TVA – crise du logement
A noter le dépôt le 11 avril 2024 d’une proposition de loi portant mesures d’urgence visant à faire face à la crise du logement à l’Assemblée nationale.
L’article 8 de ce texte propose d’ouvrir aux investisseurs individuels le taux de TVA de 10 % pour la construction de logements intermédiaires (modification de l’article 279-0 bis A du CGI pour ajouter les personnes physiques aux personnes morales comme destinataires des livraisons de logements).
A noter également le rapport à venir le 30 avril prochain de la Mission d’information relative à la crise du logement au Sénat, dont nous recommandons fortement le visionnage des différentes auditions.
A suivre, par ailleurs, la question écrite déposée par Romain Daubié (question N° 15559). Pour mémoire, Romain Daubié est l’auteur de la proposition de loi visant à faciliter la transformation des bureaux en logements qui a été adoptée en première lecture le 7 mars 2024 par l’Assemblée nationale et dont l’étude par le Sénat devrait commencer le 7 mai. Cette proposition de loi prévoirait notamment, la soumission à la taxe d’aménagement, sur décision des collectivités locales, des opérations de transformation des bureaux en logement (art. 2 et 3) et exonérerait de la taxe annuelle bureau les « locaux à usage de bureaux qui font l’objet d’un projet de transformation en logements ayant fait l’objet d’un dépôt de permis de construire au cours de l’année précédant la déclaration de la taxe » (art. 3 bis A (nouveau)).
Enfin, le projet de loi concernant le logement devrait, quant à lui, être déposé au Sénat le 17 juin prochain.
LF 2024 – LLI (logement intermédiaire) – TVA à 10% – Art. 71, III-12° et 13° (art. 6, II-5° et 5°bis PLF)
Nouvelle rédaction du 5/1/2024
Les logements intermédiaires bénéficient notamment de deux dispositifs fiscaux : un taux réduit de TVA de 10% et une exonération de longue durée de taxe foncière sur les propriétés bâties (TFPB), récemment transformée en crédit d’impôt sur les sociétés.
En application de l’article 279-0 bis A du CGI, les livraisons de logements locatifs intermédiaires respectant les plafonds de ressources, de loyers et de localisation prévus par l’article 199 novovicies du CGI, bénéficient d’un taux réduit de TVA de 10 % lorsqu’ils sont acquis par certains opérateurs.
Le 4° du I de cet article prévoit que les logements sont soumis à une contrainte dite de « mixité sociale » : ils doivent être intégrés dans un ensemble immobilier comprenant 25 % de logements locatifs sociaux. Ce critère ne s’applique pas si la commune comprend elle-même plus de 25 % de logements locatifs sociaux, ou si les terrains des logements à construire sont situés dans un quartier prioritaire de la politique de la ville (QPPV).
En application du 5° du I de cet article, les logements doivent résulter d’une construction nouvelle ou d’une transformation de locaux affectés à un usage autre que l’habitation au moyen de travaux qui rendent l’immeuble comme neuf au sens du 2° du 2 du I de l’article 257 du CGI (i.e. immeuble neuf au sens de la TVA).
L’article 71, III-12° apporte plusieurs aménagements.
Le dispositif est étendu aux résidence-services mentionnée à l’article L. 631‑13 du code la construction et de l’habitation exploitées en exonération de TVA et adapte en conséquence, la condition relative au plafond de loyers (art. 279-0 bis A, I-1° du CGI). A cet égard, il est prévu que la condition de mixité ne s’applique pas à ces résidences (art. 279-0 bis A, I-4° du CGI).
