Marchands de biens – importance de la qualification fiscale des travaux
Un arrêt rendu le 15 janvier 2013 par la CAA de Marseille rappelle l’importance de la qualification fiscale des travaux s’agissant d’une opération de marchand de biens.
Cette qualification permet de déterminer :
– l’engagement qui pourra utilement être pris lors de l’acquisition pour ramener les droits d’enregistrement de 5,09% à 0,715% (revendre dans les 5 ou 2 ans) ou 125 euros (construire dans les 4 ans),
– le taux de TVA sur les travaux de rénovation : 7% versus 19,60%,
– le régime de la revente : exonération de TVA sauf option versus taxation obligatoire sur le prix total au taux normal de 19,60%.
La qualification fiscale des travaux peut s’avérer délicate. L’obtention d’un rescrit permet alors de sécuriser l’analyse sous réserve que la demande contienne l’ensemble des informations nécessaires à l’analyse de l’administration fiscale.
Dans l’affaire soumise à la CAA de Marseille, le juge fiscal a confirmé le rappel de TVA opéré par l’administration fiscale qui après avoir considéré que les travaux conduisaient à un immeuble neuf, avait réclamé la différence entre la TVA sur le prix et la TVA sur marge encore applicable. Le marchand de biens invoquait un rescrit nominatif en sa faveur mais celui-ci s’est révellé inefficace, le juge ayant considéré la demande comme incomplète.
Bail commercial – cession de l’immeuble par le bailleur au profit du preneur – TPF : non prise en compte des travaux d’amélioration effectués par le preneur
Aux termes d’un arrêt du 4 décembre 2012, la chambre commerciale de la Cour de cassation a jugé que la vente d’un bien immobilier par le bailleur au locataire n’entraîne pas la résiliation anticipée du bail commercial mais son extinction par confusion des droits.
Dès lors, contrairement à ce qui était soutenu par l’administration fiscale, les constructions réalisées par le preneur ne deviennent pas la propriété du bailleur avant la vente de l’immeuble au preneur et la valeur des travaux effectués par le preneur n’entre donc pas dans l’assiette de la taxe de publicité foncière due au titre de cette vente.
Cet arrêt confirme la solution rendue le 12 juin 2012 en matière de bail à construction.
Construction ou Rénovation d’un immeuble par un non récupérateur de TVA ou par un récupérateur partiel – risques et optimisations en matière de TVA et de TPF
L’arrêt de la Cour de Justice de l’Union européenne analysé le 25 novembre met en lumière la complexité des problématiques TVA de livraisons à soi-même qui doivent être déclarées par des non-récupérateurs de TVA ou par des récupérateurs partiels.
Cet arrêt donne l’occasion de faire un point sur les enjeux financiers et fiscaux entourant les projets de construction ou de rénovation.
Q: Qui est concerné ?
R: Les bailleurs d’immeubles, les établissements de santé, les établissements financiers, les compagnies d’assurance, les organismes à but non lucratif, les établissements d’enseignements, les crèches, etc.
Q: Quelles sont les opérations de constructions à surveiller ?
R: Toutes les opérations de constructions, de reconstructions ou de rénovations lourdes.
Q: Ces opérations doivent-elle être suivies lorsque les travaux sont confiés à un tiers ?
R: Oui et même dans l’hypothèse où les travaux sont réalisés à 100% par un tiers.
Q: A quel moment faut-il revoir les aspects TVA et TPF ?
R: Idéalement, avant le dépôt de la demande de permis de construire ou, le cas échéant, avant l’acquisition du terrain ou de l’immeuble à démolir ou à rénover.
Q: Existe-t-il un intérêt à revoir un projet en cours ou un projet déjà terminé ?
R: Oui. Des optimisations peuvent encore être mises en œuvre pour des projets achevées depuis le 1er janvier 2008.
Q: Quels sont les risques liés à la TVA ?
R: Ne pas anticiper le surcoût de TVA généré par la livraison à soi-même. Créer un cas de double-taxation des travaux à la TVA.
Q: Quels sont les risques liés à la TPF ?
