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Posts from the ‘Terrains à bâtir’ Category

11
Nov

TVA – notion d’opération patrimoniale – cession d’un terrain à bâtir par un bailleur

La cession d’un terrain à bâtir est soumise à la TVA lorsqu’elle est réalisée par un assujetti agissant en tant que tel, c’est-à-dire par une personne qui exerce de manière habituelle une activité économique et qui cède le terrain dans le cadre de cette activité économique. Ainsi, l’assujetti qui cède un terrain à bâtir en dehors de cette activité économique, autrement dit, à titre privé ou patrimonial, n’agit pas en tant que tel et la cession du terrain à bâtir n’est pas soumise à la TVA.

La Cour d’appel de Lyon vient de juger dans une décision du 25 octobre 2016, n° 15LY00831, société LMG, qu’agit en tant qu’assujetti un bailleur qui cède un terrain à bâtir dans les circonstances suivantes :  acquisition d’un terrain, obtention du remboursement de la TVA grevant l’acquisition de ce terrain, construction d’un immeuble donné en location avec TVA sur une partie de ce terrain et cession de la partie restante, dépourvue de construction, du terrain à bâtir.

Le juge considère que la cession de ce terrain est donc soumise à la TVA de plein droit dès lors qu’elle est effectuée par un assujetti agissant en tant que tel. La cession de la parcelle litigieuse se rattache en effet directement à l’activité économique de bailleur du cédant.

Le coin des experts

Cette décision est dans la droite ligne d’une décision de principe du Conseil d’Etat « Société SUDFER » du 29 décembre 1995, n° 118754. La Cour d’appel reprend d’ailleurs le considérant de l’arrêt SUDFER, en omettant toutefois de tirer les conséquences de la modification de la notion d’assujetti opérée par l’article 3 de la loi n° 92-677 du 17 juillet 1992 qui a précisé que seul l’exercice d’une activité économique, de manière habituelle, conférait la qualité d’assujetti, l’exercice ponctuel n’étant, en principe, plus retenu.

L’immobilier a connu un régime d’exception jusqu’au 31 décembre 2012, s’agissant de certains immeubles neufs mais pas de terrains à bâtir, régime plus connu sous le nom de « TVA immobilière des particuliers » (voir en ce sens notre article https://taximmo.fr/3eme-lfr-2012-suppression-de-la-tva-immobiliere-des-particuliers-mesures-transitoires/)

7
Sep

TVA sur marge – critères d’appréciation de la condition d’identité fiscale – changement des règles du jeu

 

La vente d’un TAB par un assujetti agissant en tant que tel est soumise à la TVA de plein droit. Selon les cas, la TVA est due sur la marge ou sur le prix total. La vente d’un immeuble achevé depuis plus de 5 ans peut, lorsque l’immeuble est vendu par un assujetti agissant en tant que tel, être soumise à la TVA sur option. A nouveau, cette TVA est due, selon les cas, sur la marge ou sur le prix total. 

La détermination des conditions d’application de la TVA sur marge et de la TVA sur prix total a déjà fait l’objet de nombreuses discussions. 

Dans ses premières communications, l’administration fiscale indiquait que la TVA sur prix était le principe et que la TVA sur marge était l’exception. Les parties avaient donc le choix d’appliquer la TVA sur le prix, y compris par pure convenance. L’instruction 3 A-9-10 reprise au BOFIP n’a cependant pas officialisé cette thèse. La TVA doit être donc être calculée pour son montant exact sauf lorsque les tolérances spécifiques prévues par le BOFIP, peuvent être appliquées. 

S’agissant des conditions à remplir pour déterminer si la TVA sur la marge est applicable, deux conditions cumulatives ont été finalement retenues par l’administration fiscale. La première, une acquisition non grevée de TVA (TVA sur prix, TVA sur marge ou encore TVA d’attestation de l’article 207, III-3 de l’annexe II au CGI). La seconde, une condition d’identité : « revendre ce qui a été acquis ». L’objectif était d’éviter une TVA sur marge lorsqu’un terrain était revendu à la suite de l’acquisition d’un bâtiment démoli par le vendeur. La TVA sur le prix devait dans cette hypothèse, être applicable. Pour autant, après réflexion, la TVA sur marge jouait déjà son rôle de manière efficace dans la mesure où un tel opérateur est sensé revendre plus cher ce qu’il a acquis, y compris après démolition. Pour remplir ce cahier des charges, la condition d’identité devait être appréciée de manière « physique ». Dit autrement, le terrain revendu (ou la partie du terrain revendue) ne devait pas supporter de construction (au sens de la TVA) lors de son acquisition. Au demeurant, cette appréciation physique était totalement en ligne avec la notion objective de TAB. Un TAB est un terrain, qui n’est donc pas le terrain d’emprise de constructions au sens de la TVA, qui est situé dans une zone constructible du PLU. 

