TAB – TVA sur marge – condition d’identité – terrain d’assiette d’un bâtiment
En ce qui concerne le contentieux de la TVA sur marge et la condition d’identité, dans sa composante juridique, le Conseil d’Etat vient de préciser que pour qu’un terrain et un bâtiment situés sur une même parcelle cadastrale puissent être distingués d’un point de vue de TVA (i.e. un terrain à bâtir, d’une part, et un bâtiment et son terrain d’assiette, d’autre part), il est nécessaire que le document d’arpentage qui procède à la division effective des parcelles soit antérieur à l’acte d’achat.
Au cas particulier, seule la déclaration préalable de division et la décision de non opposition étaient antérieures à l’acte d’acquisition par l’acheteur-revendeur qui souhaitait appliquer la TVA sur marge sur la revente du terrain à bâtir.
La bénéfice de la TVA sur marge a ainsi été refusé le Conseil d’Etat.
A noter que ces précisions interviennent en dehors des commentaires de l’administration fiscale, c’est-à-dire en interprétant le droit. Les commentaires de l’administration fiscale ont en effet été publiés postérieurement aux années en litige, ce qui ne permettait pas de les invoquer.
Si nous devions comparer la solution retenue par le Conseil d’Etat et celle admise par l’administration fiscale, nous pourrions constater que l’analyse du Conseil d’Etat rejoint celle de l’administration fiscale initialement exprimée dans Rép. min. n° 94061 : JOAN, 30 août 2016, De la Raudière ou Rép. min. n° 91143 : JOAN, 30 août 2016, Carré.
Cela étant, l’administration fiscale s’était ensuite montrée plus libérale dans des réponses postérieures en admettant la prise en considération d’un permis d’aménager faisant apparaître de manière précise les divisions envisagées, obtenu préalablement à l’acquisition par l’acheteur-revendeur (Rép. min. n° 96679 : JOAN, 20 sept. 2016, Bussereau ou Rép. min. n° 94538 : JOAN, 20 sept. 2016, Savary).
A noter que ces réponses n’évoquaient pas la déclaration préalable de division.
Consulter CE 17 juin 2022, n° 443893, « Inédit au recueil Lebon »
Consulter également notre tableau récapitulatif mis à jour
Nota du 5 octobre 2022 : la CAA TOULOUSE, 1ère ch., 29/09/2022, n°21TL00804 retient une analyse plus sévère que le Conseil d’Etat en exigeant un achat séparé du bâtiment et du terrain et en refusant de prendre en considération des documents d’arpentage effectuant une division cadastrale dressés antérieurement aux acquisitions. Ici encore, il s’agissait d’opérations qui ont eu lieu avant la publication des réponses ministérielles rappelées ci-dessus.
TVA – sociétés françaises ayant pour seule activité la location nue d’immeubles ou de locaux professionnels situés à l’étranger – déduction de la TVA grevant les dépenses encourues en France
Une question écrite a été déposée afin de sécuriser les droits à déduction de TVA des sociétés établies en France n’ayant que pour seule activité la location nue d’immeubles ou de locaux professionnels situés dans un autre État membre de l’UE, cette dernière location étant imposable à la TVA localement, soit de plein droit, soit sur option, selon la législation applicable.
La mécanique des textes est telle que ces sociétés pourraient se voir contester la déduction de la TVA grevant les dépenses encourues en France (dépenses d’expert-comptable, par exemple), ce qui serait contraire au principe de neutralité.
Consulter la QE Grau AN N° 44979 du 22 mars 2022
TVA – art. 257 bis – TVA facturée à tort – personne physique – loueur en meublé – résidence de tourisme
Un arrêt rendu par la CAA de Bordeaux rappelle que les dispositions de l’article 257 bis sont obligatoires et que si la TVA est alors facturée, celle-ci est facturée à tort et ne peut pas donner lieu à un remboursement chez l’acquéreur, même si le vendeur a versé à l’Etat la TVA indiquée dans l’acte.