R: Se priver de l’engagement de construire pour éviter la livraison à soi-même. Ne pas organiser le suivi fiscal de l’engagement.
Q: Quelles sont les optimisations liées à la TVA ?
R: Obtenir le remboursement de la TVA pendant la durée des travaux. Limiter le surcoût de TVA post-achèvement.
Q: Quelles sont les optimisations pour des projets achevés depuis le 1er janvier 2008 ?
R: Certains dossiers montrent une surcollecte importante de TVA dont le remboursement peut encore être demandé. La jurisprudence récente met également en lumière de nouvelles pistes de réduction de coûts.
BOFIP : qualification fiscale des travaux
Nous venons de vérifier le contenu de la base BOFIP s’agissant de la qualification fiscale des travaux.
La qualification fiscale des travaux est un élément clef des dossiers de rénovation ou de transformation d’immeubles. En effet, selon que les travaux conduisent ou non à un immeuble neuf, les règles applicables sont totalement différentes.
En pratique, cet exercice de qualification doit être mené :
- Lors de l’acquisition d’un immeuble par un assujetti afin de déterminer si un engagement de construire peut ou non être rempli ;
- Lors de la vente par un assujetti d’un immeuble qui vient d’être rénové pour déterminer : du côté vendeur, si la TVA est ou non applicable de plein droit (en dehors des cas de dispense) et, du côté acheteur, si le taux de taxe de publicité foncière est de 0,715% ou de 5,09%.
Cette qualification a également une importance pour déterminer si les travaux de rénovation peuvent ou non bénéficier du taux réduit de la TVA lorsqu’ils portent sur un immeuble d’habitation achevé depuis plus de 2 ans.
A noter enfin, pour être complet, que les critères fiscaux de qualification des travaux sont également utilisés par les juristes afin de distinguer la VEFA de la VIR.
On aura donc compris qu’il s’agit d’une notion centrale et les commentaires de l’administration fiscale sont donc d’une importance particulière.
L’analyse de la base BOFIP met en lumière les éléments suivants :
1. La définition des travaux conduisant à la production d’un immeuble neuf ne change pas fondamentalement. Sont ainsi confirmées les modifications opérées par les instructions 3 A-3-10 et 3 A-9-10. Rappelons que depuis cette évolution majeure, les travaux qui remettent à neuf les postes de second œuvre ne peuvent pas, en tant que tels, conduire à un immeuble neuf dès lors qu’il n’existe pas de plancher non porteur avant et après les travaux. Toutefois, par tolérance, lorsque les travaux en cause ne bénéficient pas du taux réduit de la TVA sur l’habitation, il demeure néanmoins possible de prendre un engagement de construire lors de l’acquisition et, sous certaines conditions, de vendre l’immeuble rénové en bénéficiant du taux réduit de TPF de 0.715% lorsque chacun des cinq autres postes de second œuvre est remis à neuf pour plus de 2/3.
2. La base BOFIP contient de nombreux commentaires inappropriés. L’instruction 3 A-9-10 a procédé à un renvoi « général » à l’instruction 3 C-7-06 commentant le taux réduit de la TVA dans l’habitation. Or, la mise en œuvre de ce renvoi général dans BOFIP a conduit à de nombreux « copier-coller » ou « couper-coller » n’ayant aucun sens et pouvant même porter atteinte à la sécurité juridique. Il apparaît dès lors indispensable que l’administration fiscale procède à une nouvelle rédaction de ces commentaires.
3. Point positif : l’administration confirme les règles applicables lorsque des travaux de rénovation sont conduits par plusieurs propriétaires successifs : l’instruction 3 A-9-10 avait procédé à un renvoi général en citant les paragraphes 156 à 177 de l’instruction 3 C-7-06. Une telle référence n’incluait pas les commentaires concernant l’hypothèse dans laquelle le vendeur puis l’acquéreur procèdent à des travaux sur l’immeuble, qui, pour une raison de présentation apparaissaient au paragraphe 184 de l’instruction 3 C-7-06. La reprise du rescrit 2007/36 corrige cet oubli.
Vous trouverez ci-dessous le fichier de travail indiquant les modifications et les erreurs relevées.