TVA – hôtellerie et para-hôtellerie courte et longue durée – nouveau BOFIP
L’administration fiscale vient de commenter le nouveau régime de TVA applicable à l’hôtellerie et à la para-hôtellerie depuis le 1er janvier 2024 (voir notre article précédent).
On se souvient que ce nouveau régime fait suite à un avis rendu par le Conseil d’État le 5 juillet 2023 (voir notre article sur le sujet).
Compte tenu de la période estivale, nous avons résumé en quelques mots ce qui a principalement retenu notre attention. Ce commentaire ne remplace donc pas une lecture attentive des nouveaux commentaires.
1. Sous réserve d’une formalisation correcte de l’ensemble des documents affichés, communiqués ou signés entre (i) le bailleur et les occupants et (ii) le bailleur et ses éventuels prestataires, ces nouveaux commentaires favorisent une taxation large de ces activités même si le texte de l’article 261 D, 4° du CGI continue d’exiger « trois services sur quatre » pour taxer le service d’hébergement (i.e. le petit déjeuner, le nettoyage régulier des locaux, la fourniture de linge de maison et la réception, même non personnalisée, de la clientèle).
2. On relève une conception large de la réception de la clientèle (il n’est pas requis qu’elle soit offerte de manière permanente. Un prestataire d’hébergement peut proposer à ses clients un choix entre un accueil physique avec remise des clés en main propre et un accueil par l’intermédiaire d’un dispositif de communication électronique, avec mise à disposition des clés via une boîte à clés).
3. Certains services doivent être effectivement fournis pour être retenus pour justifier la taxation à la TVA :
– la réception de la clientèle ;
– la fourniture du linge de maison en début de séjour ;
– le nettoyage des locaux en début de séjour.
4. D’autres services (i.e. petit-déjeuner, renouvellement hebdomadaire du linge et nettoyage hebdomadaire des locaux lorsque la durée du séjour est supérieure ou égale à une semaine) peuvent n’être proposés que sur option via un prix supplémentaire et ne doivent donc pas être obligatoirement fournis, sous réserve de pouvoir démontrer (i) d’avoir les moyens nécessaires permettant d’assurer la fourniture de ces services à l’ensemble des clients hébergés et (ii) l’effectivité de la proposition.
5. Certaines restrictions sont rappelées / précisées :
– petit déjeuner : le distributeur automatique ne suffit pas ;
– nettoyage des locaux : la simple mise à disposition du client du matériel servant au nettoyage ne suffit pas ;
– fourniture du linge de maison : la mise à disposition d’une laverie, sans renouvellement du linge de maison, ne suffit pas.
6. Point important : Les mêmes commentaires sont applicables à la para-hôtellerie de courte durée ou de longue durée.
7. Le régime de la location des locaux à un exploitant est également précisé, s’agissant du taux de TVA applicable et du régime de taxation qui reprend, comme par le passé, un « découpage » du loyer : une partie du loyer est donc soumise de plein droit à la TVA à un taux réduit alors qu’une autre partie du loyer est soumise à la TVA, selon les règles habituelles (e.g. l’option à la TVA), au taux de 20%.
8. La tolérance prévue pour les EHPAD s’agissant des meubles des occupants est étendue aux résidences services.
Premières conclusions :
– nécessité de revoir ou d’adapter dès que possible l’ensemble des documents relatifs aux relations bailleurs-occupants et prestataires-bailleurs ;
– La para-hôtellerie longue durée peut continuer à être soumise à la TVA sans révolution majeure sous réserve d’une revue / adaptation rapide dans chaque situation dans la mesure où le nouveau régime peut créer des pièges (e.g. renouvellement hebdomadaire du linge) ;
– le Airbnb d’une nuitée + boîte à clef peut être soumis à la TVA sauf application de la franchise en base.
Nous souhaitons à nos lecteurs un bel été.
Consulter les nouveaux commentaires au BOFIP.
LF 2024 – TVA – Hôtellerie, parahôtellerie et résidences services (étudiantes, séniors, etc.) – Art. 84 (art. 10 ter PLF)
Le Gouvernement vient de déposer un amendement particulièrement important (amendement I-5374) afin de clarifier le régime de TVA actuellement applicable à la para-hôtellerie et aux résidences services, qui est devenu instable depuis l’avis du Conseil d’Etat du 5 juillet 2023, n°471877.
Cet amendement vise ainsi à sécuriser le régime de TVA applicable (i) au secteur hôtelier et aux secteurs ayant une fonction similaire et (ii) aux résidences services (résidences étudiantes, résidences séniors, etc.).