En ce qui concerne les bénéficiaires du dispositif, l’application du taux réduit de TVA de 10% est étendue à l’ensemble des personnes morales (art. 279-0 bis A, I-2° du CGI) : « Le destinataire de la livraison ou, en cas de démembrement, l’usufruitier est une personne morale »
S’agissant du périmètre d’application du taux réduit, l’application du taux réduit de TVA de 10% est étendue à de nouveaux territoires (art. 279-0 bis A, I-3° du CGI):
– territoire de communes de réindustrialisation où sont réalisés des projets d’intérêt national majeur, au sens du I de l’article L. 300-6-2 du code de l’urbanisme
– périmètre d’une grande opération d’urbanisme, au sens de l’article L. 312-3 du même code, comportant la transformation d’une zone d’activité économique, au sens de l’article L. 318-8-1 dudit code, d’une opération programmée d’amélioration de l’habitat prévue à l’article L. 303-1 du code de la construction et de l’habitation ou d’une opération de requalification de copropriétés dégradées prévue à l’article L. 741-1 du même code
– territoire des communes qui ont conclu un contrat de projet partenarial d’aménagement mentionné à l’article L. 312-1 du code de l’urbanisme ou une convention d’opération de revitalisation de territoire prévue à l’article L. 303-2 du code de la construction et de l’habitation
Remarque : la localisation, dans sa rédaction résultant de la LF 2024, est apprécié au 31 décembre 2024 pour les logements qui remplissent les conditions suivantes :
1° Une demande de permis de construire a été déposée au plus tard le 3 octobre 2023 ;
2° L’ouverture du chantier est intervenue avant le 31 décembre 2024 (art. 71, IX LF 2024)
En ce qui concerne les catégories de logements, le bénéfice du taux réduit de TVA de 10% est étendue à l’acquisition-amélioration sous conditions de performance énergétique.
Ainsi, les logements peuvent résulter d’une « opération d’acquisition-amélioration au sens du 6° du I de l’article 278 sexies dans des bâtiments ou parties de bâtiment à usage résidentiel qui conduit à une amélioration de la performance énergétique dans des conditions déterminées par arrêté conjoint du ministre chargé du budget, du ministre chargé de l’énergie et du ministre chargé du logement. » (art. 279-0 bis A, I-5°-b) du CGI)
A noter que bénéficient également du taux réduit de TVA de 10% les travaux d’amélioration relevant de l’acquisition-amélioration réalisés par l’acquéreur sur les immeubles mentionnés ci-dessus (art. 279-0 bis A, I bis du CGI).
Le point de l’acquisition-amélioration soulève des questions.
1. On se souvient que les travaux dans l’habitation sont déjà largement soumis au taux de 10% sans devoir respecter ces conditions supplémentaires (article 279-0 bis du CGI) voire d’un taux plus favorable de 5,5% lorsqu’il s’agit de travaux précisément liés à la performance énergétique (article 278-0 bis A du CGI). Comment articuler le taux de 10% prévu par l’article 279-0 bis A et le taux de 5,5% prévu à l’article 278-0 bis A du CGI ? Faut-il comprendre que le taux de 5,5% demeure, en tout état de cause, applicable (voir rapport commission des finances – AN – nouvelle lecture), étant précisé que le Sénat, en première lecture, avait modifié le texte pour l’indiquer expressément ?
2. En pratique, les travaux seront-ils facturés à 10% par les entreprises de travaux ou s’agira-t-il d’une livraison à soi-même de travaux lorsqu’ils ne conduisent pas à un immeuble neuf au regard de la TVA ? Le texte ne le précise pas alors que, à titre de comparaison, l’article 278 sexies A du CGI l’indique expressément s’agissant des logements locatifs sociaux.
3. Quel est le régime applicable lorsque les travaux de rénovation portant sur un bâtiment à usage résidentiel conduisent à un immeuble neuf au regard de la TVA ?
4. Quel est le régime applicable lorsque les travaux de rénovation ne conduisent pas à un immeuble neuf lorsqu’il s’agit d’une transformation de locaux affectés à un usage autre que l’habitation sachant que les taux de 10% et de 5,5% sont d’ores et déjà applicables à certains travaux sur la base des articles rappelés ci-dessus ?
5. La VIR n’est pas été visée. On se souvient de l’ajout de la VIR au régime de l’acquisition-amélioration portant sur logements locatifs sociaux depuis la loi de finances pour 2022.
