de la TVA à l’administration fiscale. Par exception (i.e. en cas de redressement du destinataire de la facture), il s’agit du 31 décembre de la deuxième année qui suit celle de la remise en cause par l’administration fiscale de la déduction de TVA chez le destinataire de la facture. Et c’est ici, la principale nouveauté résultant de la modification du BOFIP.

Tout n’est pas cependant pas devenu évident. Ainsi, la régularisation spontanée n’est pas possible à partir de N+3. Par ailleurs, le cas d’un recours en répétition de l’indu exercé par la destinataire de la facture, sans redressement préalable, à partir de N+3 n’est pas non plus visé (e.g. Cass. , 3ème Civ. , 12 septembre 2024, n° 23-11.661 s’agissant d’un bail commercial pour lequel le bailleur n’avait pas valablement opté).

On relèvera que l’administration fiscale prévoit l’émission systématique d’une facture rectificative. Le cas du destinataire d’une « facture » personne physique non assujettie à la TVA (i.e. un « particulier ») ne constitue pas officiellement une exception.

En revanche, selon nos informations, la position émise dans la réponse ministérielle non reprise au BOFIP (Rép. Collin : Sén. 4-11-2010 p. 2900 n° 14632) demeure valable. L’émission d’une facture rectificative n’est pas exigée dans cette hypothèse, ce que confirme par ailleurs la jurisprudence (CJUE 8-12-2022 aff. 378/21).

L’exigence d’une facture rectificative continue cependant d’être exigée lorsque le destinataire de la facture a été redressé au titre de la déduction d’une TVA facturée alors que l’absence de facture rectificative a été validée par la jurisprudence (CJUE 11-4-2013 aff. 138/12, 5e ch., Rusedespred OOD et CE 16-5-2011 n° 330153, 3e et 8e s.-s., Crédit Coopératif)

Point important. L’administration fiscale a supprimé les commentaires relatifs au montant de la facture rectificative. Jusqu’à présent, reprenant un ancien arrêt du Conseil d’Etat (CE 16 décembre 1987, n° 55629), il était indiqué que ne constituait pas une facture rectificative une facture qui reprenait le total initial (TTC) sans mentionner la TVA et qu’il était nécessaire de minorer le montant TTC de la TVA initialement mentionnée, ce qui conduisait à une aberration lorsque l’opération devenait exonérée par l’émetteur de la facture, le privant ainsi de la TVA déductible sur ses propres dépenses et lui faisant supporter une taxe sur les salaires supplémentaire. Des rescrits non publiés pouvaient cependant heureusement retenir une solution contraire.

Selon nos informations, cette suppression conduit à redonner la priorité à la liberté contractuelle. Le montant de la facture rectificative serait donc libre.

A noter à cet égard que ni le code général des impôts ni le BOFIP ne reprennent la condition de l’enrichissement sans cause qui pourrait être prévue à la lecture de la jurisprudence de la CJUE. Selon nos informations, cette condition ne serait donc pas exigée.

En ce qui concerne la procédure applicable, seul le recours à la déclaration de TVA est prévu. Pour mémoire, il ressort de la jurisprudence que ceux qui déposeraient une réclamation pour obtenir une validation expresse de l’administration ainsi que des intérêts moratoires verraient leur réclamation rejetée si la déclaration de TVA de l’époque faisait apparaître un crédit de TVA (voir notamment CE 27-7-2009 n° 297474).

En ce qui concerne le destinataire de la facture : l’administration fiscale rappelle que pour obtenir la restitution de la TVA qui lui a été facturée à tort, celui-ci doit prioritairement s’adresser à l’émetteur de la facture qui lancera alors la procédure de régularisation.

A titre subsidiaire, il peut cependant s’adresser directement à l’administration fiscale si l’obtention de la restitution de la taxe auprès de celui qui l’a facturée est impossible ou excessivement difficile.

Cette action directe subsidiaire a déjà été confirmée à plusieurs reprises par la jurisprudence (CJUE 15-3-2007 aff. 35/05 et CE 29-11-2023 n° 469111, Établissement français du sang). Il est donc appréciable que l’administration fiscale l’ait reprise dans ses commentaires.

A noter que la jurisprudence rappelle que l’administration peut, avant d’accorder la restitution demandée, vérifier que le risque de perte de recettes fiscales a été préalablement éliminé, notamment du fait que l’auteur de la facture erronée a reversé au trésor public la taxe indûment facturée. Le renvoi par le nouveau BOFIP à cette jurisprudence conduit à exiger cette condition.

En pratique, lorsqu’il y a un doute sur le régime de TVA appliqué dans une vente d’immeuble et que les parties décident finalement d’indiquer la TVA dans l’acte de vente au lieu d’un régime de dispense, il peut être utile de demander au vendeur de fournir à l’acquéreur la preuve du paiement de la TVA à l’administration fiscale afin de se ménager la possibilité d’introduire, le cas échéant, une telle action.

Consulter le nouveau BOFIP

Nous profitons de cet article pour souhaiter une belle année 2025 à tous nos lecteurs !

23
Nov

TVA – 257 bis – TVA facturée à tort

A l’occasion de deux affaires pour lesquelles le Conseil d’Etat refuse l’admission du pourvoi en cassation, on se rappelle que lorsque la dispense de TVA est applicable, la TVA qui serait alors facturée, par erreur, dans l’acte d’acquisition ne serait pas déductible par l’acquéreur, en raison du fait qu’il s’agit d’une TVA facturée à tort.

