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Posts from the ‘Livraisons à soi-même’ Category

15
Nov

TVA – Livraison à soi-même – régime applicable aux immeubles ayant déjà fait l’objet d’une précédente livraison à soi-même


Il faut bien avouer que la livraison à soi-même est déjà un concept un peu « radical » dans les hypothèses simples. Il devient vraiment « abrupt » dans les hypothèses compliquées.

Nous envisageons ci-dessous l’hypothèse de la rénovation lourde d’un immeuble qui a déjà fait, par le passé, l’objet d’une précédente livraison à soi-même. L’hypothèse n’est pas fréquente mais néanmoins fait l’objet d’un commentaire spécifique dans le BOFIP.

Lorsque le constructeur d’un immeuble doit déclarer une livraison à soi-même, il est nécessaire de déterminer les éléments chiffrés à inclure dans la valeur à déclarer (i.e. la « base d’imposition »). Le principe est posé par l’article 266, 2-a du CGI : « […] la TVA est assise [pour les livraisons à soi-même d’immeubles neufs], sur le prix de revient total des immeubles, y compris le coût des terrains […] ».
S’agissant du coût du terrain, l’administration précise que sont à prendre à compte «  les sommes versées à un titre quelconque par le redevable pour entrer en possession dudit terrain (prix, honoraires des notaires, droits de mutation) ».

Lorsque le nouvel immeuble résulte de la rénovation d’un immeuble ancien qui, en son temps, a fait l’objet d’une précédente livraison à soi-même par le même constructeur, l’administration prévoit une tolérance : « Toutefois, lorsque la livraison à soi-même intervient à l’occasion d’une réhabilitation lourde, et que le redevable avait déjà pris en compte le coût du terrain lors d’une précédente livraison à soi-même de l’immeuble objet de la réhabilitation, il est admis que le coût pour entrer en possession du terrain est nul. En revanche, toutes les dépenses exposées au titre de cette opération sont à reprendre dans la base d’imposition de la nouvelle livraison ».  (BOI-TVA-IMM-10-20-10-20130123 § 230).
A tolérance apparaît cependant d’une portée pratique limitée pour deux raisons :

  1. Les constructeurs conservent rarement d’anciennes déclarations de TVA ayant plus de 10 ans : il n’est donc pas souvent possible de retrouver la preuve de la livraison à soi-même précédente et d’invoquer la tolérance,
  2. Les constructeurs qui auraient conserver ces documents seraient en peine de connaître la portée exacte de cette tolérance administrative qui ne vise que le terrain et qui n’inclut pas les constructions existantes pour partie conservées. Ces constructeurs devraient alors relire la jurisprudence communautaire déjà analysée dans TAXIMMO pour réfléchir à l’exclusion de ces constructions (voir https://taximmo.fr/livraison-a-soi-meme-cas-des-immeubles-neufs-ou-des-travaux-le-juge-communautaire-relance-les-debats-c-29911/ ).

Lue à contrario, cette doctrine peut enfin être génératrice d’erreur pour le constructeur qui penserait qu’en cas de « rénovation lourde » (i.e. conduisant à un immeuble neuf) d’un immeuble existant, seul le coût du terrain serait à prendre considération, à défaut de présenter la précédente déclaration de livraison à soi-même. En effet, ce constructeur rencontrerait des difficultés s’agissant du coût des constructions existantes.

28
Nov

Construction ou Rénovation d’un immeuble par un non récupérateur de TVA ou par un récupérateur partiel – risques et optimisations en matière de TVA et de TPF

 

L’arrêt de la Cour de Justice de l’Union européenne analysé le 25 novembre met en lumière la complexité des problématiques TVA de livraisons à soi-même qui doivent être déclarées par des non-récupérateurs de TVA ou par des récupérateurs partiels.

Cet arrêt donne l’occasion de faire un point sur les enjeux financiers et fiscaux entourant les projets de construction ou de rénovation.

Q: Qui est concerné ?

R: Les bailleurs d’immeubles, les établissements de santé, les établissements financiers, les compagnies d’assurance, les organismes à but non lucratif, les établissements d’enseignements, les crèches, etc.

Q: Quelles sont les opérations de constructions à surveiller ?
R: Toutes les opérations de constructions, de reconstructions ou de rénovations lourdes.

Q: Ces opérations doivent-elle être suivies lorsque les travaux sont confiés à un tiers ?
R: Oui et même dans l’hypothèse où les travaux sont réalisés à 100% par un tiers.

Q: A quel moment faut-il revoir les aspects TVA et TPF ?
R: Idéalement, avant le dépôt de la demande de permis de construire ou, le cas échéant, avant l’acquisition du terrain ou de l’immeuble à démolir ou à rénover.