6. La VEFA portant sur un bâtiment à usage résidentiel lorsque les travaux conduisent à un immeuble neuf au sens de la TVA, non plus.
Projet de loi de finances – art. 6
Assemblée nationale – première lecture – rapport commission des finances
Assemblée nationale – première lecture – amendement n°I-5302 (résidence-services)
Assemblée nationale – première lecture – amendement n°I-3376 (amendement rédactionnel)
Assemblée nationale – première lecture – art. 6 modifié
Sénat – première lecture – rapport commission des finances
Sénat – première lecture – amendement n° I-1548 rect. bis (personne morale)
Sénat – première lecture – amendement n° I-2217 rect. bis (localisation date d’appréciation)
Sénat – première lecture – amendement n° I-1046 rect. (TVA à 5,5% – non repris par AN)
Sénat – première lecture – art. 6 modifié
Assemblée nationale – nouvelle lecture – rapport commission des finances
Assemblée nationale – nouvelle lecture – art. 6 modifié (location meublée)
Entrée en vigueur : 1er janvier 2024 (art. 1, II-3° de la LF 2024) sous réserve de la règle relative à la localisation (voir la remarque ci-dessus)
TVA – LLI – Clarification du dispositif en cas de démembrement de propriété
Des précisions importantes viennent d’être apportées par une réponse ministérielle Louwagie (Rep. Louwagie JO AN 11 avril 2023, N° 378).
Cette réponse sécurise, en effet, le taux de 10% sur la constitution de la nue-propriété.
En contrepartie, cette réponse précise que ce bénéfice a pour corrolaire le suivi du mécanisme de l’éventuel complément d’impôt prévu à l’article 284, II bis du CGI.
Ce « contrat » (taux réduit contre mécanisme de suivi) s’écrit dans le cadre d’une tolérance doctrinale et non pas en application des textes du CGI, à défaut pour l’article 284 du CGI d’avoir été adapté à la situation du démembrement.
Cette réponse ministérielle est donc particulièrement importante.
Selon nos informations, cette réponse ajoute également, dans une formulation qu’on aurait préférée plus explicite, que l’extinction de l’usufruit au-delà d’une d’une durée de 15 ans suivant le fait générateur de la construction permet d’éviter tout complément d’impôt pour les parties.
Le nu-propriétaire, redevenu plein propriétaire, pourra donc vendre, occuper ou encore donner en location à l’extinction de l’usufruit qui, rappelons-le, est d’une durée obligatoire de 15 ans.
Dernier point intéressant. la réponse prend soin de préciser que, pendant la durée de l’usufruit, les cessions par le nu-propriétaire sont sans incidence dès lors que l’usufruitier poursuit l’activité locative dans les conditions prévues par l’article 279-0 bis A du CGI.
TVA – LLI – une question écrite a été déposée pour clarifier le dispositif en cas de démembrement de propriété
Une question écrite a été déposée afin, notamment, de clarifier les conséquences de l’extinction d’un usufruit, sur le taux de TVA de 10 % appliqué lors d’un démembrement de propriété constitué ab initio, portant sur des logements locatifs intermédiaires.
Le taux de TVA de 10 % trouve, en effet, à s’appliquer aux démembrements de propriété portant sur des logements locatifs intermédiaires et constitués ab initio par un promoteur immobilier lorsque certaines conditions sont cumulativement remplies (article 279-0 bis A du CGI).
L’économie de TVA pourrait devoir être intégralement reversée lorsque l’extinction de l’usufruit intervient avant les vingt ans qui suivent le fait générateur de l’opération (durée prévue par l’article 284, II bis du CGI).
La question écrite vise également à obtenir des précisions s’agissant des conséquences de la cession, par le nu-propriétaire, de son droit de nue-propriété.
Consulter la QE GRAU AN N°44978 du 22 mars 2022
Consulter la réponse dans l’article suivant.