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Posts from the ‘Baux’ Category

24
Oct

TVA et franchises de loyers

 

Une franchise de loyers devrait, en principe, être analysée comme une réduction de prix octroyée en fonction de l’importance de la transaction et des conditions de marché.

Des affaires particulières récentes ont montré que les services vérificateurs pouvaient contester cette analyse au motif que la franchise de loyers serait en fait la rémunération en nature d’un service qui serait rendu par le locataire au bailleur.

Si on suit une telle analyse le bailleur devrait collecter de la TVA dans les mêmes conditions que si le locataire lui avait versé un loyer (le loyer principal doit donc être soumis à la TVA de plein droit ou sur option). Le locataire devrait également émettre une facture comportant systématiquement de la TVA s’agissant du service qu’il est censé rendre au bailleur.

Le point de départ de ces dossiers est souvent le contrat de bail. Le service vérificateur tente alors de démontrer que les concessions réciproques qui sont reprises dans le contrat et que se sont consenties les parties dans le cadre de la négociation commerciale sont en fait de véritables échanges de services.

Il en est notamment ainsi lorsqu’une franchise de loyers est accordée à la condition que le locataire prenne l’engagement de louer pendant une durée ferme de 9 ans au lieu de 3 ans. Pour autant, une telle situation n’a rien d’étonnant. En effet, comme dans toute négociation commerciale, le prix est fonction de la quantité, qui, s’agissant d’un contrat tel qu’un bail, peut également s’exprimer dans la durée.

En droit français, cet engagement du locataire prendrait la forme d’une renonciation au droit qu’il détient de la loi, de demander au bailleur une résiliation triennale. Le locataire qui prend un tel engagement ferme de louer pour 9 ans et qui renonce à la possibilité de résilier tous les 3 ans, rend-il une prestation de services au bailleur ? Il est évident que le bailleur trouve un intérêt économique à cet engagement. Est-il pour autant le bénéficiaire d’un service au regard de la TVA ?

Ces différentes situations ont déjà donné lieu à des décisions de la Cour de Justice de l’Union Européenne qui rappellent, qu’au regard de la TVA, le locataire ne rend pas un service au bailleur en acceptant de devenir son locataire.

Partant, la franchise que consent le bailleur pour inciter le locataire à conclure le bail n’est donc pas, au regard de la TVA, la rémunération d’un service fourni par le locataire. Dès lors, pour quelles raisons le locataire qui prendrait un engagement de durée ferme, rendrait-il un service au bailleur ? Autrement, la majorité des franchises, et plus généralement, la majorité des réductions de prix dépendant d’un volume d’achat, devrait être taxée à la TVA, ce qui a déjà été réfuté par le Conseil d’Etat et ensuite par l’administration fiscale (CE 30 décembre 2002 n° 205131, 8e et 3e s.-s., min. c/ SA Rennesson :  RJF 3/03 n° 284 et instruction du 20 juillet 2006, 3 B-4-06).

Dès lors, le fait de prendre en location pendant une durée plus longue ne constitue pas une prestation de services qui serait rendue par le locataire au bailleur. La franchise consentie par le bailleur en contrepartie de cet engagement ferme n’est donc pas la rémunération d’un service qui lui serait rendu. La DLF a d’ailleurs déjà eu l’occasion de le rappeler, dans des affaires particulières impliquant des actifs de premier plan, après avoir vérifié au vu des conditions de marché que le montant du loyer ainsi réduit par la franchise ne traduisait pas une intention libérale.

Au final, la question se pose de savoir s’il existe une hypothèse dans laquelle la franchise consentie par le bailleur pourrait être analysée comme un flux croisé de prestations. En fait, il existe effectivement des situations spécifiques dans lesquelles on peut constater un échange de services au sens de la TVA. Ainsi, le cas de certains locataires locomotives ou prestigieux de centres commerciaux peut parfois donner lieu à de tels échanges.

En pratique, même s’il apparaît qu’une franchise de loyer ne devrait donner lieu à collecte de TVA que dans des circonstances exceptionnelles, la revue TVA des projets de contrats apparaît indispensable pour préserver la sécurité juridique des parties. Une telle analyse prendra également en considération les conditions de marché au moment de la conclusion du bail.

Nota : lorsque l’immeuble est vendu alors que la franchise de loyers est encore d’une durée significative, il conviendra également de revoir les conséquences comptables et fiscales de l’accord des parties quant à celle qui en supportera la charge définitive.

