Aller au contenu

Posts from the ‘TVA sur marge’ Category

9
Mar

TVA sur marge – application de l’arrêt ICADE PROMOTION par la CAA de Bordeaux

Dans une affaire de revente de terrains à bâtir à la suite de l’acquisition d’un ensemble bâti, ayant nécessité une division parcellaire post acquisition, la CAA de Bordeaux a jugé que la TVA sur marge n’était pas applicable mais que la TVA sur prix était due.

Point intéressant de cet arrêt, qui s’agissant de la solution n’a rien de novateur : l’arrêt ICADE PROMOTION est cité et appliqué.

« Il est constant que les terrains à bâtir ainsi vendus par la société intimée formaient lors de leur acquisition par la société, une partie d’un terrain bâti. En outre, il résulte de l’instruction que l’acquisition a été effectuée auprès de non-assujettis et n’a pas été soumise à la taxe sur la valeur ajoutée et il ne résulte d’aucun élément de l’instruction que le prix d’acquisition incorpore un montant de taxe sur la valeur ajoutée qui a été acquittée en amont par le vendeur initial. »

Consulter CAA de BORDEAUX, 5ème ch., 28/02/2022, 19BX03112, « Inédit au recueil Lebon »

Nota du 25 mars 2022 : dans le même sens :
–  CAA de BORDEAUX, 5ème chambre, 28/02/2022, 19BX03111, « Inédit au recueil Lebon »
CAA de BORDEAUX, 5ème chambre, 28/02/2022, 18BX03085, « Inédit au recueil Lebon » qui contient un passage intéressant :
« l’opération doit être regardée comme portant sur la livraison d’un terrain à bâtir pour l’application des dispositions du I de l’article 257 précité. Toutefois, il résulte de l’acte d’acquisition du 29 avril 2014 que l’acquisition initiale par la société AMVF a été effectuée auprès d’un particulier non-assujetti et n’a pas été soumise à la taxe sur la valeur ajoutée et il ne résulte d’aucun élément de l’instruction que le prix d’acquisition incorpore un montant de taxe sur la valeur ajoutée qui aurait été acquittée en amont par le vendeur initial. Dès lors, cette cession ne peut ouvrir droit à l’application du régime de taxation sur la marge prévu à l’article 268 du code général des impôts. »

Les commentaires du BOFIP n’étaient pas opposables dans la mesure où la société ne faisait pas face à un réhaussement d’imposition mais demandait le remboursement d’une TVA qu’elle avait initialement versée. Par ailleurs, selon la CAA de Bordeaux, la société n’avait pas appliqué les commentaires du BOFIP dans la première déclaration de TVA, ce qui rendait les commentaires ensuite inopposables à l’administration (voir en sens contraire, Conseil d’État, 8ème – 3ème chambres réunies, 11/03/2022, 448818, « Inédit au recueil Lebon »)

1
Fév

TVA sur marge – réponse ministérielle sécurisant temporairement le régime de la TVA sur marge (suite de l’arrêt Icade Promotion)

A la suite de l’arrêt Icade Promotion, une question écrite avait été déposée afin de sécuriser le régime de la TVA sur marge s’agissant des opérations en cours (voir notre article du 9 novembre 2021).

L’idée était de pouvoir continuer à appliquer les commentaires de l’administration fiscale tant que celle-ci ne les modifie pas alors que certains de ces commentaires peuvent être contraires à la solution rendue dans l’affaire Icade Promotion.

La réponse ministérielle du 1er février 2022 apporte la réponse souhaitée.