Q: Existe-t-il un intérêt à revoir un projet en cours ou un projet déjà terminé ?
R: Oui. Des optimisations peuvent encore être mises en œuvre pour des projets achevées depuis le 1er janvier 2008.

Q: Quels sont les risques liés à la TVA ?
R: Ne pas anticiper le surcoût de TVA généré par la livraison à soi-même. Créer un cas de double-taxation des travaux à la TVA.

Q: Quels sont les risques liés à la TPF ?
R: Se priver de l’engagement de construire pour éviter la livraison à soi-même. Ne pas organiser le suivi fiscal de l’engagement.

Q: Quelles sont les optimisations liées à la TVA ?
R: Obtenir le remboursement de la TVA pendant la durée des travaux. Limiter le surcoût de TVA post-achèvement.

Q: Quelles sont les optimisations pour des projets achevés depuis le 1er janvier 2008 ?
R: Certains dossiers montrent une surcollecte importante de TVA dont le remboursement peut encore être demandé. La jurisprudence récente met également en lumière de nouvelles pistes de réduction de coûts.

25
Nov

Livraison à soi-même – cas des immeubles neufs ou des travaux – le juge communautaire relance les débats (C-299/11)

 

Un arrêt récent de la cour de justice de l’union européenne vient relancer des débats techniques concernant les livraisons à soi-même.

À la lecture de cet arrêt, on peut en effet se poser les questions suivantes :

– l’Etat membre qui a choisi de taxer la livraison à soi-même d’un bien affecté aux besoins de l’entreprise, peut-il exiger cette taxation lorsque l’assujetti récupère intégralement la TVA, sous prétexte que le bien peut faire l’objet d’une régularisation ultérieure (cas des immobilisations) ? L’arrêt n’envisage que l’hypothèse d’une affectation à une activité économique non récupératrice de TVA. Le juge rappelle à cet égard que l’option offerte aux Etats membres, vise à éliminer toute inégalité entre les assujettis exonérés qui acquièrent un bien auprès  d’un autre assujetti et ceux qui le font construire. La justification technique d’une régularisation potentielle future n’est envisagée à aucun moment.

– Un Etat membre qui n’a pas introduit la taxation des prestations à soi-même pour les besoins de l’entreprise et qui analyse les travaux immobiliers comme des prestations de services, peut-il soumettre ces travaux à une livraison à soi-même de biens, alors même que ces travaux ne conduisent pas à la production d’un immeuble neuf ? Pour mémoire, la France taxe la livraison à soi-même de certains travaux immobilisés lorsque l’assujetti est totalement ou partiellement soumis à la TVA. En revanche, les assujettis totalement non récupérateurs y échappent. Les biens en stock ne sont pas non plus concernés. En pratique, sont donc notamment visés les bailleurs d’immeubles qui comprennent des locaux d’habitation et des commerces. Ce cas est d’autant plus regrettable que la livraison à soi-même vient, en théorie, priver d’effet le taux réduit facturé par les entreprises de travaux. En effet, une telle livraison à soi-même ne bénéficie pas du taux réduit de la TVA, sous réserve des logements sociaux. Antérieurement à 1980, la France taxait expressément la livraison à soi-même des travaux immobiliers. Les règles à présent en vigueur mettent en doute cette taxation. En effet, lorsque les travaux immobiliers ne conduisent pas à la création d’un bien nouveau, ceux-ci s’intègrent donc au bien immeuble sur lequel ils portent et ne peuvent donc pas être taxés en tant que tels, sauf à introduire la taxation des prestations de services à soi-même. Envisager séparément ces travaux de l’immeuble sur lequel ils portent, reviendraient à contredire les règles qui régissent la livraison de ces immeubles.

L’arrêt apporte par ailleurs une précision très intéressante. Selon le juge communautaire, on ne peut pas inclure dans la base d’imposition de la livraison à soi-même la valeur d’un bien qui a déjà fait l’objet d’une taxation à un stade antérieur. Ainsi, lorsqu’un immeuble a été acquis en TVA ou lorsqu’il a déjà fait l’objet d’une livraison à soi-même, il ne serait plus possible de le prendre en compte pour une livraison à soi-même ultérieure s’il venait à être reconstruit. On se souvient que l’instruction 3 A-9-10 contenait une tolérance similaire lorsque l’immeuble reconstruit a déjà fait l’objet d’une livraison à soi-même antérieure (paragraphe 97 aujourd’hui repris au paragraphe 340 du BOI-TVA-IMM-10-20-10-20120912). L’arrêt semble aller plus loin puisqu’il viserait également le cas d’une acquisition soumise à la TVA.