
DMTO – engagement de revendre – opérations de découpe – délai spécial de 2 ans
L’acquisition d’un immeuble achevé depuis plus de cinq ans est, en principe, soumise aux droits de mutation à titre onéreux au taux plein (i.e. en principe 5,80665% sauf dans certains départements, voir l’espace DMTO, auxquels s’ajoutent classiquement les émoluments du notaire et la CSI de 0,10% (ancien salaire du conservateur), et enfin, s’agissant des locaux à usage de bureaux, de locaux commerciaux et de locaux de stockage situés en Ile-de-France une taxe additionnelle de 0,6% prévue à l’article 1599 sexies du CGI, le tout formant les « frais de notaire » ).
Lorsque l’acquisition est effectuée par un assujetti à la TVA, celui-ci peut notamment prendre un engagement de revendre afin de « réduire » les droits de mutation à titre onéreux à 0,71498% (auxquels s’ajoutent toujours les émoluments du notaire et la CSI).
En principe, l’acquéreur assujetti doit avoir revendu l’immeuble dans les cinq ans de son acquisition (attention au cas particulier dans lequel le vendeur précédent a également pris un engagement de revendre puisque, dans ce cas, le délai du vendeur précédent s’impose à l’acquéreur ainsi qu’il ressort du deuxième alinéa de l’article 1115 du CGI).
Contrairement à ce qui est indiqué, par erreur, dans de nombreuses matrices d’actes, l’engagement de revendre n’est pas prorogeable. La seule exception concerne l’aménageur de ZAC (article 1594-0 G, A-IV bis du CGI).
Une autre exception, temporelle, concerne les engagements de revendre qui ont couru pendant le premier confinement, puisqu’ils bénéficient, dans le meilleur des cas, d’une prorogation automatique de 104 jours (voir nos articles).
A noter enfin que, malgré la crise qui frappe actuellement le marché de l’immobilier, le législateur n’a pas (encore) prévu une prorogation automatique du délai de l’engagement de revendre, comme cela avait été fait pour les biens acquis avant le 1er janvier 1993 jusqu’au 31 décembre 1998 (article 66 de la loi de finances rectificative pour 1992 (92-1476 du 31 décembre 1992) puis article 17 de la loi de finances rectificative pour 1995 (95-1347 du 30 décembre 1995)) (pour mémoire, voir également la réponse LACHAUD JO AN 2 novembre 2004, N° 45133)
En ce qui concerne les opérations de découpe, les opérations portant sur des locaux de bureaux ou des locaux commerciaux ne dérogent pas à ce qui vient d’être rappelé.
En revanche, les opérations portant sur des locaux d’habitation sont pénalisées. Le délai de cinq ans est en effet ramené à deux ans.
Ainsi, l’article 1115 du CGI dispose que : « Pour les reventes consistant en des ventes par lots déclenchant le droit de préemption prévu à l’article 10 de la loi n° 75-1351 du 31 décembre 1975 relative à la protection des occupants de locaux à usage d’habitation ou celui prévu à l’article 15 de la loi n° 89-462 du 6 juillet 1989 tendant à améliorer les rapports locatifs et portant modification de la loi n° 86-1290 du 23 décembre 1986, le délai prévu pour l’application de l’engagement de revendre visé au premier alinéa est ramené à deux ans. »
Dans un arrêt remarqué du 7 juillet 2015, la Cour de cassation avait retenu une approche libérale de laquelle il résultait qu’il fallait que le lot soit revendu occupé pour que le délai de 2 ans s’applique. Ainsi, la situation de l’immeuble lors de l’acquisition n’était pas prise en considération (Com. 7 juillet 2015, pourvoi n° 13-23.366 Bull. 2015, IV, n° 51) (voir notre article sur le sujet).
Pour mémoire un extrait de cet arrêt : « l’arrêt [attaqué] retient que ni le fait de se placer sous le régime de l’article 1115 du code général des impôts, ni la division de l’immeuble par lots n’ont déclenché en eux-mêmes le droit de préemption des locataires qui occupaient les appartements au moment de l’acquisition de l’immeuble par la société ; qu’ayant constaté que les reventes litigieuses avaient porté sur des lots alors libres de toute occupation, la cour d’appel en a exactement déduit que le délai applicable était celui de quatre ans [délai applicable à l’époque des faits] »
Dans un arrêt du 14 février 2024, la Cour de cassation est venue nuancer cette approche favorable. Ainsi, même si les lots sont finalement revendus inoccupés, le délai de deux ans demeure applicable lorsque le droit de préemption des locataires a été déclenché par la notification des offres de vente après division de l’ensemble en lots de copropriété. Dans cette hypothèse, le délai de 2 ans a comme point de départ, non pas la date de notification des offres, mais bien la date d’acquisition de l’immeuble destiné à une opération de découpe (Com. 14 février 2024, pourvoi n° 22-17.541 Publié au bulletin).