A noter que dans l’une des deux affaires, l’acquéreur avait précédemment obtenu le remboursement de la TVA d’acquisition mais avait ensuite fait l’objet d’un redressement (la TVA facturée à tort n’est pas déductible). Le remboursement d’un crédit de TVA ne constitue pas en effet la validation du caractère déductible de la TVA remboursée (affaire n° 463000).

Dans une telle situation, l’acquéreur n’a, en règle générale, pas d’autre choix que de demander la rectification de l’acte pour faire disparaître cette TVA et obtenir de son vendeur la restitution de la taxe qu’il est lui-même, en principe, en droit de d’obtenir de l’administration fiscale.

Dans le pire des cas, si le vendeur est défaillant, l’acquéreur a alors, sous certaines conditions, une « action directe » à l’égard de l’administration fiscale.

CE 16 novembre 2022, n° 462999 et 463000, refus d’admission du pourvoi en cassation

7
Mar

TVA – art. 257 bis – TVA facturée à tort – personne physique – loueur en meublé – résidence de tourisme

Un arrêt rendu par la CAA de Bordeaux rappelle que les dispositions de l’article 257 bis sont obligatoires et que si la TVA est alors facturée, celle-ci est facturée à tort et ne peut pas donner lieu à un remboursement chez l’acquéreur, même si le vendeur a versé à l’Etat la TVA indiquée dans l’acte.

Au cas particulier, il s’agissait d’une vente entre personnes physiques exerçant une activité de loueur en meublé dans une résidence de tourisme.

Pour mémoire, lorsqu’une telle situation se produit, il convient de mettre en place une procédure de régularisation de TVA facturée à tort.

Consulter la CAA de BORDEAUX, 7ème ch., 10 février 2022, 20BX01000, « Inédit au recueil Lebon »

Dans le même sens, voir notre article du 31 mai 2016.

22
Jan

TVA – TAB – TVA sur marge – 1ère décision de CAA

 

La CAA de Lyon a rendu le 20 décembre 2018 une décision dans une affaire PROMIALP (N° 17LY03359) qui infirme la condition d’identité exigée par l’administration fiscale pour le bénéfice de la TVA sur marge.

Selon la CAA de Lyon, il résulte des dispositions du code général des impôts (article 268) et de la directive 2006/112/CE du 28 novembre 2006 (article 392) que l’application de la TVA sur marge aux livraisons de terrains à bâtir (TAB) serait conditionnée au seul fait que l’acquisition par le cédant n’a pas ouvert droit à déduction de la TVA lors de son acquisition.

Aucune condition d’identité ne serait donc exigée. Ainsi, la circonstance que les caractéristiques physiques et la qualification juridique du bien acheté ont été modifiées avant la cession est sans incidence sur l’application du régime de TVA sur marge. Une telle analyse va donc à l’encontre de la réponse Vogel du 17 mai 2018.

Les faits de l’espèce sont intéressants pour deux raisons :
– Acquisition d’un immeuble bâti et vente de plusieurs TAB après démolition et division. Il s’agit d’une hypothèse maximaliste en termes de défaut d’identité qui permet de s’assurer que même une identité physique (l’absence de démolition) ne serait pas requise.
– Acquisition hors champ de la TVA auprès de vendeurs particuliers non assujettis à la TVA. Ici encore, le cas est intéressant dans la mesure où certains prétendent, par analogie avec le régime des biens d’occasion, que seule une acquisition grevée d’une TVA non récupérable permettrait de bénéficier du régime de TVA sur marge.

L’arrêt rendu par la CAA de Lyon présente une autre particularité qu’il nous semble nécessaire d’analyser.

S’agissant de cessions de TAB qui auraient pu bénéficier de la TVA sur marge, au regard de l’analyse rappelée ci-dessus, certains actes indiquaient une TVA sur le prix alors que le vendeur n’avait reversé à l’Etat qu’une TVA sur marge.

La CAA de Lyon considère que la mention de la TVA sur le prix constitue une TVA facturée à tort qui oblige le vendeur à reverser, en tout état de cause, ce montant à l’Etat. La CAA de Lyon considère également que la rectification ultérieure de l’acte de vente en conservant le même montant TTC à la charge de l’acquéreur ne permet pas d’annuler la TVA sur le prix initialement facturée à tort.

Une telle analyse n’est cependant pas évidente.

Dans la mesure où la vente d’un TAB à un particulier n’est pas concernée par une obligation de facturation au regard de la réglementation TVA, il n’est pas logique de considérer que la TVA ait pu être facturée à tort.

Le verrou de sécurité de la TVA facturée à tort est également sans intérêt dans la mesure où la TVA ne devait plus, à l’époque des faits, pouvoir être récupérée par le particulier (la TVA immobilière des particuliers ayant à l’époque des faits disparu en cas d’achat d’un TAB).

L’impossibilité d’une TVA facturée à tort « bloquante », dans une telle hypothèse, a déjà été exprimée par l’administration fiscale dans une réponse ministérielle Collin Sén. 4 novembre 2010, n° 14362 ou confirmée par un TA de Montreuil du 1er décembre 2016 n° 1502570 qui repose sur la jurisprudence communautaire (voir en dernier lieu CJUE 11 avril 2013, C-138/12, Rusedespred OOD) reprise par le Conseil d’Etat (CE 16 mai 2011, n° 330153, Crédit coopératif).

Modifications du 23 janvier 2019

A lire les conclusions partiellement contraires du rapporteur public (à consulter sur le site https://alyoda.eu)