Sur un plan pratique, cet amendement propose une nouvelle rédaction de l’article 261 D, 4° du CGI en distinguant les prestations d’hébergement fournies dans le cadre du secteur hôtelier ou de secteurs ayant une fonction similaire (nouvelle rédaction du b) des locations de logements meublés à usage résidentiel dans le cadre de secteurs autres (nouveau b bis).
Une nouvelle rédaction de l’article 279 du CGI est également proposée afin de sécuriser, en miroir, le taux de 10% à chacun de ces deux types de locations.
Les prestations d’hébergement fournies dans le cadre du secteur hôtelier ou de secteurs ayant une fonction similaire seraient définies de manière identique (le 261 D, 4°-a du CGI qui traite du secteur hôtelier serait abrogé). Une telle démarche fait bien évidemment écho à la rédaction des dispositions de l’article 135, 2-a de la directive TVA selon lesquelles sont exclues de l’exonération de TVA « les opérations d’hébergement telles qu’elles sont définies dans la législation des États membres qui sont effectuées dans le cadre du secteur hôtelier ou de secteurs ayant une fonction similaire« . Le Gouvernement reprend ainsi la main en posant, comme la directive TVA le lui permet et le lui demande, les conditions pour taxer uniformément le secteur hôtelier et les secteurs ayant une fonction similaire.
Dans le cadre de cette définition, le Gouvernement propose deux conditions cumulatives, l’une liée à la durée (les prestations d’hébergement sont offertes au client pour une durée n’excédant pas trente nuitées, sans préjudice des possibilités de reconduction proposées) l’autre liée au caractère meublé et aux prestations connexes (les prestations d’hébergement comprennent la mise à disposition d’un local meublé et au moins trois des prestations suivantes : le petit déjeuner, le nettoyage régulier des locaux, la fourniture de linge de maison et la réception, même non personnalisée, de la clientèle).
Les locations de logements meublés à usage résidentiel dans le cadre de secteurs autres, qui, selon le Gouvernement, sont aujourd’hui incluses dans l’actuel article 261 D, 4°-b du CGI, seraient taxées si les locations de logements meublés sont assorties de trois des prestations suivantes : le petit déjeuner, le nettoyage régulier des locaux, la fourniture de linge de maison et la réception, même non personnalisée, de la clientèle. On ne changerait donc pas les pratiques actuelles.
La location indirecte (i.e. le bail avec un exploitant) continuerait également d’être taxée, comme aujourd’hui (nouvelle rédaction du c de l’article 261 D, 4° du CGI).
Ainsi qu’il ressort de l’exposé sommaire, « le présent amendement propose d’améliorer l’articulation entre le droit national et le droit européen, en en limitant les incidences sur les pratiques actuelles du secteur« .
Le Gouvernement rappelle ensuite que cet amendement est en ligne avec les obligations découlant de la directive TVA (taxation de plein droit du secteur hôtelier et des secteurs ayant une fonction similaire) et qu’il s’inscrit dans le cadre des possibilité ouvertes par la directive TVA (taxation dérogatoire, visant les autres secteurs, pour laquelle les États membres ont toute latitude, sous réserve de respecter le principe de neutralité).
Le Gouvernement rappelle également que les deux types de location peuvent être soumises au taux réduit de la TVA, chacune d’entre elles étant visée par un point différent de l’annexe III de la directive TVA (le point 10 : la location de biens immobiliers à usage résidentiel et le point 12 : l’hébergement fourni dans des hôtels et établissements similaires).
Le Gouvernement apporte enfin des précisions intéressantes sur la manière dont il convient de lire le droit actuel, qui aboutit (i) à une différence de traitement entre le secteur hôtelier et les secteurs ayant une fonction similaire, ainsi que (ii) une assimilation non pertinente entre les secteurs ayant une fonction similaire au secteur hôtelier et le secteur résidentiel (résidences étudiantes, séniors, etc…).
La conclusion de l’exposé de l’amendement est enfin particulièrement importante.
