Baux soumis à la TVA sur option – publication des commentaires administratifs
L’administration fiscale vient de commenter au BOFIP le changement de date d’effet de l’option à la TVA formulée au titre des locations de locaux nus à usage professionnel (art. 260, 2° du CGI). Pour mémoire, le décret n° 2014-44 du 20 janvier 2014, qui a modifié l’article 194 de l’annexe II au CGI, prévoit désormais que l’option produit effet à compter du 1e jour du mois au cours duquel elle est formulée (voir sur ce point notre article du 22 janvier) .
Le BOI-TVA-CHAMP-50-10-20140404 prend donc acte de cette modification.
Ces commentaires présentent un intérêt en ce qu’ils continuent de prévoir que :
– l’option peut être formulée alors même que celui qui opte n’est pas encore propriétaire de l’immeuble ou n’en a pas encore la jouissance (§ 230),
– l’option peut être transférée à l’occasion d’une substitution ou d’une transmission d’universalité (§ 240).
Baux soumis à la TVA sur option – effet de la lettre d’option au premier jour du mois de l’envoi
Contrairement à une idée répandue, les baux à usage professionnel ne sont pas, par principe, soumis à la TVA de plein droit (article 261 D, 2° du CGI). En fait, sauf cas particuliers, il est nécessaire de formuler une lettre d’option auprès de l’administration fiscale (article 260, 2° du CGI). En cas d’oubli, la location demeure exonérée de la TVA et la TVA facturée au locataire n’a aucune valeur (« TVA facturée à tort »), ce qui prive le bailleur du droit de récupérer la TVA sur les dépenses grevant l’immeuble et le locataire de la déduction de la TVA grevant le loyer.
Depuis le décret n° 2010-1075 du 10 septembre 2010, la date d’effet de la lettre d’option a été reportée au 1er jour du mois suivant celui au cours duquel l’option est formulée (effet au 1er janvier 2014 d’une lettre d’option envoyée au cours du mois de décembre 2013) alors qu’auparavant l’administration fiscale admettait que l’option produise son effet au 1er jour du mois au cours duquel elle était formulée (voir Documentation de Base 3 A 513 n°1) (effet au 1er janvier N d’une lettre d’option envoyée au cours du mois de janvier N)
Le décret n° 2014-44 du 20 janvier 2014 publié au JO du 22 permet de revenir au régime antérieur dès lors qu’il prévoit que l’option produit à nouveau effet à compter du 1e jour du mois au cours duquel elle est formulée.
En raison des modalités d’entrée en vigueur de ce décret, le nouveau régime s’applique aux options formulées à compter de demain, jeudi 23 janvier. En revanche, toutes les options formulées depuis le 1er janvier jusqu’à aujourd’hui continuent à produire effet au 1er février (alors qu’une option formulée demain produira effet au 1er janvier :-).
Ce retour au régime antérieur est une simplification évidente.
Le régime mis en place par le décret du 10 septembre 2010 a toutefois eu des effets positifs pratiques qu’il serait dommage d’oublier :
- L’envoi d’une lettre d’option avant l’achat de l’immeuble permet de joindre la lettre en annexe de l’acte : cette option ne se perd donc pas et la dispense de TVA de l’article 257 bis, lorsqu’elle est applicable, est sécurisée. Il apparaît donc opportun de continuer à opter, notamment pour cette raison, avant la signature de l’acte authentique.
- L’instruction 3 A-8-10 qui a commenté ce régime a officialisé la possibilité de transférer la lettre d’option à l’occasion d’une vente soumise à la dispense de TVA de l’article 257 bis. Dans certains dossiers, cette possibilité présente encore un avantage certain.
Le Conseil d’Etat valide le principe de la double imposition des crédit-preneurs au titre des impôts locaux assis sur la valeur ajoutée
Le Conseil d’Etat a confirmé, dans une décision récente du 10 juin 2013 (CE 9˚ et 10˚ s-s-r., 10 juin 2013, n˚ 351 657) que les redevances de crédit-bail ne pouvaient pas être déduites de la valeur ajoutée servant à la détermination de la cotisation minimale de taxe professionnelle (et actuellement de la cotisation sur la valeur ajoutée des entreprises -CVAE), alors même que les biens pris en crédit-bail sont donnés en sous-location à des utilisateurs finaux.
La Haute juridiction a validé la position de l’administration fiscale qui a refusé, pour la détermination de la valeur ajoutée servant au calcul de la cotisation minimale de taxe professionnelle, la déduction des loyers afférents à des matériels informatiques pris en crédit-bail par une société et donnés en sous-location.
Le contribuable se prévalait, au cas particulier, de la situation de double imposition induite par la position du Service dans la mesure où (i) il ne pouvait pas déduire les redevances de crédit-bail versées au crédit-bailleur et, dans le même temps, (ii) il devait retenir dans ses produits les loyers qui lui étaient versés par les sous-locataires. Les arguments avancés en défense tendaient à souligner la différence de traitement avec les contribuables qui choisissaient de recourir à des locations simples et qui bénéficiaient, à ce titre, d’un régime de neutralité fiscale dans la mesure où, en contrepartie de l’imposition des sous-loyers perçus, il étaient autorisés à déduire les loyers versés au bailleur principal.
Le Conseil d’Etat a considéré qu’un crédit-preneur et un locataire de longue durée ne pouvaient être regardés comme étant dans une situation juridiquement et économiquement analogue et, par suite, comparable. Ainsi, le loyer versé, dans le cadre d’un crédit-bail, a pour contrepartie non seulement la disposition du bien, mais aussi le droit d’opter pour son acquisition au terme du crédit, constituant ainsi une modalité de financement du bien. En revanche, dans le cadre d’une location simple, le loyer a pour seule contrepartie la disposition du bien mais ne permet pas d’acquérir un élément de patrimoine.
Cette règle, particulièrement pénalisante, reste aujourd’hui valable pour la détermination de la valeur ajoutée servant d’assiette à la liquidation de la CVAE. La double imposition qui en est issue trouve, désormais, son fondement dans le texte de l’article 1586 sexies du CGI et n’est donc susceptible d’être évitée que par le biais d’une évolution législative.
Cela étant souligné, il convient d’observer que l’entrée dans le champ d’application de la Contribution Economique Territoriale (CET) des activités de location et de sous-location nue d’immeubles à usage professionnel s’est accompagnée par la mise en place de plusieurs dispositifs d’atténuation de la charge fiscale des contribuables exerçant, à titre principal ou accessoire, de telles activités. Ainsi, les sociétés qui prennent en crédit-bail des immeubles nus professionnels et les donnent en sous-location peuvent, sous certaines conditions, bénéficier de plusieurs dispositifs tels l’écrêtement ou le lissage pour atténuer leur charge fiscale liée à la CET. Si le dispositif du lissage s’étend jusqu’à l’horizon 2019, le mécanisme de l’écrêtement des pertes prend fin en 2013. Les réclamations devront, pour ce dernier, être déposées au plus tard le 31 décembre 2013 (pour la CET 2012) et le 31 décembre 2014 (pour la CET 2013).
Pascale Prince et Soufiane Jemmar, avocats, TAJ société d’avocats, membre de Deloitte Touche Tohmatsu limited