« Après que le juge national aura tranché le litige national en cours, en concertation avec les acteurs du secteur de l’immobilier, l’administration tirera les conséquences de cet arrêt de la Cour par une mise à jour de ses commentaires publiés au Bulletin officiel des finances publiques – impôt (BOFiP-I) sous la référence BOI-TVA-IMM-10-20-10. À cet égard, aussi longtemps que cette mise à jour n’est pas intervenue, les assujettis revendeurs bénéficient pleinement de la garantie prévue par les dispositions de l’article L. 80 A du livre des procédures fiscales (LPF). Cette garantie permet au contribuable de bonne foi de se prévaloir de l’interprétation faite par l’administration d’un texte, même contraire au droit de l’Union tel que précisé par la jurisprudence de la CJUE. En outre, cette garantie interdit à l’administration fiscale de remettre en cause l’application par un redevable d’un texte fiscal effectuée conformément à l’interprétation que l’administration avait fait connaître par ses instructions ou circulaires publiées et qu’elle n’avait pas rapportées à la date des opérations en cause (avis « Monzani » n° 353782 du Conseil d’État du 8 mars 2013). Enfin, le Gouvernement entend préciser que cette mise à jour de la doctrine fiscale n’aura pas vocation à remettre en cause les équilibres économiques des opérations en cours. Ainsi, dans le cadre de la revente d’un bien immobilier intervenant postérieurement à la date de publication des futures précisions doctrinales tirant les conséquences de la jurisprudence de la CJUE, l’assujetti revendeur pourra continuer à se prévaloir de l’actuelle doctrine fiscale si son acquisition du bien considéré est intervenue ou a fait l’objet d’un compromis de vente antérieurement à cette publication. »

En clair, les commentaires de l’administration fiscale demeurent opposables s’agissant des ventes qui interviendront avant la mise à jour du BOFiP-I. Le fait que ces commentaires puissent être contraires au droit de l’Union est sans incidence.

Point important. Les commentaires demeurent opposables lorsque les ventes interviennent après la mise à jour du BOFiP-I si l’acquisition du bien est intervenue ou a fait l’objet d’un compromis de vente antérieurement à la mise à jour.

Selon nos informations, la notion d’assujetti revendeur qui est visée dans la réponse ministérielle vise tout assujetti susceptible d’appliquer le régime de la TVA sur marge. En conséquence, est sans incidence sur la portée de la réponse ministérielle, le fait que l’immeuble vendu ait été comptabilisé en stock ou en immobilisation.

Enfin, n’oublions pas que les commentaires de l’administration fiscale peuvent ne pas être appliqués, les opérateurs préférant appliquer la solution rendue par la CJUE dans l’affaire Icade Promotion.

Les clauses fiscales pourront idéalement être rédigées de telle manière qu’elles permettent de bien comprendre les « règles » (commentaires de l’administration ou règles de droit) appliquées.

Consulter la réponse ministérielle Grau N°42486 AN 1er février 2022.

9
Nov

TVA sur marge – dépôt d’une question écrite à la suite de l’arrêt Icade Promotion

Une question écrite a été déposée afin de sécuriser le régime de la TVA sur marge à la suite de l’arrêt Icade Promotion (voir notre article en date du 18 septembre 2021).

On se souvient que la CJUE a récemment rendu un arrêt qui peut remettre en cause l’application de la TVA sur marge dans de nombreuses opérations. Dans ces dossiers, la TVA sur marge ne peut plus aujourd’hui être appliquée que dans le respect et l’opposabilité des commentaires de l’administration fiscale, publiés au BOFIP.

Pour mémoire, le BOI-TVA-IMM-10-20-10 permet d’appliquer le régime de la TVA sur marge lorsque, toutes les autres conditions étant réputées réunies, l’acquisition par le vendeur a été exonérée de la TVA ou placée en dehors du champ d’application de la taxe. La CJUE a partiellement remis en cause cette analyse en exigeant une condition supplémentaire qui demeure à définir.

En principe, les commentaires opposables sont ceux qui sont publiés au jour de la signature de l’acte authentique.

Dans la mesure où le rédacteur d’acte et les parties à une opération sont souvent dans l’obligation d’anticiper le régime de TVA applicable dès la signature de la promesse ou même avant, lors du dépôt de l’autorisation d’urbanisme permettant de réaliser l’opération, une question écrite a été déposée en vue de poursuivre un double objectif.

Permettre à l’administration fiscale de rappeler le principe de l’opposabilité des commentaires actuellement publiés, nonobstant leur contrariété au droit de l’union européenne.

Prévoir que les commentaires actuels puissent être opposés par les parties pour des opérations « en cours », dont l’acte authentique sera signé après la publication de nouveaux commentaires.