« Afin de mettre fin à ces incohérences, le présent amendement opère une distinction stricte entre, d’une part, le secteur hôtelier et les secteurs ayant une fonction similaire et, d’autre part, le secteur résidentiel. À cette fin, il se fonde sur un critère de durée des offres de location proposées aux clients d’au plus trente nuitées renouvelables (ainsi le professionnel devra permettre des locations pour des durées de moins de trente nuitées mais pourra permettre aux clients de réserver sur une durée plus longue), accompagnée de la réalisation de prestations connexes (trois prestations parmi le petit déjeuner, le nettoyage régulier des locaux, la fourniture de linge de maison et la réception de la clientèle). Cette construction juridique assure ainsi l’égalité de traitement pour l’ensemble des formes d’hébergement touristique, quelle que soit leur qualification (hôtel, auberge, résidence de tourisme, meublés de tourisme etc.). Par ailleurs, elle maintient inchangées les règles existantes pour le secteur résidentiel, qui sera soumis à TVA et bénéficiera du taux réduit si sont offertes des prestations connexes« .
Cette nouvelle approche peut être saluée car elle a le mérite de la clarté et devrait éviter les dérives jurisprudentielles qui ignorent que le texte actuel taxe également la « para-hotellerie longue durée ».
Les fondations du régime de TVA applicable aux résidences services seraient ainsi consolidées (taxation de plein droit et taux réduit de 10%).
Il restera à préciser les commentaires du BOFIP pour éviter des divergences de vue quant aux conditions dans lesquelles les services connexes doivent être exactement proposés (sur option ou non, avec un supplément de prix ou non, nature de l’accueil, etc.) afin de mettre un terme à un contentieux devenu abondant.
Assemblée nationale – première lecture (Art. 49.3) – Art. 10 ter
Sénat – Commission des finances
Sénat – Amendement N° I-256 rect.
Sénat – première lecture
Assemblée nationale – nouvelle lecture – Commission des finances
Assemblée nationale – nouvelle lecture – (Art. 49.3) – Art. 10 ter
Assemblée nationale – lecture définitive – (Art. 49.3) – Article 84
Entrée en vigueur : 1er janvier 2024 (art. 1, II-3° de la LF 2024)
TVA – Parahôtellerie (« 3 services sur 4 ») – incompatibilité partielle du régime actuel
Le Conseil d’Etat vient de rendre son avis à la suite de la question posée par la CAA de Douai (CAA Douai, 4ème chambre, 2 mars 2023, n°22DA01547). Cet avis n’est pas encore disponible sur le site du Conseil d’Etat. En revanche, les « bons mots » ont été rapportés ce jour par notre consoeur Alice Baillet. Nota du 6 juillet 2023 : lien vers l’avis.
Comme anticipé, le Conseil d’Etat suit les conclusions du rapporteur public que nous avons récemment résumées dans un précédent article.
1/ Le régime actuel est incompatible avec la directive TVA « en tant qu’il subordonne la soumission à la taxe sur la valeur ajoutée des activités de mise à disposition d’un local meublé ou garni à la condition que soient proposées au moins trois des quatre prestations accessoires qu’il énumère, dans des conditions similaires à celles proposées par les établissements hôteliers. »
2/ En revanche, le régime actuel demeure compatible avec les objectifs de la directive TVA « en tant qu'[les dispositions du CGI] excluent de l’exonération de taxe sur la valeur ajoutée qu’elles prévoient les activités se trouvant dans une situation de concurrence potentielle avec les entreprises hôtelières. »
3/ « Il appartient à l’administration, sous le contrôle du juge de l’impôt, d’apprécier au cas par cas si un établissement proposant une location de logements meublés, eu égard aux conditions dans lesquelles cette prestation est offerte, notamment la durée minimale du séjour et les prestations fournies en sus de l’hébergement, se trouve en situation de concurrence potentielle avec les entreprises hôtelières. »
Cet avis reprend l’analyse retenue dans un précédent arrêt (Conseil d’Etat, 8ème et 3ème sous-sections réunies, du 27 février 2006, 258807, mentionné aux tables du recueil Lebon), à ceci près que l’indice de la durée minimale du séjour est prise en compte.
Pour les dossiers contentieux, nous renvoyons au régime belge qui a été récemment modifié afin de pouvoir éclairer les discussions. Ce régime module en effet les prestations selon la durée du séjour.
Pour ceux qui cherchent de la sécurité, en attendant une réforme législative, à notre sens inévitable, les commentaires du BOFIP demeurent, en pratique, opposables. Ceux-ci présentent assez de souplesse pour sécuriser les dossiers de ceux qui s’y prennent suffisamment en amont (BOI-TVA-CHAMP-10-10-50-20 et BOI-TVA-CHAMP-30-10-50).
Nota du 11/10/2023 : pour une première application voir CAA de NANCY, 2ème chambre, 25/09/2023, 21NC01600, Inédit au recueil Lebon – Légifrance (legifrance.gouv.fr) qui met notamment en lumière l’importance d’avoir un rescrit compte tenu de la rédaction du BOFIP s’agissant de la notion d’accueil. Voir pour comparer le rescrit obtenu par la FEDARS.