TVA – location de locaux nus – option rétroactive
Pour mémoire, la location de locaux nus est exonérée de la TVA (art. 261 D, 2° du CGI). L’article 260, 2° du CGI prévoit cependant une faculté d’option, sous certaines conditions. L’article 194 de l’annexe II au CGI précise enfin que : » L’option ou sa dénonciation prend effet à compter du premier jour du mois au cours duquel elle est formulée auprès du service des impôts. »
Dans une décision en date du 21 décembre 2023, n°474042, SAS François Perrino Holding, le Conseil d’Etat a tranché la question d’une option à la TVA exercée de manière rétroactive.
A cet égard, le Conseil d’Etat rappelle qu’il résulte des dispositions précitées que la validité d’une option formulée par le propriétaire de locaux qu’il destine à la location n’est assurée, et que, par suite, cette option ne peut emporter d’effets (i.e. le droit à déduction de la TVA) :
– qu’à compter du premier jour du mois au cours duquel l’option est formulée,
ou
– si la date est postérieure, de la date à laquelle sont souscrits, aux fins de location, immédiate ou future, de ces locaux, des engagements contractuels de nature à établir la conformité de l’opération aux articles ci-dessus rappelés.
Partant, le Conseil d’Etat a considéré qu’une option exercée le 15 décembre 2016 avec l’indication expresse d’un effet rétroactif au 1er janvier 2016, ne pouvait pas produire effet avant le 1er décembre 2016, au mieux.
« En statuant ainsi, sans rechercher à quelle date avaient été souscrits les engagements contractuels en vertu desquels elle a débuté son activité, le 1er janvier 2017, et alors que l’option exercée était en tout état de cause insusceptible, en vertu des règles rappelées au point 2, de produire des effets, au titre de l’exercice par la société de son droit à déduction, antérieurement au 1er décembre 2016, la cour a commis une erreur de droit »
Au final, pas de droit à déduction de la TVA grevant les dépenses exposées antérieurement à la date à laquelle l’option devient valide.
Remarque :
Traditionnellement, le Conseil d’Etat retient une position plus sévère que celle de l’administration fiscale pour déterminer la date de la validité de l’option. Celui-ci retient la date de souscription d’engagements contractuels (CE, 13 janvier 2006, S.C.I. Les Alizés, n° 253404) alors que le BOFIP (BOI-TVA-CHAMP-50-10 § 170) prévoit qu’il « est admis que dès lors qu’une option a été formulée en bonne et due forme par le bailleur, cette dernière produit ses effets sur les locaux nus à usage professionnel non effectivement donnés en location par le bailleur mais dont il peut être établi, par des éléments objectifs, qu’il les offre à la location » (exemple : un mandat de recherche de locataire en début d’activité).
Au cas particulier, la perte de la TVA déductible aurait pu être évitée avec une option exercée au bon moment alors même qu’aucun engagement contractuel n’aurait été souscrit.
Nota du 24/04/2024 : voir également sur le sujet CAA Lyon, 2e ch., 18 avr. 2024, n° 21LY03607

LF 2024 – TVA – Quartiers prioritaires (QPPV) – accession sociale – Art. 86 (art. 10 quinquies PLF)
Pour mémoire, le III de l’article 278 sexies du CGI applique le taux de TVA réduit à 5,5 % à différentes opérations relevant de l’accession à la propriété, dont, au 2°, les livraisons de logements et travaux faisant l’objet d’un contrat d’accession à la propriété pour lequel le prix de vente ou de construction n’excède pas le plafond prévu pour les contrats de location-accession, à condition, notamment, qu’à la date du dépôt de la demande de permis de construire, les logements soient situés dans un quartier faisant l’objet d’une convention de rénovation urbaine ou dans un QPPV, ou entièrement situés à moins de 300 mètres de la limite de ces quartiers. Dans le cas d’un QPPV en renouvellement urbain, le périmètre comprend la totalité d’un ensemble immobilier situé partiellement à moins de 300 mètres et entièrement à moins de 500 mètres de la limite du QPPV (« bande des 300 à 500 mètres »).
L’article 86 de la LF 2024 apporte plusieurs aménagements à ce dispositif s’agissant de l’accession sociale.
– Nécessité de la conclusion d’un contrat de ville pour les ensembles immobiliers situés dans la bande des 300 à 500 mètres (art. 86, I-1°) (voir les commentaires ci-dessous concernant la conclusion des nouveaux contrats de ville).
– Conséquences résultant de la nouvelle liste des QPPV
La nouvelle liste des QPPV a été fixée par le décret n° 2023-1314 du 28 décembre 2023.
L’article 86, I-2° crée un article 278 sexies B du CGI, qui s’applique aux anciens QPPV qui répondent aux deux conditions cumulatives suivantes : (i) ces quartiers sont dans la liste des QPPV au 31 décembre 2023 et (ii) ces quartiers font l’objet d’une convention de renouvellement urbain conclue au plus tard le 31 décembre 2023.
