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Posts from the ‘Marchands de biens’ Category

31
Juil

DMTO – Engagement de construire – Exonération de droits – Teneur de l’engagement


Est-il nécessaire d’être en mesure de prouver l’existence d’un projet de construction abouti pour valablement souscrire un engagement de construire ?

Sous réserve d’un droit fixe de 125 EUR, l’engagement de construire permet à un acquéreur assujetti à la TVA d’exonérer l’acquisition d’un immeuble de droits de mutation. L’exonération n’est cependant définitivement acquise que si le porteur de l’engagement justifie de son exécution à l’échéance, c’est-à-dire dans les 4 ans de l’acquisition sauf obtention d’éventuelles prorogations annuelles. Dans le cas où la justification n’est pas apportée, le porteur de l’engagement doit payer les droits de mutation dont il a été dispensés ainsi que l’intérêt de retard au taux de 0,4% par mois.

Le système est donc prévu pour dissuader les engagements de pure complaisance.

Comment faut-il dès lors traiter les dossiers dans lesquels l’acquéreur n’a soit pas l’intention de construire soit ne peut pas techniquement mener à bien un projet de construction ?

Ces cas ne sont pas rares et méritent que l’on s’y attarde un instant.

Il y a tout d’abord le cas pittoresque de l’engagement de construire pris sur un terrain non à bâtir.

Il y a plus fréquemment l’engagement pris sur un lot de copropriété dont les seuls droits qui y sont attachés ne permettent pas de réaliser le projet de construction objet de l’engagement.

Il y a ensuite l’engagement de construire pris par un non constructeur mais par un aménageur qui va démolir les constructions actuelles et préparer le terrain pour des constructions futures qui seront réalisées par des sous-acquéreurs.

Il y a enfin l’engagement de construire pris par un acquéreur assujetti qui n’a pas un projet arrêté concernant l’immeuble mais qui souhaite conserver la plus grande souplesse fiscale pour mener à bien tout projet de construction ou de revente dans les 4 ans de l’acquisition.

A la lecture de cette énumération, on comprend que ces cas recouvrent des acquéreurs aux intentions différentes :

– l’acquéreur qui fait un pari sur l’avenir. Il en va ainsi de l’acquisition du terrain non à bâtir ou de la première acquisition d’un lot de copropriété dont on souhaite acquérir ultérieurement le reste des lots ;

– l’acquéreur qui entend faire jouer à plein le transfert de l’engagement de construire au futur constructeur assujetti. Il en va notamment de l’aménageur.

– l’acquéreur expérimenté qui fait une application avisée des règles fiscales.

Dans la mesure où le code général des impôts (article 1594-0 G) ne prévoit pas de condition tenant :

– au caractère constructible du terrain. L’administration fiscale confirme à cet égard la possibilité expresse de prendre un engagement de construire sur un terrain non à bâtir sans indiquer qu’il s’agit d’une quelconque tolérance ;

– à l’obtention d’un permis de construire ou au dépôt d’une telle demande ;

– à l’intention de construire. Le texte vise les « acquéreurs » assujettis et non pas les « constructeurs » assujettis ;

Nous considérons que l’engagement de construire ne requiert pas une intention particulière au moment où il est pris.

A notre sens, cette réponse vaut lorsque l’engagement de construire est pris dans l’acte d’acquisition. Elle devrait d’ailleurs être identique lorsque l’engagement est pris dans un acte complémentaire ou à l’occasion d’une substitution à un engagement de revendre.

En effet, dans ces deux derniers cas, le code général des impôts n’ajoute aucune condition particulière tenant à l’obtention d’un permis de construire ou au début des travaux pour justifier de l’engagement pris postérieurement à l’acquisition.

L’engagement de construire ne requiert donc pas d’intention particulière ?

L’engagement de construire n’est pas l’ancien engagement de revendre des marchands de biens. Cet engagement, qui leur était réservé, nécessitait en effet la preuve de l’intention de revendre lors de l’acquisition ainsi que tout au long de la détention de l’immeuble.

L’engagement de construire n’est pas non plus l’engagement des promoteurs ou des constructeurs. Il s’agit simplement de l’engagement des assujettis. La qualité d’assujetti est donc la seule preuve à apporter.