Au cas particulier, il s’agissait d’une vente entre personnes physiques exerçant une activité de loueur en meublé dans une résidence de tourisme.
Pour mémoire, lorsqu’une telle situation se produit, il convient de mettre en place une procédure de régularisation de TVA facturée à tort.
Consulter la CAA de BORDEAUX, 7ème ch., 10 février 2022, 20BX01000, « Inédit au recueil Lebon »
Dans le même sens, voir notre article du 31 mai 2016.
TVA sur marge – réponse ministérielle sécurisant temporairement le régime de la TVA sur marge (suite de l’arrêt Icade Promotion)
A la suite de l’arrêt Icade Promotion, une question écrite avait été déposée afin de sécuriser le régime de la TVA sur marge s’agissant des opérations en cours (voir notre article du 9 novembre 2021).
L’idée était de pouvoir continuer à appliquer les commentaires de l’administration fiscale tant que celle-ci ne les modifie pas alors que certains de ces commentaires peuvent être contraires à la solution rendue dans l’affaire Icade Promotion.
La réponse ministérielle du 1er février 2022 apporte la réponse souhaitée.
« Après que le juge national aura tranché le litige national en cours, en concertation avec les acteurs du secteur de l’immobilier, l’administration tirera les conséquences de cet arrêt de la Cour par une mise à jour de ses commentaires publiés au Bulletin officiel des finances publiques – impôt (BOFiP-I) sous la référence BOI-TVA-IMM-10-20-10. À cet égard, aussi longtemps que cette mise à jour n’est pas intervenue, les assujettis revendeurs bénéficient pleinement de la garantie prévue par les dispositions de l’article L. 80 A du livre des procédures fiscales (LPF). Cette garantie permet au contribuable de bonne foi de se prévaloir de l’interprétation faite par l’administration d’un texte, même contraire au droit de l’Union tel que précisé par la jurisprudence de la CJUE. En outre, cette garantie interdit à l’administration fiscale de remettre en cause l’application par un redevable d’un texte fiscal effectuée conformément à l’interprétation que l’administration avait fait connaître par ses instructions ou circulaires publiées et qu’elle n’avait pas rapportées à la date des opérations en cause (avis « Monzani » n° 353782 du Conseil d’État du 8 mars 2013). Enfin, le Gouvernement entend préciser que cette mise à jour de la doctrine fiscale n’aura pas vocation à remettre en cause les équilibres économiques des opérations en cours. Ainsi, dans le cadre de la revente d’un bien immobilier intervenant postérieurement à la date de publication des futures précisions doctrinales tirant les conséquences de la jurisprudence de la CJUE, l’assujetti revendeur pourra continuer à se prévaloir de l’actuelle doctrine fiscale si son acquisition du bien considéré est intervenue ou a fait l’objet d’un compromis de vente antérieurement à cette publication. »
En clair, les commentaires de l’administration fiscale demeurent opposables s’agissant des ventes qui interviendront avant la mise à jour du BOFiP-I. Le fait que ces commentaires puissent être contraires au droit de l’Union est sans incidence.
Point important. Les commentaires demeurent opposables lorsque les ventes interviennent après la mise à jour du BOFiP-I si l’acquisition du bien est intervenue ou a fait l’objet d’un compromis de vente antérieurement à la mise à jour.
Selon nos informations, la notion d’assujetti revendeur qui est visée dans la réponse ministérielle vise tout assujetti susceptible d’appliquer le régime de la TVA sur marge. En conséquence, est sans incidence sur la portée de la réponse ministérielle, le fait que l’immeuble vendu ait été comptabilisé en stock ou en immobilisation.
Enfin, n’oublions pas que les commentaires de l’administration fiscale peuvent ne pas être appliqués, les opérateurs préférant appliquer la solution rendue par la CJUE dans l’affaire Icade Promotion.
Les clauses fiscales pourront idéalement être rédigées de telle manière qu’elles permettent de bien comprendre les « règles » (commentaires de l’administration ou règles de droit) appliquées.
Consulter la réponse ministérielle Grau N°42486 AN 1er février 2022.