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1
Août

Abrogation de la TVA sociale – adoption du second projet de loi de finances rectificative pour 2012

 

L’Assemblée nationale et le Sénat ont adopté, hier dans la soirée, le texte du second projet de loi de finances rectificative pour 2012. Vous pouvez consulter le texte de la petite loi en suivant ce lien.

Sous réserve de la revue par le Conseil constitutionnel, qui vient d’être saisi par 60 députés et 60 sénateurs, ce texte confirme l’abrogation définitive de la TVA sociale. Il n’y aura donc pas en principe de hausse, au 1er octobre 2012, du taux normal de la TVA de 19,60% à 21,20%.

S’agissant de la technique contractuelle, la TVA sociale a contraint les professionnels à préciser qui du vendeur ou de l’acquéreur prenait en charge une potentielle évolution du taux de la TVA. L’instabilité fiscale de ces deniers mois montre que l’insertion systématique de telles clauses n’est peut-être pas superflue.

31
Juil

DMTO – Engagement de construire – Exonération de droits – Teneur de l’engagement


Est-il nécessaire d’être en mesure de prouver l’existence d’un projet de construction abouti pour valablement souscrire un engagement de construire ?

Sous réserve d’un droit fixe de 125 EUR, l’engagement de construire permet à un acquéreur assujetti à la TVA d’exonérer l’acquisition d’un immeuble de droits de mutation. L’exonération n’est cependant définitivement acquise que si le porteur de l’engagement justifie de son exécution à l’échéance, c’est-à-dire dans les 4 ans de l’acquisition sauf obtention d’éventuelles prorogations annuelles. Dans le cas où la justification n’est pas apportée, le porteur de l’engagement doit payer les droits de mutation dont il a été dispensés ainsi que l’intérêt de retard au taux de 0,4% par mois.

Le système est donc prévu pour dissuader les engagements de pure complaisance.

Comment faut-il dès lors traiter les dossiers dans lesquels l’acquéreur n’a soit pas l’intention de construire soit ne peut pas techniquement mener à bien un projet de construction ?

Ces cas ne sont pas rares et méritent que l’on s’y attarde un instant.

Il y a tout d’abord le cas pittoresque de l’engagement de construire pris sur un terrain non à bâtir.

Il y a plus fréquemment l’engagement pris sur un lot de copropriété dont les seuls droits qui y sont attachés ne permettent pas de réaliser le projet de construction objet de l’engagement.

Il y a ensuite l’engagement de construire pris par un non constructeur mais par un aménageur qui va démolir les constructions actuelles et préparer le terrain pour des constructions futures qui seront réalisées par des sous-acquéreurs.

Il y a enfin l’engagement de construire pris par un acquéreur assujetti qui n’a pas un projet arrêté concernant l’immeuble mais qui souhaite conserver la plus grande souplesse fiscale pour mener à bien tout projet de construction ou de revente dans les 4 ans de l’acquisition.

A la lecture de cette énumération, on comprend que ces cas recouvrent des acquéreurs aux intentions différentes :

– l’acquéreur qui fait un pari sur l’avenir. Il en va ainsi de l’acquisition du terrain non à bâtir ou de la première acquisition d’un lot de copropriété dont on souhaite acquérir ultérieurement le reste des lots ;

– l’acquéreur qui entend faire jouer à plein le transfert de l’engagement de construire au futur constructeur assujetti. Il en va notamment de l’aménageur.

– l’acquéreur expérimenté qui fait une application avisée des règles fiscales.

Dans la mesure où le code général des impôts (article 1594-0 G) ne prévoit pas de condition tenant :

– au caractère constructible du terrain. L’administration fiscale confirme à cet égard la possibilité expresse de prendre un engagement de construire sur un terrain non à bâtir sans indiquer qu’il s’agit d’une quelconque tolérance ;

– à l’obtention d’un permis de construire ou au dépôt d’une telle demande ;

– à l’intention de construire. Le texte vise les « acquéreurs » assujettis et non pas les « constructeurs » assujettis ;

Nous considérons que l’engagement de construire ne requiert pas une intention particulière au moment où il est pris.

A notre sens, cette réponse vaut lorsque l’engagement de construire est pris dans l’acte d’acquisition. Elle devrait d’ailleurs être identique lorsque l’engagement est pris dans un acte complémentaire ou à l’occasion d’une substitution à un engagement de revendre.

En effet, dans ces deux derniers cas, le code général des impôts n’ajoute aucune condition particulière tenant à l’obtention d’un permis de construire ou au début des travaux pour justifier de l’engagement pris postérieurement à l’acquisition.

L’engagement de construire ne requiert donc pas d’intention particulière ?