Quant à ceux qui au final ne respectent pas leur engagement de construire, le législateur a prévu des intérêts de retard pour leur faire payer le prix du temps. Le système a donc été verrouillé.

Les acquéreurs expérimentés qui font une application avisée des règles fiscales pourraient-ils être inquiétés sur le terrain de l’abus de droit ?

Tout risque n’est pas exclu. Cependant, de notre point de vue, cet angle d’attaque n’est pas évident dès lors que, dans le pire des cas, le non respect d’un engagement ne permet pas, en principe, d’éluder le montant des droits mais simplement d’en décaler le paiement. Au vu du verrouillage mis en place, il n’est pas non plus évident de démontrer qu’une telle situation serait contraire à l’intention du législateur.

Pour comparer, une affaire d’échelonnement du paiement d’une TVA non déductible a pu être considérée comme non abusive par la Cour de justice de l’Union européenne dès lors que le montants de taxe en cause demeuraient identiques (CJUE 22 décembre 2010, aff. 103/09, Weald Leasing Ltd).

Enfin, des contrôles fiscaux récents ont pu mettre en lumière la validité de tels engagements.

Sur un plan pratique, il faudra néanmoins prendre garde à rédiger un engagement conforme aux prescriptions de l’article 266 bis de l’annexe III au CGI et indiquer l’objet et la consistance des travaux sur lesquels portent l’engagement.

17
Mai

Dispense de TVA de l’article 257 bis –Promoteurs / marchands de biens ayant donné l’immeuble en location avec TVA dans l’attente de la vente

Plusieurs rescrits nominatifs de la Direction de la Législation Fiscale concernant la dispense de TVA de l’article 257 bis du CGI ont circulé ces derniers mois sous une forme anonyme. Ces rescrits ont indiqué que, sous certaines conditions, la dispense est applicable lorsqu’un promoteur ou un marchand de biens donne un immeuble en location avec TVA dans l’attente de la vente. Ces rescrits qui nous semblent tirer les conséquences de la suppression du régime des marchands de biens opérée par la réforme de la TVA immobilière, reposent sur l’idée que la dispense bénéficie aux transferts d’activité locative dès lors qu’il n’y a vente dès lachèvement pour les promoteurs ou revente immédiate pour les marchands de biens (interprétation de l’arrêt Zita Modes rendu par la CJCE le 7 novembre 2003).

La difficulté résulte du fait que ces rescrits nominatifs, qui ne sont opposables à ladministration fiscale que par leurs destinataires, s’écartent du rescrit publié N°2006/58 du 26 décembre 2006 qui indique que la dispense n’est pas applicable à l’hypothèse de la cession d’un immeuble comptabilisé en stock qui est donné en location avec TVA dans l’attente de sa vente.

Cette différence entre rescrits publiés et rescrits nominatifs soulève évidemment des discussions délicates lors de la signature des promesses de ventes. Comment en effet s’assurer que les rescrits publiés n’auront pas été modifiés d’ici à la signature de l’acte authentique ?
 
Dans ce contexte très particulier, une étude critique a été écrite pour le JCP notarial et la revue option finance avec notre confrère David Colin du cabinet Winston & Strawn.
 
Sur un plan pratique, de nouvelles demandes de rescrits nominatifs visant à confirmer et à officialiser l’application de la dispense ont été récemment déposés par nos deux cabinets dans les hypothèses suivantes:
  • Un promoteur a encaissé des loyers en TVA pendant plus de 6 mois avant la vente,
  • Un marchand de biens a encaissé des loyers en TVA pendant plus d’un an avant la revente.
Dans ce dernier cas, le fait que l’immeuble soit assimilé à une immobilisation pour les seuls besoins des régularisations de TVA est un élément qui nous semble important. En effet, bien que le régime des régularisations de TVA et celui de la dispense soient deux mécanismes totalement déconnectés, ce délai minium de location d’un an pourrait constituer, à notre avis, la base d’une analyse pragmatique favorable au bénéfice de la dispense.

 

William Stemmer et Delphine Nicault, Cabinet TAJ, membre de Deloitte Touche Tohmatsu limited