Consulter la question écrite n° 42486, JO AN du 9/11/2021

Ps : afin de recevoir à nouveau un email vous alertant lorsqu’une actualité est publiée, il est nécessaire de vous réinscrire sur le site 🙂

18
Sep

TVA sur marge – la CJUE a rendu son arrêt dans l’affaire Icade Promotion (C-299/20)

La CJUE vient de rendre l’arrêt Icade Promotion concernant le régime de TVA sur marge. Cet arrêt concerne l’ancien régime de TVA sur marge (i.e. avant le 11 mars 2010) sur lequel nous ne reviendrons pas. En revanche, cet arrêt apporte des enseignements sur le régime actuellement applicable, que nous allons tenter de synthétiser.

Premier enseignement. La régime de marge requiert une condition d’identité « juridique » qui repose sur la comparaison de la qualification TVA de ce qui est acheté avec ce qui est revendu (§ 53 de l’arrêt). Il faut donc acheter et revendre un terrain à bâtir si on veut appliquer la TVA sur marge sur la revente de ce terrain à bâtir.

Nota : dans le même sens, CJUE 10 février 2022, C-191/21, Les Anges d’Eux SARL, Echo 5 SARL, Cletimmo SAS, § 27)

Deuxième enseignement. Le régime de marge ne requiert pas de condition d’identité « physique ». le découpage physique du terrain n’a pas de conséquence (§ 60 de l’arrêt).

Nota : dans le même sens, CJUE 10 février 2022, C-191/21, Les Anges d’Eux SARL, Echo 5 SARL, Cletimmo SAS, § 30)

Troisième enseignement. Un terrain à bâtir qui fait l’objet de travaux de raccordement aux réseaux demeurent un terrain à bâtir et ne devient pas un bâtiment (§ 57 de l’arrêt). Ce n’était pas évident pour l’avocat général (voir notre article concernant les conclusions de l’avocat général).

Quatrième enseignement. La TVA sur marge ne s’applique pas lorsque l’acquisition par l’acheteur-revendeur est soit hors champ de la TVA (acquisition auprès d’un non-assujetti ou un assujetti n’agissant pas en tant que tel) soit exonérée de la TVA sauf « lorsque le prix auquel l’assujetti-revendeur a acquis ces biens incorpore un montant de TVA qui a été acquitté en amont par le vendeur initial ». Il va donc falloir aller voir ce qui s’est pas passé chez le vendeur initial pour connaître le régime applicable à la revente par l’acheteur-revendeur et il faut bien avouer que ce qui est à vérifier chez le vendeur initial n’est pas clair (§ 46 de l’arrêt). Selon l’interprétation qui sera retenue par l’administration fiscale, ce quatrième enseignement pourra considérablement réduire le champ de la TVA sur marge au profit de la TVA sur le prix.

Quelle conséquence aujourd’hui ? Pour ceux qui souhaitent appliquer le BOFIP et les réponses ministérielles actuellement publiés, cet arrêt ne produit aucune conséquence pour une vente signée ce jour. La doctrine de l’administration fiscale est opposable et il est toujours utile de rappeler cette doctrine dans la clause fiscale de l’acte.

Quelle conséquence demain ? tout dépendra des commentaires que fera l’administration fiscale du quatrième enseignement.

Deux dernières remarques.

L’arrêt remet en cause la condition d’identité « physique », qui nous permet, dans certains cas, de passer en TVA sur prix dans les opérations où la TVA sur marge n’est pas souhaitée. Lorsque l’administration fiscale fera un commentaire de la condition d’identité pour la restreindre la composante « juridique », il serait souhaitable d’inclure une option pour la TVA sur le prix lorsque la TVA sur marge est normalement applicable.

L’arrêt ne traite pas du détachement d’une parcelle, lorsque la parcelle d’origine supporte un bâtiment. A ce jour, l’administration fiscale considère que la condition d’identité « juridique » n’est pas remplie sauf lorsque le « découpage » a lieu avant l’achat par l’acheteur-revendeur (voir la réponse de la Raudière AN. 30 août 2016, n° 94061 analysée dans l’article suivant).