L’engagement de construire n’est pas l’ancien engagement de revendre des marchands de biens. Cet engagement, qui leur était réservé, nécessitait en effet la preuve de l’intention de revendre lors de l’acquisition ainsi que tout au long de la détention de l’immeuble.

L’engagement de construire n’est pas non plus l’engagement des promoteurs ou des constructeurs. Il s’agit simplement de l’engagement des assujettis. La qualité d’assujetti est donc la seule preuve à apporter.

Quant à ceux qui au final ne respectent pas leur engagement de construire, le législateur a prévu des intérêts de retard pour leur faire payer le prix du temps. Le système a donc été verrouillé.

Les acquéreurs expérimentés qui font une application avisée des règles fiscales pourraient-ils être inquiétés sur le terrain de l’abus de droit ?

Tout risque n’est pas exclu. Cependant, de notre point de vue, cet angle d’attaque n’est pas évident dès lors que, dans le pire des cas, le non respect d’un engagement ne permet pas, en principe, d’éluder le montant des droits mais simplement d’en décaler le paiement. Au vu du verrouillage mis en place, il n’est pas non plus évident de démontrer qu’une telle situation serait contraire à l’intention du législateur.

Pour comparer, une affaire d’échelonnement du paiement d’une TVA non déductible a pu être considérée comme non abusive par la Cour de justice de l’Union européenne dès lors que le montants de taxe en cause demeuraient identiques (CJUE 22 décembre 2010, aff. 103/09, Weald Leasing Ltd).

Enfin, des contrôles fiscaux récents ont pu mettre en lumière la validité de tels engagements.

Sur un plan pratique, il faudra néanmoins prendre garde à rédiger un engagement conforme aux prescriptions de l’article 266 bis de l’annexe III au CGI et indiquer l’objet et la consistance des travaux sur lesquels portent l’engagement.

25
Juil

TVA – défaut de mention de la marge hors taxe et du taux de la TVA dans l’acte de vente – TVA non récupérable par l’acquéreur

Dans un arrêt du 5 avril 2012, la CAA de Lyon a jugé que la TVA sur marge qui apparaît dans un acte authentique n’est pas récupérable par l’acquéreur lorsque l’acte ne comporte pas la mention du taux de la TVA et de la marge hors taxe.

Même si la solution retenue est d’une (trop) grande sévérité, cet arrêt donne néanmoins l’occasion de faire un point sur les conditions formelles du droit à déduction de la TVA.

A cet égard, la déduction de la TVA requiert notamment la détention d’une facture originale comportant l’ensemble des mentions obligatoires prévues par l’article 242 nonies A de l’annexe II au CGI.

Lorsqu’il s’agit de l’acquisition d’un immeuble, l’acte notarié qui comporte ces mentions, constitue indéniablement une « facture » au sens de la TVA et justifie le droit à déduction de la TVA.

Une difficulté apparaît lorsque l’une des mentions obligatoires vient à manquer.

En effet, en théorie, c’est l’effet domino. Le document qui ne contient pas toutes les mentions obligatoires n’est plus une facture au sens de la TVA et un tel document ne permet plus le droit à déduction.

Toutefois, traditionnellement, le Conseil d’Etat et l’administration fiscale retiennent une analyse plus souple afin d’éviter ce scénario catastrophe lorsqu’il apparaît disproportionné avec la gravité des manquements en cause.

A titre d’exemple, le Conseil d’Etat juge, de manière constante, que la mention d’un prix « 100 TTC incluant une TVA à 19,60% » est suffisante alors même que le montant de la TVA, qui constitue une mention obligatoire, n’est pas indiqué.

De son côté, l’administration fiscale précise que la seule omission ou inexactitude de l’une des mentions obligatoires devant figurer sur la facture n’affecte pas nécessairement sa validité pour l’exercice du droit à déduction, dès lors que l’opération est justifiée dans sa réalité et qu’elle satisfait par ailleurs aux autres conditions posées pour l’exercice du droit à déduction.

Dans ce contexte, la sévérité de la CAA de Lyon est inhabituelle.

Le juge a relevé deux mentions manquantes : le taux de la TVA et la marge hors taxe.

S’agissant de la marge hors taxe, l’article 242 nonies A n’exige pourtant pas une telle mention et se contente de viser le prix hors taxe. Il est cependant possible que le juge français ait lu le CGI à la lumière de l’article 226 de la directive TVA qui vise, quant à lui, la « base d’imposition ». La marge est en effet une base d’imposition particulière.

La rédaction de l’article 242 nonies A ainsi que les tolérances rappelées ci-dessus n’ont toutefois pas convaincu la CAA de Lyon qui a préféré confirmer le rejet d’une TVA de 26 000 euros.