A la suite de contentieux concernant des opérations de marchands de biens portant sur des détachements de parcelles, des services vérificateurs ont considéré que la condition d’identité n’était pas remplie au motif que la division cadastrale avait été opérée postérieurement à l’acquisition. La TVA sur marge était donc contestée et la TVA sur le prix était exigée.  

Une analyse fondée sur l’appréciation physique de la condition d’identité aurait dû mettre fin à ces redressements dès lors que la parcelle détachée ne comportait pas de constructions au sens de la TVA. Au regard de l’analyse objective du TAB au sens de la TVA, la parcelle détachée constituait un TAB au moment de l’acquisition et lors de la revente.  

Une réponse ministérielle qui vient d’être publiée, cherche à justifier ces redressements en modifiant les modalités d’appréciation de la condition d’identité.  

L’administration précise à présent que le bien revendu doit être identique au bien acquis « quant à ses caractéristiques physiques et sa qualification juridique ». Premières remarques. Nous comprenons le renvoi aux caractéristiques physiques dans la mesure où il est cohérent avec la notion objective de TAB. En revanche, quelle est la logique du renvoi à une « qualification juridique » alors que l’objectif de la réforme était de mettre en place une définition objective du TAB, indépendante de la volonté des parties ? Au-delà, on peut s’interroger sur le droit applicable pour déterminer cette qualification juridique, par exemple en cas de modification du PLU.

L’administration poursuit. « Ainsi, en cas de division parcellaire intervenue entre l’acquisition initiale et la cession ayant entraîné un changement de qualification ou un changement physique telle une modification des superficies vendues par rapport à l’acte d’acquisition, la taxation doit se faire sur le prix de vente total en application des articles 266 et 267 du CGI ». Seconde remarque. Le changement physique n’est plus seulement un changement lié à la qualification TVA, basée sur des critères objectifs (existence ou non de constructions) mais est étendu à une simple modification des superficies. L’ensemble des opérations de découpe de terrains (mais nous comprenons également de bâtiment) ne peuvent donc plus être soumises à la TVA sur marge, sauf dans la limite que l’administration fiscale indique ci-après. Lorsqu’on se souvient que le cahier des charges de la réforme de la TVA immobilière incluait la préservation des équilibres économiques de l’ancien régime, une telle solution s’en écarte radicalement.

L’administration précise enfin que continueront à relever de la TVA sur la marge, les opérations suivantes : « lorsque la division parcellaire est antérieure à l’acte d’acquisition initial ou qu’un document d’arpentage a été établi pour les besoins de la cession, permettant d’identifier les différentes parcelles dans l’acte, la taxation sur la marge s’applique dès lors qu’aucun changement physique ou de qualification juridique des parcelles cédées n’est intervenu avant la revente ».

Cette évolution, si elle devait être confirmée, nous paraît très critiquable dans la mesure où elle empêche l’application du régime de TVA sur marge dans des hypothèses où il a précisément vocation à s’appliquer, c’est-à-dire des opérations de marchands de biens et des opérations de lotisseurs / aménageurs.

A noter que ce changement de règles du jeu ne s’accompagne d’aucune mesure transitoire.

Consulter le texte de la réponse ministérielle

 

30
Nov

TVA – détachement d’un terrain à bâtir – TVA sur marge ou TVA sur prix ?

 

Une question ministérielle vient d’être publiée concernant une problématique qui a donné lieu à de nombreux redressements de TVA ces derniers mois.

La question est la suivante :

« M. Olivier Carré appelle l’attention de M. le ministre des finances et des comptes publics sur les régimes de plus-values immobilières et de TVA applicables lors de la vente d’un immeuble par un particulier au profit d’un marchand de bien ou d’un lotisseur, et des reventes ultérieures effectuées par ce dernier. Il vise plus particulièrement le cas de l’acquisition, par un marchand de bien ou un lotisseur, auprès d’un particulier, d’un immeuble comprenant une construction et un vaste terrain d’assiette constructible, lorsque l’intention de l’acquéreur, connue au jour de la vente (un permis d’aménager ayant été obtenu), est de diviser puis de revendre l’immeuble, pour partie comme terrain bâti et pour le surplus comme lots de terrains à bâtir. En effet, lors des reventes par le marchand de bien (ou le lotisseur), il semblerait que la doctrine fiscale exige, pour permettre la taxation des prix de reventes à la TVA sur la marge en vertu de l’article 268 du CGI, des conditions non prévues par ce texte (division préalable à l’acquisition notamment). Il souhaiterait connaître la position du ministre sur ce point.