Nota du 13/10/2023 : voir également TA Paris 1ère ch. 26 septembre 2023, n°2124589 – » S’il résulte effectivement de l’instruction que la mise à disposition du logement de M. B s’accompagnait de services tels que l’accueil dans les locaux le jour de l’arrivée des locataires, la mise à disposition de linge de maison et la possibilité, pour eux, de bénéficier d’heures de ménage pour un maximum de seize heures par mois– ce dont seuls les seconds locataires ont effectivement profité– ces éléments ne suffisent pas, en l’espèce, compte tenu notamment de la longue durée de ces locations, sans commune mesure avec les prestations d’hébergement généralement pratiquées par les hôtels, et de l’impossibilité qui s’en déduit de réserver l’appartement à la nuitée ou pour de courts séjours, à considérer que M. B se trouvait en situation de concurrence potentielle avec les entreprises hôtelières. Ainsi, [son activité de location de logement meublé] était exonérée [de TVA] en vertu des dispositions de l’article 261 D du CGI, transposant l’article 135 de la directive 2006/112/CE du Conseil du 28 novembre 2006 […] »
Nota du 8/03/2024 : voir pour une application favorable CAA de DOUAI, 4ème chambre, 22/02/2024, 22DA01716. « […] il résulte de l’instruction que la location du logement meublé appartenant à M. C… était disponible à la nuitée et qu’au demeurant les réservations au sein de la résidence de vacances concernaient majoritairement des courts séjours dont la durée moyenne s’établissait à trois nuitées environ au cours de la période en litige » . « […] à supposer même qu’il ne soit pas établi, comme le relève le service, que la fourniture du petit-déjeuner et le service de nettoyage en cours de séjour aient été proposés à titre optionnel au cours de la période litigieuse, il est constant que le nettoyage des locaux était effectué en début et en fin de séjour et il n’est pas contesté que la mise à disposition de ce logement s’accompagnait de prestations de réception téléphonique et d’accueil sur place ainsi que de la fourniture du linge de maison » . « […] l‘activité exercée par la société Holiday Suites s’exerçait dans un secteur particulièrement touristique » . « Au vu des conditions dans lesquelles la prestation de location du logement était ainsi offerte, en particulier la possibilité pour le client de réserver l’hébergement à la nuitée et les prestations fournies outre l’hébergement, l’activité exercée par la société Holiday Suites doit être regardée comme s’étant trouvée en concurrence potentielle avec les entreprises hôtelières. Dès lors que cette société se trouvait en situation d’une telle concurrence, c’est à tort que le service a remis en cause l’assujettissement de M. C… à la taxe sur la valeur ajoutée à raison de cette activité » .
TVA – Parahôtellerie (« 3 services sur 4 ») – conclusions du rapporteur public – « same player shoot again » ? Un nouveau régime en vue ?
En principe, la location de logements est exonérée de la TVA, y compris lorsque le logement est meublé.
En revanche, l’article 261 D, 4°-b du CGI prévoit une exception à cette exonération (i.e. la taxation à la TVA). Pour faire très simple, il s’agit de la location d’un logement meublé avec la fourniture de services parahôteliers.
Ce régime peut s’expliquer de deux manières.
D’un point de vue français, avant le 1er janvier 1991, la location meublée était soumise à la TVA (i.e. sans services parahôteliers) mais ne permettait pas au bailleur d’exercer un droit au remboursement de la TVA (la TVA déductible pouvait uniquement être imputée sur de la TVA collectée au titre des loyers). Lorsque la location de logement meublé est devenue exonérée de la TVA, le législateur a mis en place une exception à l’exonération pour la parahôtellerie.
D’un point de vue droit de l’Union, la directive TVA prévoit l’exonération de la location d’immeuble mais oblige les Etats membres à taxer « les opérations d’hébergement telles qu’elles sont définies dans la législation des États membres qui sont effectuées dans le cadre du secteur hôtelier ou de secteurs ayant une fonction similaire » (article 135, 2-a) de la directive TVA).
Le régime français a généré un abondant contentieux pour deux raisons. La première tient au fait que des bailleurs ont souhaité être soumis à la TVA alors qu’ils ne remplissaient pas les conditions posées par le CGI. La seconde, que les conditions requises par le CGI ne permettaient pas d’atteindre l’objectif posé par la directive, à savoir taxer les locations en concurrence avec l’hôtellerie. Autrement dit, les conditions posées pour être taxées étaient telles qu’elles permettaient à des bailleurs en concurrence avec l’hôtellerie d’être exonérés de la TVA.
