DMTO – Engagement de construire – Exonération de droits – Teneur de l’engagement
Est-il nécessaire d’être en mesure de prouver l’existence d’un projet de construction abouti pour valablement souscrire un engagement de construire ?
Sous réserve d’un droit fixe de 125 EUR, l’engagement de construire permet à un acquéreur assujetti à la TVA d’exonérer l’acquisition d’un immeuble de droits de mutation. L’exonération n’est cependant définitivement acquise que si le porteur de l’engagement justifie de son exécution à l’échéance, c’est-à-dire dans les 4 ans de l’acquisition sauf obtention d’éventuelles prorogations annuelles. Dans le cas où la justification n’est pas apportée, le porteur de l’engagement doit payer les droits de mutation dont il a été dispensés ainsi que l’intérêt de retard au taux de 0,4% par mois.
Le système est donc prévu pour dissuader les engagements de pure complaisance.
Comment faut-il dès lors traiter les dossiers dans lesquels l’acquéreur n’a soit pas l’intention de construire soit ne peut pas techniquement mener à bien un projet de construction ?
Ces cas ne sont pas rares et méritent que l’on s’y attarde un instant.
Il y a tout d’abord le cas pittoresque de l’engagement de construire pris sur un terrain non à bâtir.
Il y a plus fréquemment l’engagement pris sur un lot de copropriété dont les seuls droits qui y sont attachés ne permettent pas de réaliser le projet de construction objet de l’engagement.
Il y a ensuite l’engagement de construire pris par un non constructeur mais par un aménageur qui va démolir les constructions actuelles et préparer le terrain pour des constructions futures qui seront réalisées par des sous-acquéreurs.
Il y a enfin l’engagement de construire pris par un acquéreur assujetti qui n’a pas un projet arrêté concernant l’immeuble mais qui souhaite conserver la plus grande souplesse fiscale pour mener à bien tout projet de construction ou de revente dans les 4 ans de l’acquisition.
A la lecture de cette énumération, on comprend que ces cas recouvrent des acquéreurs aux intentions différentes :
– l’acquéreur qui fait un pari sur l’avenir. Il en va ainsi de l’acquisition du terrain non à bâtir ou de la première acquisition d’un lot de copropriété dont on souhaite acquérir ultérieurement le reste des lots ;
– l’acquéreur qui entend faire jouer à plein le transfert de l’engagement de construire au futur constructeur assujetti. Il en va notamment de l’aménageur.
– l’acquéreur expérimenté qui fait une application avisée des règles fiscales.
Dans la mesure où le code général des impôts (article 1594-0 G) ne prévoit pas de condition tenant :
– au caractère constructible du terrain. L’administration fiscale confirme à cet égard la possibilité expresse de prendre un engagement de construire sur un terrain non à bâtir sans indiquer qu’il s’agit d’une quelconque tolérance ;
– à l’obtention d’un permis de construire ou au dépôt d’une telle demande ;
– à l’intention de construire. Le texte vise les « acquéreurs » assujettis et non pas les « constructeurs » assujettis ;
Nous considérons que l’engagement de construire ne requiert pas une intention particulière au moment où il est pris.
A notre sens, cette réponse vaut lorsque l’engagement de construire est pris dans l’acte d’acquisition. Elle devrait d’ailleurs être identique lorsque l’engagement est pris dans un acte complémentaire ou à l’occasion d’une substitution à un engagement de revendre.
En effet, dans ces deux derniers cas, le code général des impôts n’ajoute aucune condition particulière tenant à l’obtention d’un permis de construire ou au début des travaux pour justifier de l’engagement pris postérieurement à l’acquisition.
L’engagement de construire ne requiert donc pas d’intention particulière ?
L’engagement de construire n’est pas l’ancien engagement de revendre des marchands de biens. Cet engagement, qui leur était réservé, nécessitait en effet la preuve de l’intention de revendre lors de l’acquisition ainsi que tout au long de la détention de l’immeuble.
L’engagement de construire n’est pas non plus l’engagement des promoteurs ou des constructeurs. Il s’agit simplement de l’engagement des assujettis. La qualité d’assujetti est donc la seule preuve à apporter.
Quant à ceux qui au final ne respectent pas leur engagement de construire, le législateur a prévu des intérêts de retard pour leur faire payer le prix du temps. Le système a donc été verrouillé.
Les acquéreurs expérimentés qui font une application avisée des règles fiscales pourraient-ils être inquiétés sur le terrain de l’abus de droit ?
Tout risque n’est pas exclu. Cependant, de notre point de vue, cet angle d’attaque n’est pas évident dès lors que, dans le pire des cas, le non respect d’un engagement ne permet pas, en principe, d’éluder le montant des droits mais simplement d’en décaler le paiement. Au vu du verrouillage mis en place, il n’est pas non plus évident de démontrer qu’une telle situation serait contraire à l’intention du législateur.
Pour comparer, une affaire d’échelonnement du paiement d’une TVA non déductible a pu être considérée comme non abusive par la Cour de justice de l’Union européenne dès lors que le montants de taxe en cause demeuraient identiques (CJUE 22 décembre 2010, aff. 103/09, Weald Leasing Ltd).
Enfin, des contrôles fiscaux récents ont pu mettre en lumière la validité de tels engagements.
Sur un plan pratique, il faudra néanmoins prendre garde à rédiger un engagement conforme aux prescriptions de l’article 266 bis de l’annexe III au CGI et indiquer l’objet et la consistance des travaux sur lesquels portent l’engagement.
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