Dans ces anciens QPPV, le taux de TVA réduit à 5,5 % continue de s’appliquer aux logements et travaux faisant l’objet d’un contrat d’accession à la propriété pour lesquels la demande de permis de construire est déposée au plus tard le 31 décembre 2026.
– Conséquences résultant de la conclusion des nouveaux contrats de ville
Pour mémoire, la date de signature des futurs contrats de ville a été reporté à fin mars 2024. En principe, à la lecture de l’article 278 sexies, III-2°, et notamment pour le b modifié par l’article 86, I (voir notre premier tiret), les opérations dont les demandes de permis de construire sont déposées entre le 1er janvier 2024 (les contrats de ville actuels produisent effets jusqu’au 31 décembre 2023 – art. 30 de la loi n° 2014-173 du 21 février 2014, modifié en dernier lieu par l’art. 68 de la loi n°2021-1900 du 30 décembre 2021, LF 2022) et la date de signature du nouveau contrat de ville ne pourraient pas bénéficier du taux de 5,5%.
Pour résoudre ce problème, l’article 86, I-2° prévoit que les logements et travaux pour lesquels la demande de permis de construire est déposée en 2024 et qui sont situés dans ou à proximité d’un QPPV, la condition tenant à la conclusion d’un contrat de ville est appréciée au 31 décembre 2024.
Cette solution n’est cependant pas sans poser problème. Pour les demandes de permis déposées à partir du 1er janvier 2024, les opérateurs seront dans l’incertitude sur le taux de TVA applicable jusqu’à la date de signature du contrat de ville, ce qui conduit à constater que si dans certains quartiers, cette signature était décalée après le 31 décembre 2024, l’opération relèverait finalement du taux de 20%.
Pour éviter cette difficulté, un amendement N° I-865 avait été déposé au Sénat en première lecture pour supprimer la condition relative à la signature d’un contrat de ville. Cet amendement a toutefois été rejeté.
Assemblée nationale – première lecture – Amendement n°I-5062
Assemblée nationale – première lecture (Art. 49.3) – article 10 quinquies
Sénat – première lecture – Commission des finances
Sénat – première lecture – article 10 quinquies modifié
Assemblée nationale – nouvelle lecture – Commission des finances
Assemblée nationale – nouvelle lecture – article 10 quinquies modifié
Entrée en vigueur : 1er janvier 2024 (art. 1, II-3° de la LF 2024)

TVA – Location de locaux nus – option – ensemble immobilier
Sous certaines conditions, un bailleur peut soumettre la location de locaux nus à la TVA (article 260, 2° du CGI).
L’option résulte, en principe, d’une lettre spécifique envoyée à l’administration fiscale.
A défaut, la TVA qui est facturée au preneur, est facturée à tort et ne permet pas au bailleur d’exercer ses éventuels droits à déduction.
L’article 193 de l’annexe II au CGI prévoit que « Les personnes qui donnent en location plusieurs immeubles ou ensembles d’immeubles doivent exercer une option distincte pour chaque immeuble ou ensemble d’immeubles »
Dans une affaire complexe, la CAA de Nancy vient de juger qu’une option exercée pour un immeuble donné ne produisait pas d’effet pour un second immeuble construit ultérieurement sur la même parcelle dès que lors que ces deux immeubles ne formaient pas un ensemble immobilier au sens des dispositions de l’article 193 précitées, en l’absence de permis de construire unique ou de même programme de construction.
A noter que la notion d’ensemble immobilier n’est pas définie par le CGI.
L’administration fiscale a, quant à elle, défini cette notion de la manière suivante : « Par ensemble immobilier, il faut entendre non seulement un groupe de bâtiments ayant fait l’objet d’un même plan de masse, d’un permis de construire unique, ou d’un même programme de construction, réalisé sur un terrain appartenant à une même personne, mais également deux ou plusieurs immeubles construits sur un même terrain et destinés à l’exercice d’une seule et même activité par le preneur » (BOI-TVA-CHAMP-50-10 § 110).
Cette affaire montre l’importance pratique (i) d’une bonne rédaction des lettres d’option TVA et (ii) de leur suivi dans le temps (e.g. extension, surélévation, restructuration conduisant à un immeuble neuf pour les besoins de la TVA), et ceci d’autant plus que l’administration fiscale a, à la suite d’un arrêt EMO du Conseil d’Etat du 9 septembre 2020, autorisé une option par local et non plus seulement une option globale par immeuble ou ensemble immobilier (voir la réponse ministérielle Grau JO AN du 16 novembre 2021, n°38389).
Dernier point. En ce qui concerne l’exercice des droits à déduction, il est important de bien identifier les différents immeubles ou ensembles immobiliers détenus, afin de pouvoir suivre distinctement la TVA relative à chacun des immeubles. Chaque immeuble ou ensemble immobilier constitue en effet un secteur distinct d’activité (article 209, I-2° de l’annexe II au CGI).
Consulter CAA de NANCY, 2ème chambre, 30/11/2023, 21NC00653, SCI CV NAUDIN