Après que le Conseil d’Etat ait une première fois déclaré le texte français incompatible avec la directive TVA, les critères de taxation ont été modifiés par la loi de finances rectificative pour 2002 pour donner la version que nous connaissons aujourd’hui et que nous résumons comme « logement meublé avec trois services parahôteliers sur quatre ».
En raison de l’arrivée des plateformes de location que nous connaissons tous, chacun peut arriver à la conclusion que certaines locations peuvent être exonérées de la TVA, à défaut de remplir ces critères actuellement exigés par le CGI, alors même que la concurrence avec le secteur hôtelier ne fait aucun doute.
C’est dans ce contexte que la CAA de Douai a posé une question au Conseil d’Etat sur la compatibilité du texte français avec la directive TVA (CAA Douai, 4ème chambre, 2 mars 2023, n°22DA01547).
Avec notre confrère Paul Duvaux, nous sommes allés écouter les conclusions du rapporteur public cet après-midi.
Il ne s’agit pas donc encore de l’arrêt du Conseil d’Etat (qui pourrait retenir une autre analyse).
A l’écoute de ces conclusions, pas de réelles surprises.
Après avoir rappelé la dimension politique du sujet (incidences sur l’hôtellerie et sur l’accès au logement) ains que l’effet d’aubaine de ce régime (« subvention indirecte par l’Etat »), le rapporteur public a rappelé les obligations qui pesaient sur la France en raison de la directive TVA et notamment l’obligation d’interpréter largement l’exception à l’exonération.
Il a logiquement conclu à l’incompatibilité du régime actuel dans le prolongement des arrêts déjà rendus par le Conseil d’Etat : Conseil d’Etat, 9 / 10 SSR, du 11 juillet 2001, 217675, publié au recueil Lebon et Conseil d’Etat, 8ème et 3ème sous-sections réunies, du 27 février 2006, 258807, mentionné aux tables du recueil Lebon).
C’est ce dernier arrêt rendu dans le cadre du régime antérieur à celui instauré par la loi de finances pour 2002, qui doit retenir notre attention puisque c’est probablement ce que pourrait à nouveau juger le Conseil d’Etat : « […] ces dispositions sont incompatibles avec les objectifs de l’article 13 précité de la sixième directive [la directive TVA], en tant qu’elles subordonnent l’exonération des prestations de mise à disposition d’un local meublé ou garni à ces conditions cumulatives ; qu’en revanche, ces dispositions demeurent compatibles avec les objectifs dudit article en tant qu’elles excluent de l’exonération de taxe sur la valeur ajoutée qu’elles prévoient les activités se trouvant dans une situation de concurrence potentielle avec les entreprises hôtelières ». Cette solution permet en effet de sauver le noyau dur de la taxation à la TVA sur la base du droit français, sans faire appel à l’effet direct des dispositions de la directive TVA.
Ce régime prétorien reposerait donc sur une analyse, au cas par cas, en utilisant des indices pour vérifier la concurrence avec l’hôtellerie. Parmi ces indices, il y aurait les services para-hôteliers que nous connaissons (le petit déjeuner, le nettoyage régulier des locaux, la fourniture de linge de maison et la réception, même non personnalisée, de la clientèle), mais également, selon le rapporteur public, la durée de la location et ses modalités.
A notre avis, il est évident que le besoin de sécurité juridique et les nécessités de la gestion de la taxe, conduiront le législateur à prochainement prévoir une nouvelle rédaction de l’article 261 D, 4°-b du CGI.
A cette occasion, le législateur pourrait, par exemple, exiger des services parahôteliers différents selon la durée du séjour afin de pouvoir dorénavant taxer les locations d’une seule nuit avec la seule fourniture de linge et continuer de taxer l’hôtellerie « longue durée » dans les conditions que nous connaissons aujourd’hui (résidences étudiantes, résidences services sénior, EHPAD, etc.).
A suivre !
Nota du 24 juin 2023 :
Pour celles et ceux qui veulent aller plus loin, vous pouvez consulter :
– la proposition de directive VIDA s’agissant de la taxation à la TVA des services de transport et d’hébergement rendus par des fournisseurs non assujettis sur des plateformes (page en anglais mais qui renvoie vers les textes qui peuvent être consultés en français) ;
– la note du Conseil des prélèvements obligatoires dans sa séance du 25 mai 2023 relative à cette proposition de directive ;
– le régime applicable en Belgique.