A ce jour, aucune réponse n’a encore été officiellement donnée à cette question même si un rescrit nominatif concernant une affaire particulière peut circuler.

Cette question est d’une grande importance technique et pratique dans la mesure où elle est au coeur de plusieurs sujets fondamentaux :

– la définition objective des terrains à bâtir : en principe, le projet des parties n’a pas de conséquence sur la qualification du bien vendu. Pour quelles raisons en serait-il différemment de la division cadastrale ?

– la condition d’identité entre le bien vendu et le bien acquis (i.e. l’une des deux conditions cumulatives nécessaires à l’application du régime de la marge) : cette condition, qui est apparue lors de l’élaboration de l’instruction fiscale afin de soumettre à la TVA sur le prix, la vente d’un terrain à la suite de la démolition de constructions, n’a pas été suffisamment précisée, notamment s’agissant de la question de savoir si l’analyse de l’identité devait être simplement « physique », ce qui fait sens avec la notion objective de terrain à bâtir, ou « fiscale ».

– l’absence de définition du terrain d’emprise d’une construction : lorsqu’une construction est édifiée sur un terrain, la partie du terrain qui doit suivre le régime de la construction n’a pas été définie.

Derrière ces questions théoriques, il y a une difficulté pratique : dans une opération où le marchand de biens devrait normalement être taxé sur la marge, à hauteur de sa valeur ajoutée, une taxation sur le prix total est exigée.

 

6
Sep

A propos du renvoi à la notion TVA de terrain à bâtir pour la taxation des plus-values immobilières des particuliers

 

Les commentaires publiés cet été sur le BOFiP en matière de plus-values immobilières (http://bofip.impots.gouv.fr/bofip/8956-PGP et http://bofip.impots.gouv.fr/bofip/8961-PGP) et de taxe sur les plus-values immobilières élevées (http://bofip.impots.gouv.fr/bofip/8779-PGP) renvoient à la notion TVA de « terrain à bâtir » (TAB).

En tant que spécialistes de la TVA, un tel renvoi apparaît étonnant tant la notion TVA de TAB est issue d’un contexte bien spécifique. On se souvient en effet que cette notion est l’une des notions phares de la réforme de la TVA immobilière opérée par l’article 16 de la loi n° 2010-237 du 9 mars 2010.

Cette loi devait remplir un objectif délicat qui était de mettre le droit français en conformité avec le droit communautaire tout en préservant les équilibres économiques antérieurs.

Dans ce contexte, le législateur a prévu que sont considérés comme terrains à bâtir, « les terrains sur lesquels des constructions peuvent être autorisées en application d’un plan local d’urbanisme, d’un autre document d’urbanisme en tenant lieu, d’une carte communale ou de l’article L. 111-1-2 du code de l’urbanisme ».

En clair, l’intention de construire de l’acquéreur n’est plus prise en considération (un terrain peut être un TAB, au sens de la TVA, alors même que l’acquéreur n’a pas de projet de construction). Seule prime une qualification objective sur la base de la documentation d’urbanisme. La notion TVA de TAB est donc extrêmement large dans la mesure où la notion TVA ne se limite pas aux terrains aménagés en vue d’une construction future.

Par ailleurs, en raison de l’adoption du texte à marche forcée, plusieurs aspects sont absents du code général des impôts. Il aurait en effet pu être utilement précisé que :
  • un terrain au sens de la TVA s’entend d’un terrain qui n’est pas recouvert de construction :  le terrain d’emprise d’un immeuble est donc assimilé à l’immeuble. Cette précision apparaît étonnante mais il faut savoir que la Belgique a longtemps distingué ces deux éléments avant qu’un arrêt de la Cour de Justice de l’Union européenne ne mette en doute ce découpage ;
  • un terrain doit suivre le régime d’un immeuble bâti lorsqu’il est son accessoire : bien que le principe de l’accessoire suit le principal soit reconnu en matière de TVA, son application demeure subjective et des règles pratiques précises auraient été les bienvenues.