27
Juin

TVA – vente d’immeubles – reversement du prorata de loyer

La vente d’un immeuble donné en location donne généralement lieu à un reversement de prorata de loyer. En effet, le vendeur qui a encaissé le loyer au titre d’un mois ou d’un trimestre donné reverse à l’acquéreur une partie du loyer calculée prorata temporis dès lors que la vente intervient au cours de la période en cause.
Lorsque le bail est soumis à la TVA sur option ou de plein droit, la question est de savoir si ce reversement de loyer du vendeur à l’acquéreur doit ou non être soumis à la TVA.
La question n’est pas évidente et une lettre de confort a été demandée à la Direction de la Législation Fiscale en 2007.
La réponse est la suivante :
  • 1. Ce reversement n’est pas la contrepartie d’un service rendu par l’acquéreur au profit du vendeur : il ne s’agit pas d’un loyer et le vendeur n’est pas le locataire de l’acquéreur ;
  • 2. Dès lors que le loyer est encaissé par le vendeur, le vendeur doit reporter la totalité du loyer et la TVA correspondante sur sa déclaration de chiffre d’affaires.
  • 3. Le vendeur ne doit pas réduire la TVA collectée au titre du loyer encaissé lors du reversement prorata temporis à l’acquéreur.
Pour conclure, le prorata de loyer n’est donc qu’un simple ajustement financier effectué par les parties. Ce reversement n’est pas soumis à la TVA et prend comme base de calcul le loyer hors taxe.
Ces éléments de réponse, qui sont déconnectés du régime de la vente de l’immeuble, ne nous semblent pas remis en cause par la réforme de la TVA immobilière.
A noter qu’il existe un risque de TVA facturée à tort chez le vendeur qui accepterait une facture avec TVA de l’acquéreur au titre de ce reversement. A cet égard, le Conseil d’Etat a encore récemment rappelé que le fait que le vendeur soit de bonne foi ne supprime pas ce risque (CE 21 novembre 2011 n° 316485, 9e et 10e s.-s., min. c/ Sté Tobacco Exporters International).
A titre d’information, vous trouverez ci-joint une copie de la lettre de confort reçue de la DLF le 27 août 2007.
3
Mai

TVA – location de locaux nus à usage professionnel – attention à la validité de l’option

 
A l’occasion d’un contrôle fiscal ou d’une cession d’immeuble, ne pas produire la lettre d’option qui permet valablement de taxer la location de locaux nus à usage professionnel est problématique.
Dans une instruction récente (3 A-2-12 du 22 mars 2012), l’administration fiscale rappelle des règles tristement connues :
  • A défaut d’option, la location de locaux nus à usage professionnel est exonérée de la TVA ;
  • Le bailleur ne peut donc pas récupérer la TVA d’amont (la TVA grevant des loyers de crédit-bail, par exemple) ;
  • Le seul fait de facturer la TVA au locataire n’est pas considéré comme une option valable ;
  • Plus encore, le fait de verser au trésor la TVA facturée au locataire ne confère au bailleur aucun droit à déduction.
 
Dans ce contexte, il demeure crucial de s’assurer que la lettre d’option :
  1. est effectivement envoyée ;
  2. désigne précisément l’immeuble au titre duquel elle est exercée ;
  3. est envoyée dans les temps, c’est-à-dire au cours du mois qui précède l’acquisition de l’immeuble ;
  4. est accompagnée d’une preuve de dépôt même si l’administration ne l’exige pas ;
  5. est précieusement conservée.
 
Le Conseil d’Etat a récemment rappelé que la déclaration d’existence (le formulaire M0, par exemple) pouvait constituer une option valable sous certaines conditions, à savoir que la déclaration comporte des indications suffisamment précises pour identifier l’immeuble concerné (CE 23 décembre 2011, n° 323189, société Mercedes). En l’espèce, il a cependant été jugé qu’une déclaration qui précisait « toutes opérations à caractère immobilier » ne constituait pas une option valable même si le déclarant avait par ailleurs indiqué se soumettre au régime réel normal de la TVA.
De notre point de vue, cette décision du Conseil d’Etat est bien souvent inapplicable en pratique et ne doit surtout pas remettre en cause les recommandations rappelées ci-dessus.


William Stemmer, avocat associé, Taj, société d’avocats, membre de Deloitte Touche Tohmatsu limited
26
Avr

TVA – travaux effectués dans les locaux à usage d’habitation – deux nouveaux rescrits publiés

Le premier rescrit est très important. Celui-ci qui concerne le taux réduit de la TVA qui bénéficie aux travaux effectués dans les locaux à usage d’habitation achevés depuis plus de deux ans, vient neutraliser une décision très sévère du Conseil d’Etat du 3 février 2011.
Le Conseil d’Etat avait en effet considéré que l’attestation permettant le bénéfice du taux réduit devait être remise à l’entreprise de travaux avant le versement du premier acompte par le client.
En pratique, le bénéfice du taux réduit de la TVA était donc fragilisé et, en cas de contrôle, l’entreprise de travaux pouvait se voir réclamer un complément de taxe de 14,1% (19,60% – 5,5% ).
Le rescrit vient utilement préciser que lattestation peut valablement être fournie lors de la facturation finale ou de l’achèvement des travaux.
Le second rescrit précise, quant à lui, les modalités d’entrée en vigueur du nouveau taux de TVA de 7% qui est désormais applicable à ces travaux depuis le 1er janvier 2012.

 

 

William Stemmer, avocat associé, Taj, société d’avocats, membre de Deloitte Touche Tohmatsu limited