Même si cette décision devait être infirmée par le Conseil d’Etat, [nota postérieur à la publication de l’article : l’arrêt est définitif et ne sera pas soumis au contrôle du Conseil d’Etat], l’existence d’un redressement et sa confirmation par les juges du fond font réfléchir et incitent au strict respect des mentions obligatoires prévues par l’article 242 nonies A de l’annexe II au CGI… et plus encore en indiquant systématiquement la marge hors taxe !

En pratique, la marge hors taxe pourra figurer sous la clause fiscale ou sous la clause prix de l’acte authentique.

Pour mémoire, vous trouverez ci-dessous un lien vers les dispositions de l’article 242 nonies A précité.

William Stemmer et Delphine Nicault, avocats, Cabinet TAJ, membre de Deloitte Touche Tohmatsu limited
18
Juil

TVA – cession d’un immeuble au cours de la période de transformation en immeuble neuf

 

Dans un arrêt du 12 juillet 2012 (CJUE 12 juillet 2012, aff. C-326/11, J.J. Komen), la Cour de justice de l’Union européenne a précisé le régime de TVA qu’il convient d’appliquer à la livraison d’un immeuble lorsqu’elle intervient durant la période au cours de laquelle s’opère la transformation d’un bâtiment ancien en bâtiment nouveau.
 
Cet arrêt est malheureusement d’une compréhension délicate pour un lecteur français dans la mesure où l’analyse de la Cour repose sur le droit commun de la directive TVA, dont la France s’est écartée à raison des options offertes par la directive elle-même.
 
Pour mémoire, le droit commun de la directive TVA repose sur la notion d’occupation. Pour les besoins de la TVA, un bâtiment est considéré comme neuf avant sa première occupation. La France a retenu, quant à elle, un critère mixte d’une durée de 5 années courant à compter de l’achèvement fiscal de l’immeuble. Il s’agit donc de deux logiques totalement différentes.
 
Il n’est donc pas certain que la Cour eut retenu un raisonnement identique dans le contexte français.
 
Dans les faits, des travaux de démolition partielle avait été effectués par le vendeur tandis que la fin des travaux de démolition et les travaux de construction devaient être effectués par l’acquéreur après la livraison. Par ailleurs, une partie de l’immeuble était encore occupée au moment de la livraison.
 
Il ressort de l’analyse de la Cour que jusqu’à un certain stade, la livraison est exonérée de la TVA, celle-ci ayant pour objet un bâtiment ancien. En revanche, passé ce stade, la livraison est taxable, celle-ci ayant pour objet un bâtiment « avant sa première occupation ».
Pour apprécier ce stade, le juge précise qu’il est nécessaire de prendre en considération l’état d’avancement des travaux de transformation effectués par le vendeur à la date de la livraison et, le cas échéant, l’utilisation du bien à cette date.
Dans l’affaire en cause, le juge a relevé qu’au moment de la livraison, seuls des travaux de démolition partielle avaient été effectués par le vendeur dans l’ancien immeuble, qui demeurait en outre partiellement occupé. Dans ce contexte, la livraison ne pouvait pas porter sur un bâtiment neuf.
 
A noter que pour le juge, lorsqu’un bâtiment ancien est transformé en bâtiment nouveau, il apparaît que la qualification fiscale ne peut être que binaire : soit un « bâtiment ancien » soit un « bâtiment nouveau ». A aucun moment, le bâtiment ne semble pouvoir qualifier un terrain à bâtir en raison de son caractère inutilisable.
 
L’approche du juge communautaire diffère donc de celle de l’administration fiscale française.
 
Toute la difficulté réside toutefois dans la transposition de l’analyse, qui repose sur une notion d’immeuble neuf jusqu’à sa première occupation, avec celle de la France qui considère qu’un immeuble neuf n’existe qu’à compter de son achèvement et pendant une durée de 5 années.
 
Pour mémoire, l’instruction 3 A-9-10 précise en effet en son paragraphe 30 que : « Un immeuble bâti achevé depuis plus de cinq ans sur lequel un assujetti a seulement engagé des travaux de rénovation lourde tendant à le rendre à l’état neuf au sens du 2° du 2 du I de l’article 257 demeure un immeuble achevé depuis plus de cinq ans, sous réserve que l’avancement des travaux n’ait pas eu pour effet de le rendre inutilisable. Sauf option du cédant, la cession sera donc exonérée de TVA. En revanche, elle sera taxable de plein droit comme portant sur un terrain à bâtir si l’avancement du chantier n’autorise plus aucune utilisation des lieux (cf. 24. et 27. ci-dessus), et comme immeuble neuf si la rénovation est achevée (cf. 25. ci-dessus) ».

 

 

William Stemmer, avocat associé, Taj, société d’avocats, membre de Deloitte Touche Tohmatsu limited