Dernier point très important. La notion TVA de TAB n’a pu être conçue de la sorte que parce qu’il était clair depuis le départ qu’elle ne concernerait que les assujettis à la TVA. En effet, toutes les ventes de TAB par des particuliers échappaient à la taxe en raison de leur qualité de non assujetti. Cependant, ceci a très vite posé des difficultés, notamment en raison de la disparition de l’exonération de TVA dont bénéficiaient les collectivités locales et il a été nécessaire de « raviver » la notion d’opération patrimoniale afin de permettre à des assujettis à la TVA de ne pas soumettre la cession de certains TAB à la taxe.

Tout ceci pour dire que la notion TVA des TAB repose sur un équilibre subtile qui n’appartient qu’à la TVA.

Cet équilibre a été précisé par l’instruction fiscale parue au BOI 3 A-9-10 qui a été depuis reprise au BOFiP.

En simplifiant à l’extrême, la lecture de ces commentaires permet de comprendre que la notion TVA de TAB recouvre notamment les terrains situés en zone U du PLU y compris lorsqu’ils ne peuvent pas, dans les faits, être construits (§ 10 à 100 du BOI-TVA-IMM-10-10-10-20-20120912).

Il est ensuite indiqué que les terrains qui comportent des constructions au sens de la TVA (notion très large qui inclut notamment les routes) ne constituent pas des TAB (§ 110 du BOI-TVA-IMM-10-10-10-20-20120912). Le fait que l’acquéreur les achète pour les démolir est, à cet égard, sans incidence. En revanche, lorsque la construction en cause est une ruine ou un chantier inabouti,  il en est fait abstraction et c’est la qualification de terrain qui prime (§ 120 du BOI-TVA-IMM-10-10-10-20-20120912).

Enfin, un autre passage du BOFiP – déconnecté de la définition TVA du TAB – apporte une règle pratique s’agissant de l’hypothèse de la vente d’un immeuble avec le terrain y attenant (i.e. du pavillon et de son jardin). Il est en effet indiqué que, sous certaines conditions, « il sera alors admis de considérer l’ensemble en tant qu’immeuble bâti s’il est identifié de la sorte comme une seule parcelle pour l’établissement du plan cadastral » (§ 20 du BOI-TVA-IMM-10-10-10-40-20130107). Le BOFIP ne contient pas d’autres commentaires permettant de considérer l’immeuble bâti et le terrain y attenant comme un tout qui serait qualifié d’immeuble bâti.

Envisageons à présent les renvois opérés par les commentaires qui ont été publiés cet été.

S’agissant du régime des plus-values des particuliers, le BOFIP renvoie aux § 10 à 120 du BOI-TVA-IMM-10-10-10-20-20120912 (§ 140 du BOI-RFPI-PVI-20-20-20130809). Il est donc fait référence à la notion large des TAB et aux ruines assimilées aux TAB. En revanche, pas de renvoi pour le cas des terrains attenant aux immeubles bâtis, ce qui sous-entendrait – en première lecture – qu’ils devraient être traités séparément (§ 20 du BOI-TVA-IMM-10-10-10-40-20130107 non repris).

En ce qui concerne, l’abattement exceptionnel de 25 % sur les plus-values résultant de cessions intervenant du 1er septembre 2013 au 31 août 2014, le BOFIP renvoie aux § 10 à 100 du BOI-TVA-IMM-10-10-10-20-20120912 (§ 290 du BOI-RFPI-PVI-20-20-20130809). Il s’agit donc d’un renvoi différent puisque les § 110 et 120 sont occultés. Les ruines seraient-elles à présent des immeubles bâtis et non plus des TAB (§ 120 non repris) ? Quant aux terrains qui comportent des constructions, ceux-ci pourraient-ils néanmoins être qualifiés de TAB (§ 110 non repris) ? Pas de renvoi non plus pour le cas des terrains attenant aux immeubles bâtis (§ 20 du BOI-TVA-IMM-10-10-10-40-20130107 non repris).

Enfin, en ce qui concerne la taxe sur les plus-values immobilières élevées (qui ne concerne pas les TAB), le § 120 du  BOI-RFPI-TPVIE-10-20130806 renvoie aux § 10 à 120 du BOI-TVA-IMM-10-10-10-20-20120912. Cette taxe ne s’appliquerait donc pas à une « ruine » TVA dès lors qu’elle serait assimilée à un TAB. Par ailleurs, les terrains attenant aux immeubles bâtis seraient également exclus du champ de cette taxe s’ils sont situés dans une zone constructible du PLU (§ 20 du BOI-TVA-IMM-10-10-10-40-20130107 non repris). Le jardin pourrait-il donc suivre un régime différent de celui de la maison ?

Vus de la planète TVA, ces renvois apparaissent bien surprenants et on peut se demander s’il n’était pas plus pertinent de retenir une notion différente de TAB.